Les discussions autour de la loi sur la réduction de l'empreinte environnementale du numérique font craindre la possibilité d'une extension de la redevance copie privée aux produits électriques reconditionnés.
L'actualité était ailleurs ces derniers mois, mais les partisans et le secteur du reconditionnement n'ont pas oublié qu'au Parlement se joue peut-être une partie de l'avenir de la filière. La proposition de loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, adoptée à la quasi-unanimité par le Sénat au début de l'année, est aujourd'hui discutée en commission des affaires économiques. D'ici la fin du mois, des débats débuteront à l'Assemblée nationale, entre députés. Beaucoup redoutent que le gouvernement pousse un amendement qui viendrait frapper les produits reconditionnés de la redevance copie privée.
Un terrain miné, pour satisfaire à la fois l'industrie du reconditionnement et les artistes
Les députés vont avoir une délicate mission. Ils devront trouver le bon compromis et satisfaire aussi bien les industriels du reconditionnement, qui veulent protéger leur secteur, et le ministère de la Culture, qui est à la recherche de nouvelles sources de revenus pour soutenir les artistes, en souffrance avec l'émergence du numérique et l'arrêt des spectacles.
Pour rappel, la redevance copie privée, en vigueur en France depuis 1985, permet aux Français de faire des copies de contenus dits « culturels », mais seulement pour son usage personnel.
Ainsi, pour tout achat d'un appareil ayant une capacité de stockage, comme un smartphone, une tablette, un disque dur externe ou encore une clé USB, chaque consommateur verse de facto une petite part du prix aux différents auteurs, artistes, interprètes, compositeurs, producteurs ou éditeurs. En début d'année, nous vous avions donné l'exemple de l'iPhone 11 en version 256 Go, pour lequel 1,43 % du prix était reversé au titre de la redevance copie privée.
Taxer le reconditionné pourrait être contre-productif par rapport à l'esprit de la loi sur l'empreinte environnementale du numérique
Tout le problème que vont devoir démêler les députés réside dans la qualification juridique d'un produit électronique reconditionné, pour déterminer si la redevance copie privée doit s'appliquer, et si amendement en ce sens il doit y avoir ou non.
Doit-on considérer un produit électronique reconditionné comme un produit neuf, ou un produit d'occasion ? La réponse à cette question sera peut-être donnée par les députés.
Quoi qu'il en soit, en l'état actuel des choses, appliquer la redevance copie privée aux produits électroniques reconditionnés reviendrait à taxer deux fois un même produit avec une même taxe. Car tout produit neuf considéré comme ayant une capacité de stockage tombe dès l'origine sous le coup de la redevance copie privée.
L'application de la redevance copie privée sur l'achat d'un produit reconditionné pourrait mécaniquement contribuer à une augmentation des prix sur ce secteur. Et donc à un resserrement tarifaire entre le marché du reconditionné et le marché du neuf. Une démarche qui n'aiderait pas à favoriser la bonne marche de l'économie circulaire ni la réduction de l'empreinte environnementale du numérique.