Pour former des intelligences artificielles, une start-up finlandaise utilise des détenus, qui lui fournissent une main-d'œuvre peu coûteuse, tout en les préparant au travail numérique une fois sortis de prison. Une stratégie gagnant-gagnant ?
Vous ne rêvez pas, non, en Finlande, la start-up Metroc, spécialisée dans la recherche de projets de construction, utilise des détenus pour étiqueter des données et former des modèles d'IA. Les prisonniers sont payés 1,54 euro de l'heure et se relaient en travail posté.
Metroc vise à combler le manque de travailleurs finlandais bon marché pour améliorer son modèle linguistique. L'initiative soulève néanmoins des préoccupations quant à l'exploitation potentielle de main-d'œuvre bon marché et à l'avenir de la formation en intelligence artificielle.
Les prisonniers finlandais, une nouvelle main-d'œuvre pour l'IA
Dans le détail, Metroc a monté un projet permettant aux détenus de travailler sur des tâches liées à l'IA. Ces derniers effectuent des quarts de travail de trois heures pendant lesquels ils étiquettent des données pour aider les modèles d'IA de la start-up à comprendre les informations contenues dans des articles de presse et des documents municipaux sur des projets de construction.
La démarche peut aider à pallier le manque de personnel finlandais bon marché dans le but de développer le modèle linguistique. Mais l'initiative soulève des questions éthiques sur l'utilisation du travail carcéral et sur la rémunération des détenus, disons-le famélique, à 1,57 euro de l'heure.
De leur côté, les partisans du projet estiment qu'ils offrent aux détenus une opportunité de travail stimulant sur le plan cognitif, qui les prépare au monde du travail numérique une fois qu'ils seront sortis de ce milieu carcéral. Mais les avis plus critiques considèrent que cette pratique s'inscrit dans une tendance plus large d'exploitation de main-d'œuvre bon marché pour alimenter la révolution de l'IA.
Le doute quant aux compétences réelles transmises aux détenus
Alors que les entreprises technologiques recherchent toujours plus de données pour former leurs IA, elles sont amenées à dénicher des travailleurs au profil inhabituel pour effectuer ces tâches. Le projet mené en Finlande pose des questions sur la manière dont cette pratique pourrait être étendue à d'autres pays, en particulier ceux ayant des systèmes carcéraux différents.
Certains experts estiment que le travail sur les données en prison peut offrir des avantages, notamment en aidant les détenus à acquérir des compétences numériques. D'autres sont en revanche sceptiques quant à l'efficacité de cette formation, et redoutent que cela devienne une source de main-d'œuvre bon marché pour les entreprises.
À l'échelle mondiale, les préoccupations liées à l'exploitation de groupes plus vulnérables que d'autres pour soutenir la révolution de l'intelligence artificielle sont nombreuses. Et l'on ignore encore dans quelle mesure ce travail offre de réelles compétences transférables en dehors de la prison pour les personnes incarcérées.
Source : Wired