EasyRecrue, ou le retour du CV vidéo. Mais cette fois, ça marche. Plusieurs start-up ont investi ce crédo en France : InterviewApp, CV-vidéo, Easy-CV et d'autres. Le plus souvent, le candidat s'enregistre et dépose son clip auprès des recruteurs. La démarche de Mickaël Cabrol va plus loin. L'entrepreneur, inspiré par le succès de l'américain HireVue (92 millions de dollars levés en tout) propose des pré-recrutements vidéo différés.
Les employeurs renseignent les questions qu'ils souhaitent poser aux candidats dans le logiciel EasyRecrue (disponible dans un navigateur Web). Les personnes intéressées y répondent en vidéo. Pour s'assurer que la vidéo sera de qualité suffisante, l'outil pose un certain nombre de questions avant le début du tournage.
« L'avantage est que la vidéo est enregistrée, ce qui veut dire que le recruteur peut la visionner plus tard. D'ailleurs, plusieurs personnes peuvent la consulter », souligne le fondateur et PDG, qui a levé 2,5 millions d'euros en mars 2015 auprès d'Elaia Partners et de Bpifrance, après avoir déjà obtenu 500 000 euros un an plus tôt. Autre atout : « D'ordinaire, les RH doivent convenir d'un rendez-vous téléphonique pour pré-sélectionner un candidat, ce qui les rend plus sélectifs. Avec la vidéo, ils consultent davantage de profils. »
Progressivement, EasyRecrue entend dématérialiser tout le processus de recrutement - Crédit : EasyRecrue.
Un développement rapide
Pour aller plus loin dans le processus de recrutement, la plateforme s'est équipée récemment d'un module d'évaluation des capacités linguistiques. Le recruteur ne s'occupe de rien. La vidéo est en effet envoyée à un partenaire (Teluq), qui se charge de l'analyser et de transmettre les résultats à l'entreprise. Mais pour quel résultat ? Mickaël Cabrol affirme que l'outil divise par deux le temps consacré à la phase de présélection.En deux ans d'existence, EasyRecrue a séduit 160 clients, dont une majorité de grands groupes : Auchan, Total, Dassault, Safran, Décathlon, Axa, Société Générale, Crédit Agricole, mais aussi de grands médias, des cabinets de recrutement et même Pôle emploi. Autant de recruteurs qui sont facturés à la licence par utilisateur (1 000 euros pour cinq). Le budget moyen des clients varie de 800 à 15 000 euros par mois.
De quoi doper le chiffre d'affaires. Il atteindra pour la première fois le million d'euros cette année, et « 30 millions dans cinq ans », espère l'entrepreneur, confiant. « Environ 70 % des entreprises sont prêtes à recruter sans rencontrer le candidat », assure Mickaël Cabrol. « Il y a 15 ans, on envoyait des CV papier et on consultait les offres d'emploi dans la presse. Puis il y a eu LinkedIn. La prochaine étape est la vidéo. »
Vers de l'analyse automatisée
Lorsqu'on lui demande si ce modus operandi n'est pas discriminant pour les personnes mal à l'aise avec la prise de parole face caméra, l'entrepreneur répond que sa plateforme dispense des conseils. Et que la phase de la présélection se limite à des questions factuelles, plus faciles, portant sur le parcours ou les prétentions salariales. Du reste, EasyRecrue serait utilisé pour recruter tous les types de profils : employés, cadres, etc.Pour continuer d'attirer de nouveaux candidats, l'outil vient de sortir en version mobile, afin de « se filmer directement avec son smartphone ». Pour les recruteurs, la solution analysera bientôt - automatiquement - les phrases des prétendants et leur attitude, afin de les épauler dans leur travail. À la clé, avec cet algorithme, un nouveau gain de temps. Mais au prix, peut-être, d'une déshumanisation du processus de recrutement.
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