En cette semaine particulière à plus d'un titre je vous propose un moment d'évasion aux limites de notre système solaire avec Ad Astra, une quête d'ailleurs qui va rapidement se transformer en quête de sens.
Nous nous donnons 5 citations et 5 paragraphes pour vous convaincre.
Ad Astra (2019)
De James Gray« J'ai toujours voulu être astronaute »
Je dois avouer que le projet Ad Astra ne m'a pas particulièrement passionné durant son développement et sa promotion. Avec son titre latin un brin pompeux et la présence d'un réalisateur labellisé « auteur » et habitué des festivals, je pensais assister à une aventure spatiale poseuse qui ne serait qu'un prétexte déguisé à donner un cours de philosophie ronflant sur l'Homme et de ses tourments intérieurs.Mais ça parle de quoi Ad Astra au juste ? Le film se déroule dans un futur proche où l'espace a été apprivoisé par l'Homme et où la Lune ou Mars ont été colonisées. On suit les pas de Roy McBride, un astronaute rodé qui doit contacter son père, Clifford McBride, en mission aux confins du système solaire depuis plusieurs années sur les traces d'une intelligence extraterrestre.
« Tous les espoirs que nous portions dans la recherche spatiale défigurés par des distributeurs de boisson et des marchands de t-shirts »
Même si Ad Astra dispose d'un budget conséquent, équivalent à un blockbuster hollywoodien moyen, le film ne sera pas un spectacle pétaradant mais le réalisateur utilise intelligemment ses moyens, ses décors et sa grammaire cinématographique pour en mettre plein la vue uniquement quand le scénario l'exige.L'introduction en est le parfait exemple, avec une mise en scène impeccable de maitrise. Ad Astra possède plusieurs moments mouvementés de course poursuite ou des scènes d'angoisse pure. On est tout simplement collés au siège, sous tension et aux côtés de Roy McBride, qui devra affronter de grandes épreuves pour atteindre son but.
Le son est aussi très travaillé, James Gray jouant des conventions en ajoutant des effets sur la Lune par exemple ; où il ne devrait pas y avoir de son, puisque pas d'air. Bref, ce n'est pas Star Wars mais cela reste une fiction, qui a ses propres codes.
Globalement le film est bien plus narratif que je ne l'attendais et développe un récit rythmé et sans temps morts. James Gray gère parfaitement un équilibre subtil entre film tous publics et accessible et récit introspectif.
« Je suis toujours en représentation mes yeux rivés sur la sortie »
Ad Astra donne également une vision du futur très particulière que l'on est pas habitués à voir. Bien souvent les films de science-fiction imaginent un futur radicalement différent de notre société contemporaine, à coups de designs farfelus et de technologies improbables.Ici, tout est une nouvelle fois affaire d'équilibre. Les fusées, combinaisons ou stations spatiales restent très proches de celles actuellement utilisées par les équipes de la NASA. Mais on peut apercevoir parfois un accessoire inédit comme un capteur analysant les émotions. Les humains ont peut-être colonisé Mars mais leurs habitats et modes de déplacement sont crédibles.
C'est une bonne idée de James Gray de ne pas avoir cherché l'originalité à tout prix. Son univers ne demande aucune mise en condition ou porte d'entrée, il existe à l'écran et j'ai pu ainsi rapidement me concentrer sur l'essentiel : Roy McBride et ses tourments intérieurs.
« Je ne sais pas si j'espère le retrouver ou le libérer enfin de lui »
Comme je vous le disais donc, l'aventure spatiale n'est qu'une très jolie toile de fond pour évoquer le vrai sujet du film : la paternité. Roy McBride, interprété brillamment par Brad Pitt, est un homme détaché, coupé de l'humanité depuis bien trop longtemps en quête d'un père qui lui manque et qu'il souhaite retrouver à tout prix.Les premières minutes du film insistent lourdement sur la thématique du père, mais le metteur en scène fait dériver son récit sur une question bien plus philosophique et qui traverse les générations depuis la nuit des temps : le "meurtre du père".
Roy McBride cherche bien plus à se confronter à son paternel et ne pas reproduire les mêmes erreurs, à ne pas prendre le même chemin. Peut-on sortir du chemin creusé par ses aïeuls? Pouvons-nous, au prix d'un sacrifice, se libérer de cette emprise et être libre de ses propres choix?
Ad Astra évoque toutes ces questions par une voix-off quasi permanente qui nous donne à comprendre la psychologie du personnage principal, ou par quelques plans très composés et lourds de sens. Si comme moi vous êtes plus sensibles à la façon dont l'on raconte une histoire qu'à l'histoire elle-même, le film vous passionnera par la qualité de sa mise en image.
« Je suis emporté de plus en plus loin du soleil, vers toi »
Si Roy cherche son père, le père cherche également son Père et l'on touche là à l'autre thématique qui est à mon sens moins explicite mais tout de même présente tout au long du film. Clifford McBride ne cherche pas à contacter des aliens; il recherche le sens de sa propre vie et un éventuel créateur. Comme pour son fils, la quête d'un ailleurs passe par une quête de sens.La relation à Dieu, ou en tout cas au spirituel, est régulièrement évoquée par quelques personnages priant ou citant des textes sacrés mais James Gray n'accentue pas la chose et se veut plus intelligent (ou moins prosélyte, c'est selon) en laissant chaque spectateur interpréter la chose à sa façon. C'est un aspect qui m'a peu intéressé dans le métrage mais qui a le mérite d'être traité à sa manière et peut-être y serez vous plus sensible.
Ad Astra est finalement bien plus que le simili 2001, Odyssée de l'Espace que je redoutais. Le film est plus à mettre dans la catégorie d'un Gravity, qui se sert de l'aspect forain du cinéma et propose de spectaculaires scènes spatiales pour aborder, sans assommer, des considérations bien plus terre-à-terre.
Le film ne répond pas forcément aux questions qu'il pose et laisse chaque spectateur devant sa propre analyse. C'est à vous désormais de réaliser votre propre voyage.
Ad Astra est disponible en DVD, Blu-Ray, Ultra HD et VOD chez 20th Century Fox.