Cela ne vous a pas échappé, un indice de réparabilité est maintenant donné à nos appareils électroniques. Une indication qui vise à limiter l'impact environnemental de ce type de produits. Voyons ensemble comment cet indice est calculé, ses avantages, ses limites et la manière dont il va évoluer dans les années à venir. D'ici à la fin de ce dossier, l'indice de réparabilité n'aura plus aucun secret pour vous.
C'est quoi l'indice de réparabilité ?
L'indice de réparabilité est une note sur 10, donnée obligatoirement à cinq types de produits électroniques et électriques : les
smartphones, ordinateurs portables, téléviseurs, lave-linge (à hublot) et les tondeuses à gazon électriques. Ce système de notation a pour objectif d'indiquer au consommateur si les appareils en question sont faciles à réparer ou non. Dans une démarche de lutte contre l'obsolescence programmée, le gouvernement souhaite encourager les consommateurs à réparer leurs appareils plutôt que d'en racheter.Décret sur l'indice de réparabilité : ce que dit la loi
En partant du constat que seulement 40 % des produits électriques et électroniques qui tombent en panne sont réparé en France, le gouvernement a décidé de mettre en place l'indice de réparabilité. Son objectif ? Faire grimper ce chiffre à 60 % d'ici à cinq ans en donnant au consommateur les moyens d'agir pour favoriser une économie circulaire. Un code couleur a été mis en place pour identifier rapidement les produits avec le meilleur score.
L'indice de réparabilité a été mis en place dans le cadre de la loi anti-gaspillage qui comprend cinq étapes, dont la quatrième est d'agir contre l'obsolescence programmée et d'éviter le gaspillage des ressources. C'est ainsi qu'a été rendu obligatoire l'affichage de l'indice de réparabilité sur les catégories de produits cités plus haut, depuis le 1er janvier 2021. Cet indice de réparabilité va évoluer (oui, comme un Pokémon) en indice de durabilité d'ici à 2024 grâce à de nouvelles mesures sur lesquelles nous revenons à la fin de ce dossier.
Indice de réparabilité : un double objectif
Le premier objectif de cet indice de réparabilité est bien sûr d'éduquer le consommateur afin qu'il adopte un comportement d'achat plus responsable. Ainsi, choisir un produit facilement réparable, c'est prolonger sa durée de vie. Cela permet de retarder l'achat d'un produit neuf et produit moins de déchets électroniques. Au-delà de l'aspect écologique, le consommateur préserve également son pouvoir d'achat en utilisant son produit plus longtemps.
Mais il ne faut pas non plus oublier la pression que cela peut exercer sur les fabricants qui doivent faire des efforts pour améliorer l'indice de réparabilité de leur produit. À l'image du Nutri-Score sur les produits, cette note de réparabilité incite les marques à changer la manière dont ils conçoivent leurs produits pour continuer à séduire les consommateurs.
Comment est calculé l'indice de réparabilité ?
Cinq critères ont été retenus par le Ministère de la Transition écologique pour établir cette note sur 10 :
- La documentation
- La démontabilité du produit
- La disponibilité des pièces détachées
- Le prix de vente des pièces détachées
- Des critères spécifiques
Revenons maintenant un peu plus en détail sur les grilles de calcul de l'indice de réparabilité et sur chacun des critères que nous venons de citer.
1. La documentation
Le premier critère à respecter est la mise à disposition des documents nécessaires techniques nécessaires à la réparation du produit. Les consommateurs comme les réparateurs (qu'ils soient agréés ou non) peuvent donc accéder à tous les manuels, intructions, etc. dont ils ont besoin pour réparer et entretenir au mieux l'appareil.
Pour obtenir le maximum de point sur ce critère, les constructeurs de téléviseurs doivent mettre à disposition cette documentation pendant minimum 11 ans. Pour les smartphones et les ordinateurs portables, ce délai doit être d'au moins 7 ans.
2. La démontabilité du produit
Pour déterminer la note de ce critère, les caractéristiques de la fixation sont ici évaluées. Le nombre et le type d'outils nécessaires au démontage de l'appareil sont pris en compte, tout comme le nombre de pièces amovibles et d'étapes pour y accéder. Autant d'éléments cruciaux si vous souhaitez réparer vous-même votre appareil sans y passer des heures.
Certains produits sont très bien étudiés dans ce sens. C'est notamment le cas du Fairphone 4 qui a obtenu un indice de réparabilité de 9,3/10. Le meilleur du marché des smartphones à ce jour. Il doit son excellente note de démontabilité à sa conception ingénieuse qui permet de remplacer de très nombreux composants en utilisant un simple tournevis cruciforme. Moins de 10 minutes suffisent pour "désosser" complètement l'appareil.
- Design modulaire et grande réparabilité
- Un smartphone équitable
- Photos de jour
3. La disponibilité des pièces détachées
Pouvoir démonter facilement un produit, c'est bien. Mais pouvoir le réparer en trouvant rapidement les composants, c'est mieux. C'est tout l'objet de troisième critère. Si vous devez remplacer l'écran de votre smartphone, ou le haut-parleur de votre ordinateur portable, pouvez-vous trouver des pièces détachées ? Si oui, combien jusqu'à combien d'années après la date de commercialisation du produit ? Ces composants sont-ils livrés rapidement ? Autant d'éléments pris en compte ici.
À ce jeu, les géants du secteur ont un avantage concurrentiel. En effet, ils profitent d'un réseau de distribution plus large et d'une logistique supérieure aux marques plus petites qui fabriquent également des produits électroniques.
4. Le prix des pièces détachées
Pour évaluer le cout relatif d'une pièce détachée par rapport au prix du produit, un calcul de ratio et de points a été mis en place. Ainsi on prend le prix du composant le plus cher de l'appareil, que l'on additionne à la moyenne des prix de tous les autres composants. Une fois divisée par deux, cette somme donne un ratio auquel est associé un certain nombre de points.
Ainsi, un appareil avec un ratio de 0,15 aura un cout de réparation moyen de 15 % du prix de l'appareil. Ce qui lui permet d'obtenir 75 points sur 100. Un autre produit avec un ratio de 0,10 ou moins aura le nombre de points maximum grâce à son cout de réparation qui ne dépasse pas les 10 % du prix du produit.
5. Une note liée aux spécificités du produit
Le dernier critère est celui qui varie le plus dans la mesure où il dépend des spécificités du produit. Du moins, c'est de cette manière qu'il est présenté. En effet, en consultant ces fameux sous-critères, nous avons constaté très peu de différence entre les téléviseurs, les ordinateurs portables et les smartphones.
Sur ces deux derniers, les critères retenus sont la disponibilité des informations sur la nature des mises à jour, l'assistance à distance sans frais et de pouvoir réinitialiser le système d'exploitation. Les téléviseurs ne sont pas concernés par les informations relatives aux mises à jour, mais doivent être équipés d'un dispositif d'affichage qui enregistre de façon cumulative l'usage du produit en nombre d'unités. Dispositif que le consommateur doit pouvoir consulter facilement.
Si vous voulez connaitre les détails qui permettent de calculer la note globale sur 10 du produit que vous voulez acheter, sachez que le vendeur ou le fabricant ont l'obligation légale de vous les fournir lors de l'achat. Cela prend la forme d'un tableau comme vous pouvez le voir ci-dessus.
iFixit et l'indice de réparabilité : une approche complémentaire
Bien avant l'indice de réparabilité, l'entreprise iFixit militait pour une économie circulaire en mettant en avant le niveau de réparabilité des appareils électroniques en leur attribuant une note. Vous l'avez peut-être déjà constaté, les notes iFixit et celles de l'indice de réparabilité peuvent aller du simple au double.
Pour mieux comprendre, prenons le cas (désormais célèbre) du Samsung Galaxy S21. Comme vous pouvez le voir ci-dessus, il a obtenu une note de 4 sur 10 par iFixit. À l'inverse, l'indice de réparabilité du Galaxy S21 est de 8,2 sur 10. Comment expliquer cet écart allant du simple au double ? Pour établir sa note, iFixit se concentre uniquement sur la démontabilité de l'appareil et la facilité avec laquelle un utilisateur peut le réparer seul.
Cet aspect est également pris en compte par l'indice de réparabilité, mais ne représente qu'un des cinq critères, soit 20 % de la note, dans la mesure ou chaque critère a la même importance. Une pondération discutable dans la mesure où il est bien plus simple d'avoir une bonne note sur la documentation ou la partie logicielle que sur la réparabilité en elle-même.
En étudiant d'un peu plus près la fiche de notation du Galaxy S21, on constate que Samsung n'a obtenu qu'un 7,8 sur 20 sur le critère "démontabilité, accès, outils, fixations". Cela représente finalement un peu moins que les 4 sur 10 d'iFixit.
Un bon indicateur qui peut être amélioré
Comme nous venons de le voir, on touche rapidement aux limites de l'indice de réparabilité. La note et le code couleur sont un excellent moyen pour donner au consommateur un critère supplémentaire pour sa décision d'achat. Mais le terme "indice de réparabilité" avec une bonne note associée laisse entendre que le produit est facilement réparable… Ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas.
Samsung a au moins eu le mérite d'être honnête sur la réparabilité de ses produits. Car oui, ce sont bien les constructeurs qui s'auto-évaluent avec les critères définis par le gouvernement. Un choix compréhensible dans la mesure où il serait impossible pour les autorités de tester tous les produits commercialisés en France. Évidemment, les marques ont tout intérêt à jouer le jeu dans la mesure où ils peuvent être contrôlés et sanctionnés en cas de tricherie.
Mais il serait trop facile de critiquer ce nouvel outil qui représente une vraie avancée pour optimiser la durée de vie des produits que nous consommons.
Pour aller plus loin : l'indice de durabilité dès 2024
L'indice de réparabilité mis en place en 2021 dans le cadre de la loi anti-gaspillage n'est qu'une première étape vers un "indice de durabilité" plus complet en 2024. Ainsi, de nouveaux critères seront ajoutés comme la robustesse, la fiabilité ou encore l'évolutivité du produit.
L'objectif est de déterminer l'aptitude d'un produit à fonctionner "dans certaines conditions d'utilisation, de maintenance et de réparation, jusqu'à ce qu'un état limite soit atteint". Un indicateur qui se démarque donc de la simple "durée de vie" d'un produit.
L'élaboration de ce nouvel indice se poursuivra jusqu'en 2024, avec la mise en place de groupe de travail. Ces derniers sont composés de plusieurs acteurs, comme les représentants des fabricants, distributeurs, réparateurs, les pouvoirs publics, ainsi que des associations de consommateurs et de protection de l'environnement.
Ces nouveaux critères seront également l'occasion d'harmoniser et de pondérer la grille de calcul. Nous l'avons vu, cette dernière peut induire en erreur les consommateurs en présentant une note finale flatteuse qui ne reflète pas toujours le niveau de réparabilité d'un appareil.
Conclusion
D'après une étude Eurobaromètre, 92 % des Européens sont favorables à un affichage de la durabilité des produits. En ce sens, la France est précurseure en la matière et montre l'exemple au niveau européen. À quand une uniformisation de cet indice pour tous les états membres de l'UE ? C'est un levier important pour réduire l'impact environnemental des produits électroniques et numériques que nous consommons.
Bien qu'imparfait, l'indice de réparabilité est une belle avancée pour sensibiliser les différents acteurs du marché à l'importance de concevoir et consommer des produits plus durables. Ainsi, les consommateurs pourront faire des choix plus avisés pour préserver la planète et leur budget. L'indice a également pour but d'instaurer une concurrence entre les fabricants pour concevoir les produits les plus durables possible.
Nous aimerions maintenant connaitre votre avis sur la question :
Avez-vous déjà acheté un produit plutôt qu'un autre en comparant leurs indices de réparabilité ? Selon vous, quels critères devraient avoir le plus d'importance pour établir cette note ?