© Shutterstock
© Shutterstock

Entre les atteintes à la vie privée et la poursuite de la flambée épidémique, la Corée du Sud a choisi. Le pays du Matin calme va bientôt démarrer des tests destinés à suivre, par la reconnaissance faciale, les cas de Covid-19.

En Corée du Sud, l'épidémie de Covid-19 atteint des sommets. On y cumule désormais plus de 500 000 cas, plus de 4 000 décès et on y bat record sur record, avec plus de 6 300 cas par jour désormais recensés, dans un pays qui compte un peu plus de 50 millions d'habitants. La Corée du Sud, à la pointe des nouvelles technologies, s'apprête à franchir un virage déterminant dans son traitement de la crise de coronavirus. Sur place, on se prépare à lancer un projet pilote qui utilisera l'intelligence artificielle et la reconnaissance faciale pour suivre les déplacements des cas de coronavirus.

Un vaste dispositif qui aidera à suivre les personnes contaminées et les cas contact, même masqués

C'est dans la ville de Bucheon (près d'un million d'habitants) que le projet, financé au niveau national, va voir le jour. Située à quelques kilomètres seulement de Séoul à vol d'oiseau, la cité, équipée de milliers de caméras de vidéosurveillance, devrait démarrer l'opération en tout début d'année prochaine, en janvier nous dit-on du côté de Reuters.

Le projet utilisera la reconnaissance faciale qui sera couplée à des algorithmes boostés à l'intelligence artificielle, le tout grâce aux images fournies par les 10 820 caméras de surveillance de la ville, qui aideront à suivre les déplacements des personnes qui auront contracté la Covid-19. Dans les faits donc, toute personne qui aura pu être en contact immédiat avec une autre malade pourra être identifiée, même dans le cas où elle porte un masque.

L'initiative n'est pas forcément la première du genre. La Chine, le Japon, certains États américains, l'Inde, la Pologne et la Russie ont déjà déployé, ou tout du moins démarré des tests de dispositifs de reconnaissance faciale, pour lutter contre la pandémie et tracer les sujets contaminés.

Le projet, qui ne se destine qu'à lutter contre la pandémie, inquiète les défenseurs de la vie privée, qui craignent une exploitation des données collectées

Les dirigeants de la ville de Bucheon sont évidemment convaincus de la pertinence du système qui, selon eux, devrait permettre de réduire la pression sur les équipes médicales et de recherche de la ville. Sauf que celui-ci pourrait être rapidement controversé, alors même que la Corée du Sud dispose déjà d'un large éventail d'informations, assez intrusif, pour améliorer sa recherche de cas contact. Les autorités ont par exemple accès aux images de vidéosurveillance mais aussi aux données de géolocalisation issues des smartphones des habitants, ou aux opérations bancaires, entre autres.

« Il faut parfois des heures pour analyser une seule séquence de vidéosurveillance. L'utilisation de la technologie de reconnaissance faciale permettra cette analyse en un instant », s'est justifié le maire de Bucheon, Jang Deog-cheon, motivé sans doute par la difficulté, jusque-là, de vérifier pleinement la véracité des témoignages des personnes atteintes. Le projet mis en place à Bucheon devrait permettre de suivre jusqu'à dix personnes en seulement 5 à 10 minutes, alors que manuellement, le suivi d'une seule personne prendrait autour d'une demi-heure.

Si pour le moment le gouvernement n'entend pas étendre l'expérience au niveau national, celle-ci lui coûtant déjà autour de 1,5 milliard d'euros, les défenseurs des droits de l'Homme et de la protection de la vie privée sont inquiets par sa mise en place. Beaucoup font part de leur inquiétude notamment vis-à-vis de la conservation et de la réutilisation potentielles des données qui seront collectées. Les autorités entendent bien n'utiliser ce système que dans le strict cadre du contrôle et de la prévention des maladies infectieuses. Les citoyens pourront néanmoins être tracés, même s'ils ne livrent pas leur consentement.

Source : Reuters