La firme de Shenzhen ne sera pas complètement rayée de l'Hexagone, même si l'ANSSI incite les opérateurs à ne pas collaborer avec elle.
Quelques jours avant le confinement, nous apprenions que l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) avait finalement décidé d'autoriser partiellement les équipements Huawei en France, sans que cela ne soit officiellement confirmé. Ce lundi 6 juillet, le directeur général de l'autorité, Guillaume Poupard, annonce dans le quotidien Les Echos que le bannissement ne sera effectivement pas total. Voyons ce que tout cela signifie.
Les opérateurs télécoms incités à ne pas travailler avec Huawei sur la 5G
Huawei va-t-elle pouvoir pleinement exercer son rôle d'équipementier 5G en France ? Pas vraiment, non. Les contraintes que la firme de Shenzhen doit affronter dans le pays sont mêmes plutôt pesantes. Car si « il n'y aura pas un bannissement total » de l'équipementier, « il y aura des refus », affirme Guillaume Poupard, qui ne concerneront ni Ericsson, ni Nokia, les deux fournisseurs européens notamment privilégiés par Orange et Free.
Le directeur général de l'ANSSI précise davantage son propos au fil de l'interview. « Les opérateurs qui n'utilisent pas Huawei, nous les incitons à ne pas y aller car c'est un peu le sens naturel des choses. Pour ceux qui l'utilisent déjà, nous délivrons des autorisations dont la durée varie entre trois et huit ans », indique-t-il.
Concrètement, la limite de l'autorisation d'exploitation est censée agir comme un bouclier contre l'installation d'équipements Huawei. Rappelons d'ailleurs qu'au regard de la « loi Huawei », adoptée à l'été 2019 et qui imposait cette autorisation valable pour une durée maximale de huit ans, seules les parties « non sensibles » du réseau devraient être accessibles à l'entreprise chinoise.
« Pas de Huawei bashing », soutient l'ANSSI
Huawei paie-t-elle pour ses relations distendues avec les États-Unis et la pression exercée par l'administration Trump pour bannir purement et simplement l'entreprise des réseaux 5G des puissances occidentales ? Guillaume Poupard préfère insister sur le risque que représente la technologie chinoise. « Nous ne sommes pas dans du Huawei bashing, ni dans du racisme anti-chinois », se justifie-t-il. « Nous disons juste que le risque n'est pas le même avec des équipementiers européens, qu'avec des non-européens. Il ne faut pas se mentir ».
D'une autre façon, on comprend donc qu'aux yeux de l'ANSSI et de la France, les équipements estampillés Huawei représentent un danger pour le pays. Les cœurs de réseau 5G ne devraient pas bénéficier d'autorisation d'exploitation par Huawei. Les antennes, moins soumises au risque, oui.
Pour pouvoir utiliser des technologies Huawei sur leur réseau 5G, les opérateurs télécoms (Bouygues Telecom et SFR, les deux à posséder des équipements Huawei et les deux à souhaiter travailler avec l'entreprise) devaient déposer des requêtes d'autorisation officielles. À leur sujet, Guillaume Poupard indique que dès les prochains jours, les « opérateurs qui n'auraient pas reçu de réponse peuvent considérer que c'est un refus, conformément à ce que prévoit la loi ».
La position de l'ANSSI (et de l'État, bien présent dans les directives) tend à ménager la chèvre et le chou, à savoir la volonté de préserver la sécurité des réseaux et celle de ne pas étouffer les opérateurs. Reste à savoir quelle sera la réaction de Bouygues Telecom, qui affirmait il y a un mois devant le Sénat les dangers d'une décision qui évincerait Huawei.
Source : Les Echos