Le Jeu de la Dame

Intense du premier au dernier épisode, passionnante, qu'on aime ou non les échecs, profonde pour les nombreux sujets quelle aborde, la série Le Jeu de la Dame (The Queen's Gambit) de Netflix est l'une des meilleures nouveautés de cette fin d'année 2020. Tout simplement.

Le veilleur d'écran[s] S04E11 📺 : Le Jeu de la Dame (The Queen's Gambit)

Dans un contexte où l'offre en matière de séries n'a jamais été aussi pléthorique, le Veilleur d'écran[s] se propose d'être votre guide à travers les saisons. Qu'il s'agisse d'une ancienne série aujourd'hui culte, d'un carton récent ou d'un show plus anonyme, cette chronique vous aidera à ne perdre votre temps qu'en bonne compagnie.

Accompagnez la lecture de cet article avec la musique de la série :

Le Jeu de la Dame : échec et mat en 7 coups

En dehors de quelques trop rares exceptions - parmi lesquelles l'incroyable Dispatches from Elsewhere, qui demeure ma nouvelle série préférée de 2020 -, les derniers mois ne m'auront pas vraiment convaincu en termes de nouveautés télévisuelles.

Certaines séries démontraient, certes, un réel potentiel sur le papier, voire durant leurs premiers épisodes (Snowpiercer, Raised by Wolves, Truth Seekers, Lovecraft Country…), pourtant leurs qualités indéniables et quelques sursauts d'intérêt par-ci par-là, n'ont pas suffit à ce que je ne m'y ennuie pas… Je n'ai même pas réussi à aller au bout de certaines d'entre elles (coucou, Avenue 5, Solar Opposites et surtout Space Force) !

Le Jeu de la Dame

Heureusement, une poignée de séries, dont je vous parlerai probablement plus tard, ont réussi à faire mouche. Et dans cette poignée, la plus efficace est celle qui nous intéresse aujourd'hui.

Il y a quelques semaines, Netflix venait en effet me sortir de ma torpeur télévisuelle avec Le Jeu de la Dame. Ou The Queen's Gambit, en VO.

Une histoire de génie, servie sur un plateau

Pour vous le dire tout à fait franchement, par delà sa thématique des échecs, j'ai commencé à regarder la série par curiosité face à l'engouement qu'elle a rapidement suscité. Et grand bien m'en a pris, car tous les éloges que j'ai pu entendre à son sujet son amplement mérités.

Alors, de quoi ça parle, Le Jeu de la Dame, vous demandez-vous fort justement après cette introduction à rallonge ?

Basée sur le roman de Walter Tevis, cette mini-série s'intéresse, durant 7 épisodes, à l'américaine Beth Harmon. Il est question de suivre sa vie, à partir des années 1950, de son enfance à sa vie de jeune femme, en passant par son adolescence.

Orpheline, l’héroïne incarnée par l'impeccable Anya Taylor-Joy (et la très convaincante Isla Johnston pour ses plus jeunes années), va très rapidement démontrer un talent inné pour les échecs, jusqu'à décider d'en faire sa carrière. Au cours de son ascension dans ce milieu très masculin, Beth Harmon fait tomber ses adversaires comme des mouches, en commençant par de petits tournois locaux pour finalement jouer dans des compétitions internationales dominées depuis des décennies par des Grands Maîtres.

La royale Anya Taylor-Joy est appelée araignée

Mais ce n'est assurément pas tout. Car si les échecs représentent logiquement une part importante des enjeux scénaristiques, le spot du show pose surtout sa lumière sur les nombreux problèmes rencontrés par Beth Harmon au-delà de ce jeu/sport, pour lequel elle fait office de véritable génie. Il est d'abord question de son enfance difficile, et d'expériences en orphelinat qui lui laisseront des séquelles aux nombreuses répercussions.

De difficultés relationnelles aussi, dues notamment à sa personnalité abîmée, à son caractère atypique, et une forme d'incapacité sociale, qui peut régulièrement s'apparenter à de la prétention. À ces caractéristiques se mêlent aussi des soucis d'argent, des addictions variées et cumulées au fil des années, ou encore la difficulté de s'imposer en tant que femme (surdouée, qui plus est) dans une époque et une discipline où il faisait déjà meilleur être un homme… Autant vous dire que les obstacles sur la route du succès - et tout simplement de son bien-être personnel - sont nombreux.

« Avec Le Jeu de la Dame j'ai été happé et pleinement investi de la première à la dernière seconde »

Comme le dit fort justement l'actrice principale elle-même : « The Queen's Gambit n'est pas vraiment à propos du jeu des échecs, c'est à propos du prix du génie ». Car si la maîtrise des échecs par Harmon lui apporte satisfaction, argent et renommée, il y a de nombreux revers à la médaille, que je vous laisserai pleinement découvrir par vous-même.

Mais revenons aux échecs si vous le voulez bien. Tout d'abord, je tiens à souligner qu'un véritable effort a été opéré par la production pour que les amateurs de cette activité ne s'arrachent pas les cheveux. Des consultants, comme l'ancien champion Garry Kasparov - rien que ça -, sont intervenus pour s'assurer que tout était réaliste et plausible.

Pas de panique pour les néophytes cela dit, il est tout à fait possible de profiter pleinement de la série sans rien connaitre aux échecs. Le show pourrait d'ailleurs bien créer des vocations, qui sait.

Une réalisation de fou et un rythme bien cavalier

Ensuite, si Le Jeu de la Dame est solide dans son propos, elle l'est tout autant par son luxueux enrobage. Entre ses décors d'époque grandioses et ses costumes sublimes, qui raviront les amateurs de mode, la réalisation intégralement assurée par le co-créateur du show Scott Frank (qui a déjà signé l'excellente série western Godless pour Netflix) est à se damner.

La mise en scène, la photo, les lumières : tout est divin, tant dans les plans les plus lents et posés, que dans les scènes plus rythmées et intenses lors des matchs d'échecs, tout aussi brillantes. Grâce à un savant sens du montage, un jeu d'acteurs impeccable et une remarquable bande-son, tout en piano, vents et cordes, signée Carlos Rafael Rivera (qui a lui aussi travaillé sur Godless), le moindre affrontement au dessus d'un plateau est un régal d'intensité, de tension et de suspens malgré l'aspect statique du jeu d'échecs.

C'est bien simple, avec Le Jeu de la Dame j'ai été happé et pleinement investi de la première à la dernière seconde. Il s'agit sans nul doute de l'une des meilleures séries originales de Netflix depuis un moment, et une de mes œuvres favorites de 2020. À tel point que j'en ai ressorti mon échiquier des placards avant même de voir le générique final. Une petite partie ?

Cette série est pour vous si :
- Vous aimez les échecs ou voulez en apprendre un peu plus
- Vous cherchez une série courte et intense
- Vous appréciez les séries bien réalisées, mises en scène et en musique
Cette série n'est pas pour vous si :
- Les sujets comme l'addiction, la solitude, le génie ou le féminisme ne vous plaisent pas
- Vous préférez les séries un peu plus longues
- Vous n'aimez vraiment pas les échecs

La saison 1 du Jeu de la Dame est disponible sur Netflix.