Le 14 décembre, Alcatel-Lucent obtenait un prêt de 1,6 milliard d'euros consenti par les banques Goldman Sachs et Credit Suisse. Une manne bienvenue qui permettra à l'équipementier télécoms en difficultés de continuer sa réorganisation. Mais dont les contreparties sont lourdes : s'il ne parvient pas à rembourser son emprunt, le groupe franco-américain, selon les termes du contrat, devra céder un portefeuille de tout de même 29 000 brevets de propriété intellectuelle aux deux banques.
Lors d'une audition à l'Assemblée nationale, mercredi, le vice-président exécutif d'Alcatel-Lucent, Philippe Keryer, a tenu à rassurer : « Si les facilités de crédits que nous avons eues sont garanties sur un certain nombre d'actifs du groupe, je tiens à préciser haut et fort qu'il n'est nullement dans notre intention de céder telle ou telle partie nantie, en particulier les brevets, puisqu'ils sont clairement l'avenir du groupe. »
C'est que cette histoire d'hypothèque de brevets inquiète jusqu'au gouvernement : lundi, le journal Les Échos rapportait que Bercy s'alarmait et craignait qu'Alcatel-Lucent finisse par perdre un tel portefeuille de licences, évalué à 5 milliards d'euros. Ils tomberaient notamment entre les mains de la réputée peu scrupuleuse banque new-yorkaise. Selon le quotidien, le ministère des Finances étudierait deux autres pistes de financements, afin d'éviter que le groupe n'ait à tirer sur ces lignes de crédits.
Bercy propose deux pistes alternatives
La première piste consisterait à faciliter la cession de nouveaux actifs dans les câbles sous-marins ou les télécommunications d'entreprise. D'après Les Échos toujours, France Télécom, qui exploite déjà une flotte de navires câbliers, pourrait racheter ceux d'Alcatel-Lucent, compétents en la matière. Cette opération rapporterait entre 100 à 150 millions d'euros à la société franco-américaine, mais ne résoudrait pas le problème : Alcatel-Lucent consomme quelque 700 millions d'euros de cash par an.
L'autre piste évoquée serait la mise en place d'un « consortium de valorisation des brevets » réunissant des industriels américains. Cela permettrait à l'équipementier télécoms de toucher des droits de propriété intellectuelle tout en restant copropriétaire de ses brevets.
Si aucune solution n'est trouvée d'ici janvier, Alcatel-Lucent terminera d'actionner le levier du crédit auprès des deux banques, et hypothéquera bel et bien ses actifs. Consenti dans l'urgence, ce prêt a été choisi, justifie le numéro deux du groupe, car il « fallait apporter à nos clients des certitudes pour qu'ils continuent à s'engager avec nous sur des projets à moyen et long terme ».