Un temps ouverts à l'éventualité d'une taxation mondiale discutée au sein de l'OCDE, les États-Unis ont décidé de faire volte-face. Non sans irriter Bruno Le Maire, qui évoque « une provocation ».
Dans une lettre adressée aux ministres des Finances français, britannique, espagnol et italien en date du 12 juin, le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a fait savoir à ses homologues européens la volonté des États-Unis de ne pas poursuivre les discussions et négociations autour de la taxation des géants du numérique, dite « taxe GAFA », au sein de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Un retrait qui irrite et intervient alors qu'un accord était proche.
« À quelques centimètres d'un accord », dixit Bruno Le Maire
Les États-Unis avaient mis la pression pour que les pays souhaitant mettre en place une taxation nationale des grandes entreprises se réunissent au sein de l'OCDE et travaillent ensemble à une taxe unique, mondiale et uniformisée. Pour obtenir satisfaction, les USA ont joué sur l'intimidation en brandissant la menace de sanctions économiques, comme une taxation des produits français, pour tout pays qui n'accepterait pas la négociation collective.
Brusquement, il y a quelques jours, les USA ont donc décidé de se retirer des négociations, évoquant une « impasse » alors même que, selon Bruno Le Maire, « nous étions à quelques centimètres d'un accord sur la taxation des géants du numérique, au moment où les grandes entreprises du numérique sont peut-être les seules au monde à avoir tiré d'immenses bénéfices de la crise du coronavirus ».
Réagissant au micro de France Inter ce jeudi matin, le ministre français de l'Économie et des Finances dénonce « une provocation vis-à-vis des partenaires de l'OCDE ». Steven Mnuchin, lui, fait acte de protectionnisme en affirmant, dans sa missive, que les États-Unis ne seraient pas en mesure de s'entendre, même provisoirement, sur une modification ou un ajustement de la législation mondiale qui viendrait frapper les entreprises américaines.
Il y aura bien une taxation des géants du numérique, en France et en 2020
Forcément, ce retournement de situation agace les alliés des Américains. « Qu'est-ce que c'est que cette manière de traiter les alliés des États-Unis, dont les Britanniques, les Espagnols, les Italiens et les Français, en nous menaçant systématiquement de sanctions ? » déplore Bruno Le Maire alors que Steven Mnuchin a réitéré, dans sa fameuse lettre, que « si les pays choisissent de percevoir ou d'adopter de telles taxes, les États-Unis réagiront en prenant les mesures appropriées ».
Le ministre français, irrité, on le devine, maintient tout de même son idée de départ, à savoir qu'une taxe GAFA interviendra bien en France, et ce en 2020. « Soit les États-Unis reviennent sur leur position et nous arrivons à un accord d'ici la fin de l'année 2020 et c'est la taxation internationale qui s'appliquera, ce que nous avons toujours souhaité avec le président de la République, […] soit nous appliquerons notre taxe nationale, qui n'a jamais été retirée mais simplement suspendue », indique et rappelle le pensionnaire de Bercy.
Évoquant une « question de justice », la France compte sur une coopération interétatique pour faire pression sur les États-Unis et constituer un front qui saura faire pencher la balance en sa faveur. À la fin du mois de janvier, 137 pays étaient en effet d'accord sur le principe d'une taxation des grandes entreprises du secteur dans le cadre de l'OCDE.
Source : TWSJ