© Copyright
© Copyright

Le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a fait comprendre, mardi, que l'initiative toucherait autant aux données personnelles qu'à l'espionnage entre États.

La Chine a annoncé, mardi 8 septembre, avoir lancé ce qu'elle appelle une « initiative » visant à bâtir des normes mondiales portant sur la sécurité des données. Depuis Pékin, le ministre des Affaires étrangères a dévoilé les contours d'un plan en huit points qui se destine, notamment, à contrer la politique américaine orientée autour du bannissement des technologies et des services de l'empire du Milieu. Wang Yi est allé jusqu'à préciser que l'initiative inviterait les entreprises (chinoises y compris) à ne pas installer de backdoor sur leurs produits ou équipements pour obtenir des données.

Pékin veut faire régner la paix, la sécurité et la coopération sur le cyberespace

Avec son « initiative mondiale sur la sécurité des données », la Chine veut prouver aux États-Unis et au reste du monde qu'elle est tout à fait capable de procéder à une régulation des données et de leur circulation. Pékin aurait même sollicité des gouvernements étrangers pour qu'ils apportent leur soutien à cette initiative. Wang Yi évoque « des règles mondiales de sécurité des données qui reflètent les souhaits de tous les pays et respectent les intérêts de toutes les parties » et qui seront établies sur la base « d'une participation universelle de toutes les parties ».

Le message du ministre chinois est on ne peut plus clair. Le plan doit mettre les points sur les i. « Certains pays individuels (comprenez, les USA en premier lieu, ndlr.) poursuivent de manière agressive l'unilatéralisme, jetant de l'eau sale sur d'autres pays sous le prétexte du "nettoyage" et menant des chasses mondiales contre les grandes sociétés d'autres pays, sous le prétexte de la sécurité. C'est de l'intimidation pure et simple, et cela doit être combattu et rejeté », a affirmé Wang Yi, qui intervenait dans le cadre d'un séminaire sur la gouvernance numérique mondiale à Pékin.

Officiellement, la Chine diffuse un appel à créer une communauté planétaire animé par le désir d'un avenir partagé dans le cyberespace, où régneraient la sécurité, la paix, la coopération, l'ouverture et l'ordre. « Les États ont la responsabilité et le droit d'assurer la sécurité des données et des informations personnelles importantes ayant une incidence sur leur sécurité nationale, leur sécurité publique, leur sécurité économique et leur stabilité sociale », a poursuivi le ministre.

La Chine veut protéger la souveraineté des données des États et s'opposer à la surveillance de masse entre États

En opposition à l'initiative américaine baptisée « Clean Network », dont nous parlions plus haut, la Chine articule sa stratégie et son plan autour de huit principes, parmi lesquels une gestion de la sécurité des données objective et fondée sur des preuves, matérialisée par le maintien d'une chaîne d'approvisionnement fiable de produits et services TIC mondiaux. Un autre principe doit consister, pour les États, à s'opposer à toute technologie, entreprise ou service qui altérerait ou volerait des données liées à des pans critiques d'autres États, menaçant ainsi leur sécurité nationale.

Sur le même ton, l'initiative soutient l'idée, et cela fait directement écho aux points soulevés par Donald Trump depuis de longs mois également pour justifier sa volonté d'écarter les technologies chinoises, de s'opposer à la surveillance de masse contre d'autres États mais aussi de s'opposer à la collecte illégitime de données personnelles d'autres États via certaines technologies, services ou équipements. Pékin souhaite aussi encourager les entreprises à respecter les lois et réglementations (comme le RGPD) de l'État où de la région où elles ont des activités. Dans le même temps, le plan propose de mettre fin à la rétention des données sur son propre territoire. Par exemple, Facebook ne pourrait plus stocker de données personnelles de ses utilisateurs français sur le sol américain. De même pour une entreprise comme Huawei, qui aurait l'obligation de stocker les données des citoyens européens en Europe. Et ainsi de suite.

Même son de cloche également pour l'acquisition de données personnelles dans le cadre d'une affaire criminelle : l'initiative milite pour que des accords multilatéraux ou bilatéraux soient passés, tout en préservant la souveraineté judiciaire et la sécurité des données des États.

Pour le moment, on ignore si des pays ont accepté d'adhérer à cette initiative, qui ferait presque office (et on l'écrit de façon à schématiser à l'extrême) d'« ONU de la donnée ». Mais le message a le mérite d'être lancé, et les diplomates chinois démarrent leur opération séduction.

Source : WSJ