Dell et la consumérisation : "les idées viennent du grand public, l'argent des entreprises"

Romain Heuillard
Publié le 11 juillet 2012 à 17h14
Il s'est fait connaitre avec son modèle de vente directe de postes de travail, mais Dell est en pleine mutation. Alors qu'il réalise 80 % de son chiffre d'affaires sur le marché des entreprises, ce dernier est plus que jamais influencé par le marché grand public, qu'il a en partie délaissé.

Si le marché de l'informatique est longtemps resté régi par la dynamique industrielle du WinTel, c'est-à-dire par l'évolution parallèle des architectures d'Intel et des systèmes d'exploitation Windows, renouvelés tous les trois ans, la démocratisation de l'informatique auprès du grand public a accéléré le rythme de l'innovation et conduit tout le marché à s'adapter.

Sergej Miric, directeur de l'end-user computing (autrement dit du poste de travail) de Dell France, nous explique comment Dell embrasse la consumérisation de l'informatique.

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Le flux de l'innovation s'est inversé. Comment le grand public a-t-il pu tant influencer le marché de l'entreprise ?

Depuis environ deux ans on assiste à un phénomène de consumérisation de l'informatique. C'est désormais le grand public qui conduit l'innovation. Des usages grand public tels que les réseaux sociaux sont entrés dans l'entreprise. Des technologies issues du grand public, tels que les SSD MLC plutôt que SLC, aussi. Et enfin des appareils grand public, tels que les iPhone, iPad, smartphones et tablettes Android, ont mené à la tendance du BYOD (bring your own device), qui consiste à ce que les salariés travaillent avec leur propre matériel.

Or si les idées viennent du grand public, l'argent vient quant à lui des entreprises.

Comment Dell s'adapte-t-il à ces tendances ?

Dorénavant il faut faire cohabiter et permettre l'accès aux applicatifs métiers à trois environnements différents en entreprise : Windows, iOS et Android.

Il existe trois solutions pour y parvenir. La première c'est de développer des applications natives pour chacun des environnements, mais Android et iOS se destinent au grand public et ne garantissent pas la compatibilité des applications d'une mise à jour à l'autre. La seconde c'est de développer des applications HTML5, mais la norme n'est pas encore finalisée et JavaScript ne fait pas encore l'unanimité.

Dell en préconise donc une troisième : la virtualisation des environnements, qui consiste à décorréler le matériel et l'OS des applications. Le modèle VDI (Virtual Desktop Infrastructure) est la seule solution permettant d'offrir rapidement un accès aux applications Windows existantes depuis un iPad par exemple. Il permet de préserver les investissements tout en s'adaptant aux nouveaux usages.

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Il faut dire que c'est la seule qui sert les intérêts de Dell, alors qu'il subsiste de nombreux freins à l'adoption de la virtualisation...

C'est vrai que la virtualisation n'a pas encore décollé. On s'est rendu compte que certains usages qui nous paraissaient anodins, comme l'utilisation d'un tableur, posait problème.

Pour ce qui est du coût, au travers de rachats tels que celui dans la déduplication de données, on est passé de 40 à 60 ou 80 utilisateurs par serveur, et de 1000 à 500 dollars par utilisateur (incluant le serveur, le stockage, les licences et la mise en service).

Pour le confort d'utilisation de l'interface utilisateur et pour l'utilisation hors connexion, Citrix et VMWare ont fait beaucoup de progrès en rachetant récemment des éditeurs de solutions et en optimisant considérablement la compression du flux.

Si une entreprise faisait une étude de marché en interne, elle trouverait très peu de salariés éligibles au VDI. Mais quand on leur met à disposition des bureaux virtualisés, utilisables de n'importe où, les utilisateurs s'adaptent aux nouveaux usages, comme ils se sont adaptés à l'iPad. C'est la technologie qui conduit les usages.

Quid des entreprises ? Toutes ne maitrisent pas ces technologies.

Avec nos rachats nous sommes présents de bout en bout. Dell peut ainsi fournir à ses clients des appliances clés-en-main, avec l'offre « VDI-in-a-box ». Nous ne sommes pas des magiciens, nous n'avons recours qu'à des technologies qui existaient déjà, mais nous les mettons à disposition très simplement, en masquant la complexité des multiples briques.

Enfin, en embrassant la virtualisation et en ne vendant plus qu'un serveur pour 80 utilisateurs et autant de clients légers, est-ce que vous n'êtes pas en train de vous tirer une balle dans le pied ?

Dell a déjà abandonné la course à la part de marché au profit de la course à la marge et à la valeur il y a deux ans. Nous ne sommes plus intéressés par la commercialisation de postes à 300 euros. Sur le marché des postes de travail, Dell met désormais l'emphase sur le haut de gamme, sur les gammes Alienware et XPS notamment.

Et alors que le marché du poste de travail stagne en Europe de l'Ouest, Wyse, l'éditeur et fabricant de clients légers que nous avons racheté fait 20 à 30 % de croissance.

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Romain Heuillard
Par Romain Heuillard

C'est vers l'âge de 12 ans, lorsque j'ai reçu mon premier ordinateur (un Pentium 100), que j'ai décidé d'abandonner ma prometteuse carrière de constructeur de Lego pour me consacrer pleinement à ma nouvelle passion pour l'informatique. Depuis je me suis aussi passionné pour l'imagerie en général et pour la photo en particulier, mais je reste fan de sujets aussi obscurs que les procédés de fabrication de composants électroniques ou les microarchitectures de processeurs, que l'infiniment grand et l'infiniment petit. Je suis enfin foncièrement anti-DRM et pro-standards ouverts.

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