Depuis le début de la guerre en Ukraine, le gouvernement russe bloque l'accès dans le pays à de nombreuses plateformes pouvant apporter des informations différentes des leurs. Wikipédia n'en est pas encore là, mais est menacé, si bien que de nombreux Russes se sont mis à télécharger les pages écrites dans leur langue pour préserver un certain accès à l'information.
Une enquête du média américain Slate révèle que des dizaines de milliers de téléchargements ont été effectués sur les seules pages russes depuis le début de la guerre.
Préserver le savoir
Facebook et Instagram viennent d'être totalement interdits en Russie pour cause d'activités « extrémistes » selon le gouvernement de Vladimir Poutine. Faisant suite aux très nombreuses sanctions et arrêts des services des géants du numérique occidentaux, la Russie contre-attaque en bloquant purement et simplement sur tout le territoire les grandes plateformes sociales qui pourraient apporter des informations différentes de celles des médias du pouvoir. La Russie a même menacé de bloquer Wikipédia, entraînant une augmentation importante des téléchargements des pages russes de l'encyclopédie numérique géante.
C'est le site américain Slate qui a mené l'enquête en observant une poussée importante des chiffres venant de Russie sur le site Kiwix. Le média a pu noter une nette augmentation des téléchargements du Wikipédia russe sur le site depuis le début de l'invasion de l'Ukraine par les forces armées du pays des Tsars. Depuis début mars, et à l'heure où ces lignes sont écrites, on compte plus de 150 000 téléchargements, pour la plupart des pages en russe de l'encyclopédie.
Selon le patron de Kiwix Stéphane Coillet-Matillon, les téléchargements russes représentent désormais 42 % de tout le trafic sur les serveurs de Kiwix contre seulement 2 % avant la guerre. Des milliers de personnes donc qui ont décidé de garder dans un coin l'accès à un savoir qui se veut le plus objectif possible, tenant sur seulement 29 GB pour la version russe.
L'information contrôlée en temps de guerre
Kiwix est un logiciel libre qui permet de télécharger des pages web entières et de les lire en hors connexion. L'objectif principal de l'association est de permettre aux régions possédant un pauvre internet voire pas du tout d'internet, d'avoir accès à des contenus importants et des savoirs partagés par des millions d'utilisateurs (Wikipédia, Project Gutenberg).
Depuis le début de la guerre en Ukraine, le nombre de visites venant de Russie sur le site a fortement augmenté aussi, avec 11 000 visites depuis le pays depuis le début du mois de mars, loin devant le deuxième pays en termes de visites : les États-Unis et les 4 693 visites. On s'aperçoit que beaucoup des visites russes proviennent de lieux inconnus, de nombreux Russes utilisant des VPN ou le navigateur Tor pour contourner les restrictions de l’État.
Wikipédia et son armée de contributeurs dans le monde ont toujours été une cible pour la propagande des États, qu'ils décident d'éditer eux-mêmes des pages ou qu'ils menacent de bloquer complètement l'accès à la plateforme. Il y a quelques jours, un contributeur biélorusse a été arrêté pour avoir, selon les autorités, « diffusé de fausses informations anti-russes ». Le site avait même été bloqué pendant 24 heures en Russie en 2015.
La Russie veut-elle vraiment se déconnecter du Web ?
Source : Slate