En marge de sa conférence pour un Internet de confiance, l'UNESCO a appelé à réguler une bonne fois pour toutes les plateformes numériques pour contrer la hausse de la haine en ligne et de la désinformation.
Ces trois derniers jours avait lieu à Paris la conférence de l'UNESCO « Pour un Internet de confiance ». À cette occasion, l'organe de l'ONU en faveur de l'éducation, de la science et de la culture a pu envisager des solutions de régulation face à la crise de l'information en ligne. Cette conférence mondiale, la première sur le sujet d'ailleurs, a accouché des premiers principes mondiaux de régulation des réseaux sociaux. L'objectif est affiché : promouvoir les droits humains en ligne et améliorer la fiabilité des informations.
Réguler, parce que « les mensonges se répandent plus vite que les faits »
Gouvernements, universités, entreprises du numérique, régulateurs indépendants ou société civile. Tous étaient réunis pour prendre la mesure de l'évolution technologique et des dérives qui sévissent en ligne, dans une société fragilisée par les crises climatique, humanitaire, sanitaire et géopolitique.
« Les mensonges se répandent plus vite que les faits. Pour une raison ou une autre, les faits sont vraiment ennuyeux. Les mensonges, surtout lorsqu'ils sont empreints de peur, de colère, de haine, de tribalisme – "nous" contre "eux – se répandent. Ils mettent le feu aux poudres », a résumé la journaliste Maria Ressa, lauréate du prix Nobel de la paix 2021, dans un discours plein de lucidité.
Selon elle, si nous continuons de tolérer tels qu'ils sont les algorithmes des réseaux sociaux, demain, la vérité aura perdu toute sa valeur ou presque. « Sans faits, il n'y a pas de vérité, sans vérité, il n'y a pas de confiance, et nous n'avons pas de réalité partagée », a-t-elle prévenu.
Intervenant durant la conférence, le président récemment élu du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, a fait un parallèle avec les attaques menées, avec violence, contre les institutions démocratiques auriverdes, le 8 janvier dernier. Celles-ci faisaient suite à une large campagne de désinformation. « Dans une large mesure, cette campagne a été nourrie, organisée et diffusée par le biais de plateformes numériques et d’applications de messagerie. La même méthode a été utilisée pour générer des actes de violence ailleurs dans le monde. Cela doit cesser », a-t-il appelé.
Pousser les pays et les acteurs du numérique du monde entier à faire barrage aux contenus néfastes pour leurs utilisateurs
La directrice générale de l'UNESCO, Audrey Azoulay, un temps pressentie pour succéder à Jean Castex à Matignon, a salué les efforts en la matière menés dans au moins 55 pays. Néanmoins, elle milite pour une approche cohérente qui serait planétaire, considérant que, menées de manière isolée, les initiatives de régulation « sont vouées à l'échec ».
Également présente à Paris, la Première ministre de l'Islande, Katrin Jakobsdottir, a loué « l'importance considérable » des discussions et des échanges de la semaine, ajoutant qu'il est « essentiel de définir un ensemble de principes communs sur la régulation de cet espace numérique ». Le youtubeur brésilien-portugais aux 45 millions d'abonnés Felipe Neto a dénoncé la poussée algorithmique des contenus extrémistes sur les plateformes. L'influenceur veut sensibiliser les grands acteurs du numérique.
« Il s’agit de rendre des comptes, de mettre fin à l'impunité, de les amener à la table et de dire "vous devez être responsables des erreurs que vous avez commises et que vous allez commettre" », a-t-il déclaré, assez ferme. De quoi laisser la patronne de l'UNESCO conclure en appelant tous les pays à se joindre aux efforts de l'organisation. Son objectif est de faire d'Internet un outil au service du public, qui puisse garantir le droit à la liberté d'expression, et le droit de rechercher et de recevoir des informations.