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Et si l'on pouvait anticiper les épidémies comme on prévoit la météo ? C'est l'idée qu'avance Microsoft dans un communiqué, annonçant un système baptisé Premonition.

Celui-ci devra « prédire la distribution et l’évolution des microbes, des virus et des animaux porteurs de maladies dans le biome terrestre et la vie qui nous entoure ».

Des prévisions « plus que jamais nécessaires »

Le géant de l'informatique souhaite reprendre le principe des systèmes actuellement utilisés pour les prévisions météorologiques. Celles-ci s'appuient sur des stations disposées un peu partout sur la planète et sur des supercalculateurs capables d'en tirer des informations utiles et compréhensibles.

Microsoft souhaite donc mettre en place un nouveau réseau de capteurs, mais cette fois capable de prédire le risque d'épidémie. Selon elle, ces types de réseaux sont « plus que jamais nécessaires pour protéger notre santé et la santé de nos économies et de nos sociétés ».

Le fonctionnement de Premonition

Microsoft détaille sur son blog le fonctionnement de son système de prédiction, qui repose sur la surveillance d'arthropodes, et en particulier des moustiques. Ceux-ci véhiculent un grand nombre de maladies, comme le paludisme, la dengue ou le virus Zika.

Bien qu'ils ne fassent que transporter les agents infectieux, les virus seraient ainsi responsables de plus 600 millions de maladies humaines chaque année. Microsoft déclare « qu'ils se nourrissent également de nombreuses espèces d’animaux et rencontrent d’autres agents pathogènes qu’ils ne transmettent pas ». Entre 60% et 75% des maladies infectieuses émergentes auraient ainsi pour origine un passage de l'animal à l'homme, la Covid-19 n'étant qu'un exemple.

Microsoft a donc développé des « pièges robotiques intelligents », des appareils capables de piéger, mais également d'identifier et de caractériser en quelques millisecondes les espèces de moustiques qui les survolent. Ils doivent ainsi fournir des données en temps réel, permettant ensuite de réaliser une « carte météorologique » du biome, selon les termes de Microsoft.

Cette carte sera réalisée en utilisant la puissance de calcul d'un Cloud spécifique et dépendant de Microsoft Azure. Baptisée Microsoft Premonition Cloud, il doit être rendu disponible dans les prochaines semaines.

Pour anticiper les épidémies, Microsoft travaille également sur un autre axe, celui des génomes. L'équipe analyse ceux des moustiques capturés à la recherche d'éventuels agents infectieux, repérant ainsi le signal avant-coureur d'une épidémie. À l'heure actuelle, Premonition aurait déjà analysé plus de 80 trillions de paires de bases de matériel génomique.

Pour Ethan Jackson, le directeur principal de Microsoft Premonition, « ces signaux pourraient nous aider à détecter les menaces potentielles plus tôt, à réagir plus rapidement et à développer de nouvelles interventions avant que les flambées ne se produisent ».

Un projet né après Ebola

Au-delà des maladies, le réseau permettrait d'anticiper l'arrivée de nouvelles populations de moustiques dans une région. Douglas Norris, entomologiste et professeur de microbiologie moléculaire et d’immunologie à l’Université Johns Hopkins, se dit enthousiaste, déclarant : « Imaginez si vous aviez un système de prévision qui montre que de nombreux moustiques vont arriver dans quelques jours, en se basant sur toutes ces données. Vous pourriez alors vous protéger et les vaporiser avant qu'ils ne piquent, évitant de grosses proliférations de moustiques qui pourraient ensuite entraîner la transmission de maladies ».

Selon l'expert, c'est là une approche « plus saine pour les humains et pour l'environnement ». Mais elle est également plus intéressante sur le plan économique, la crise de la Covid-19 ayant souligné les limites budgétaires des départements de santé publique du monde entier.

Le projet de Microsoft n'est toutefois pas né avec la pandémie du nouveau coronavirus. L'enseigne a commencé à y réfléchir en 2014, suite à l'épidémie d'Ebola, et a débuté ses essais en 2016, suite à l'épidémie du virus Zika. À l'époque, une dizaine de robots avait été déployée, celle-ci devant aider à déterminer la localisation des moustiques vecteurs de maladie.

Aujourd'hui, le projet développé dans le comté de Harris, au Texas, a mûri. Pour Ethan Jackson, la prochaine étape consiste à être en mesure de prévoir « où et quand la prochaine menace pourrait émerger, non pas dans les 24 heures, mais disons, dans un mois. Et pour ce faire, nous refactoriserons, repenserons les modèles épidémiologiques ».