© Sénat
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Les sénateurs ont adopté, ce mardi 2 novembre, la proposition de loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, qui étend la très contestée redevance copie privée au secteur du reconditionné.

Ce mardi 2 novembre, le Sénat a définitivement entériné l'extension de la redevance copie privée aux produits reconditionnés, qui s'appliquera notamment aux tablettes, smartphones et autres supports dotés d'une capacité de stockage supérieure à 135 Mo. Un coup dur porté à la filière, alors que les plateformes et autres revendeurs sont dispensés de cette « taxe », dont la logique est fortement remise en question.

La redevance copie privée, un boulet au pied des acteurs du reconditionné ?

Le 1er juin 2021, la Commission de la copie privée a voté son nouveau barème applicable depuis le 1er juillet en étendant celui-ci aux tablettes et smartphones reconditionnés, alors que ces mêmes produits sont déjà frappés une première fois par la redevance copie privée lors de leur achat neuf. Ce barème, désormais sacralisé par la loi votée par le parlement, oblige notamment les reconditionneurs à payer une redevance grimpant jusqu'à 7,20 euros pour un mobile dont la capacité de stockage est inférieure à 64 Go, et de 8,40 euros pour un téléphone portable dont la capacité de stockage est supérieure à 64 Go.

En 2020, la redevance copie privée a généré 273 millions d'euros (dont 70% proviennent des smartphones neufs). Ce montant est insuffisant aux yeux de l'industrie de la musique, des ayants-droits et du gouvernement, à la recherche de ressources supplémentaires.

Ce sont les reconditionneurs français qui vont devoir appliquer ce barème et en supporter le coût. Les revendeurs et les plateformes de revente de smartphones reconditionnés, comme la licorne BackMarket, n'ont pas à verser cette redevance et pourront davantage faire jouer la concurrence avec des reconditionneurs étrangers qui, eux, feront en sorte de ne pas passer à la caisse.

© blickpixel / Pixabay
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Une loi critiquée pour son manque de logique

Pour YesYes, un reconditionneur français basé à Caen, cette loi votée par les parlementaires ne passe pas. « Le gros acteur acteur, celui qui est peu l'image du reconditionné en France, BackMarket, n'est pas concerné. Ceux qui vont être concernés, les reconditionneurs français, sont ceux qui peinent déjà aujourd'hui, car les marges sont relativement faibles », explique David Mignot, fondateur de la startup (et ex-directeur général de Sony Mobile France).

L'ajout d'une telle redevance aux produits reconditionnés, censés favoriser l'économie circulaire et l'augmentation de la durée de vie des appareils, semble contreproductif. « La musique est aujourd'hui majoritairement consommée via le streaming, cela n'a pas de sens au regard de la redevance copie privée. Nous ne sommes plus à l'époque du MP3 », déplore David Mignot. « Je ne comprends pas par quel miracle cette redevance copie privée a pu être étendue au secteur du reconditionné, alors même que, par les usages, elle n'est même pas logique dans son application aux produits neufs ».

Pour la faire courte, un même produit peut désormais être frappé au moins deux fois par la même redevance copie privée, s'il passe par l'étape du reconditionnement. « Et même trois ou quatre fois, nous avons déjà repris des produits qui avaient déjà été reconditionnés une première fois ».

La filière française défavorisée face aux acteurs étrangers ?

Comment les acteurs français du reconditionné vont-ils s'adapter à l'application de cette loi ? David Mignot semble perplexe. « Nous allons devoir déclarer, tous les mois auprès de Copie France, ce que nous avons vendu comme téléphones, avec quel stockage, ce qui représente un vrai travail administratif en plus. Et dans tout cela, il ne faut pas oublier que les marges restent courtes »?

Pour maintenir sa compétitivité, la filière française du reconditionné (qui compte une vingtaine d'entreprises) n'aura guère d'autre choix que d'absorber les effets de la loi. « Beaucoup de personnes confondent les deux, mais BackMarket est un distributeur et non un reconditionneur », rappelle David Mignot. « La logique économique veut que pour revendre un produit, les distributeurs sélectionneront le vendeur qui propose le produit et le prix les plus intéressants. La redevance privée, qui va donc peser sur ces vendeurs, va créer un déséquilibre à l'avantage des reconditionneurs étrangers, qui ne sont pas soumis à cette taxe ».

Les entreprises spécialisées dans le reconditionnement vont donc devoir trouver le bon équilibre pour maintenir un modèle vertueux aux propriétés écoresponsables. « Tout sauf une bonne nouvelle pour la filière », d'aorès David Mignot.

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La loi votée : entre avancées concrètes et regrets

Le vote de la loi, ce mardi 2 novembre, vient conclure une procédure accélérée engagée au mois de janvier par le Sénat, qui avait une première fois transmis le texte du sénateur Les Républicains de l'Ain, Patrick Chaize, à l'Assemblée nationale. Certaines mesures phares de l'esprit initial de la loi ont survécu à la navette parlementaire. On peut évoquer par exemple l'enseignement d'une formation de sensibilisation à l'impact environnemental des outils numériques à destination des élèves et étudiants, ou encore la création d'un observatoire des impacts environnementaux du numérique. On pense aussi au renforcement du délit de l'obsolescence programmée, destiné à allonger la durée de vie des appareils, ou au verdissement des centres de données.

Outre la suppression de l'exemption à la redevance copie privée du secteur du reconditionné (imposant de fait une taxe contreproductive au secteur), la loi initiale a aussi été amputée de la proposition d'allongement à 5 ans de la garantie légale de conformité, aujourd'hui fixée à 2 ans. Les sénateurs ont ainsi voté une loi présentant un "goût d'inachevé", de leurs propres mots.