Moscou tape du poing sur la table et force Google, par le biais du régulateur local des communications, à déréférencer toutes les adresses pointant vers des VPN.
La situation se tend toujours plus entre Google et la Russie, qui se répondent quotidiennement ou presque par mesures interposées. Cette fois, Moscou fait intervenir le Roskomnadzor, régulateur tant redouté des communications et des nouvelles technologies, qui a demandé à Google de supprimer des milliers d'URL qui renvoient les utilisateurs vers d'éventuelles ressources VPN, qui permettent aux Russes d'accéder au contenu jugé « interdit » par le Kremlin.
Le Kremlin s'est doté de tout un arsenal législatif qui lui permet de strictement contrôler l'activité des VPN en Russie
La guerre s'intensifie bien sur le territoire numérique, et Google, qui a déjà pris de multiples mesures contre la Russie pour protéger notamment les populations civiles ukrainiennes, en fait évidemment les frais. Au pays des Tsars, où la demande de VPN a fortement explosé depuis le début de l'invasion de l'Ukraine, la réglementation en la matière est déjà très importante.
Depuis 2017, une loi permet à l'État de réprimer tout ce qui est VPN, Tor, proxys et autres outils offrant une certaine anonymisation à ses régulateurs, pouvant être bloqués tout à fait légalement dans le pays. Seuls les services de ce type offrant au Kremlin un total accès aux données des serveurs étaient autorisés à rester et à maintenir une activité dans le pays. Le réseau Tor, qui offrait malgré cela un accès à des ressources interdites d'accès, fut ainsi bloqué définitivement en décembre dernier.
Ce passif historique, le contexte russo-ukrainien et la nouvelle loi contre la désinformation, pouvant aboutir à de lourdes peines de prison, ont contribué à booster la popularité des VPN ces deux dernières semaines en Russie. Le régulateur local utilise son arsenal juridique pour faire pression sur Google, et le forcer ainsi à déréférencer tous les nouveaux liens pointant vers des VPN ou des sites relais.
Des milliers d'URL supprimées quotidiennement depuis plusieurs semaines
La Russie veut donc désindexer toutes les adresses qui, de près ou de loin, peuvent aider les citoyens russes à accéder à des ressources qui ne sont pas contrôlées par le Kremlin. Ce à quoi Google ne peut pas s'opposer, puisque la demande du pouvoir est conforme à cet arsenal législatif dont nous parlions. Au cours des deux dernières années, le Roskomnadzor a fait supprimer par Google plus d'un demi-million de liens de son moteur de recherche. Depuis le mois de janvier, lorsque la Russie a commencé à rassembler ses dizaines de milliers de soldats aux frontières de l'Ukraine voisine, l'attaque de Moscou contre les VPN avait gagné en intensité.
TorrentFreak nous explique que le 22 février, soit deux jours avant l'invasion de l'Ukraine, Google a reçu l'ordre de supprimer 746 URL liées à des VPN. La veille, ce fut 1 300 de plus, puis 1 813 le lendemain de l'invasion. Et depuis, le rythme ne faiblit pas. Le record date même du 5 mars 2022, avec 5 540 URL ciblées dans un seul et même avis. Hier, mardi 8 mars, Google a reçu un avis lui demandant de supprimer 2 170 nouvelles adresses.
Pour l'heure, on ne connaît pas l'identité des services ciblés par le régulateur russe, la loi interdisant à Google de révéler cette information. Ce qui est certain, c'est que le but de Moscou est de bloquer tout lien pouvant donner accès à une ressource, par exemple médiatique, qu'elle soit russe ou étrangère, qui puisse donner des informations qui n'ont pas été approuvées par les autorités, considérées comme de « fausses informations ».
Source : TorrentFreak