Camille Pinet pour Clubic
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Depuis la première représentante de l’espèce en 1976, la Mercedes Classe S donne une idée du futur de l’automobile. Fidèle à sa lignée, la toute nouvelle génération introduit un nombre ébouriffant d’innovations en tous genres. Reste à savoir si elles relèvent du gadget ou incarnent encore une fois l’avenir.

Installé à l’arrière de la nouvelle Classe S dans sa version limousine, ma tête repose paresseusement sur un appuie-tête aussi moelleux que celui d’un lit d’hôtel 5 étoiles. Contrairement à ce dernier, il ne se contente pas d’être confortable : il me chauffe doucement le cuir chevelu. Le siège avant passager avancé au maximum me permet de profiter de mon fauteuil individuel réglable électriquement à l’infini qui supporte mes jambes allongées comme celui d’un A380 en classe Affaires. Un café est réchauffé par le porte gobelet, qui peut également le refroidir… au cas où.

Camille Pinet pour Clubic
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Un concentré de technologie au service du confort

Pour veiller à ne pas m’endormir trop vite, j’ai démarré la lecture du dernier succès hollywoodien, bien évidemment riche en cascades et en explosions. Celles-ci sont retranscrites fidèlement par l’installation sonore « Burmester » mais aussi par des moteurs placés dans les sièges qui ajoutent une expérience sensorielle que Mercedes appelle le son 4D.

Je ne suis pas d’humeur à tenter un titre de techno, mais nul doute que je ressentirais les basses aussi physiquement que dans une boîte de nuit. L’impression d’être au cinéma n’est altérée que par la taille de l’écran, qui ne peut évidemment dépasser la largeur du siège avant. Je suis isolé des regards extérieurs par des stores électriques, tandis que la climatisation cinq zones intégrant 20 moteurs me permet d’ajuster la température de mon cocon avec une précision millimétrique.

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Voilà un tout petit aperçu des fonctionnalités que la nouvelle Mercedes Classe S offre à ses occupants. Depuis sa devancière de 1976 (nom de code « W116 », pour les intimes), le navire amiral de la gamme Mercedes s’est fait un point d’honneur à introduire des nouvelles technologies, souvent généralisées dans l’automobile de monsieur tout-le-monde. C’est le cas de l’ABS, de l’ESP ou encore du régulateur de vitesse adaptatif.

Cette-fois-ci, l’enjeu est encore plus important pour la nouvelle limousine : démontrer que le plus ancien constructeur automobile n’a pas perdu la main dans la course au futur face aux nouveaux venus, et plus particulièrement Tesla. Elle porte en elle une ambition peut-être plus fondamentale encore : démontrer que l’automobile, attaquée de toutes parts par les réglementations et sur le point de passer à l’ère électrique, peut encore faire rêver.

C’est peut-être pourquoi la nouvelle limousine se fait plus remarquer par le nombre de ses nouveaux équipements que par ses technologies purement automobiles, manière de compenser la disparition des gros moteurs dont elle avait l’exclusivité.

Un parc d’attractions roulant

Le festival d’équipements embarqués ne se limite pas aux places arrière de la version limousine. A l’avant, la S accorde pour la première fois la plus grande place aux écrans. On n’en n’est pas encore tout à fait au stade de la Tesla, l’Etoile préférant les multiplier que les agrandir démesurément. Ils sont suffisamment nombreux pour que l’Etoile annonce fièrement 77 pouces de surface d’affichage cumulée !

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Elle accueille donc à l’avant une large dalle OLED centrale de 12,8 pouces qui s’ajoute à celle de 12,3 pouces faisant face au conducteur. Ce dernier intègre pour la première fois en option une fonction 3D dans la partie centrale qui, comme la fonction holographique des Peugeot 208 et 2008, nous paraît relever du pur gadget, dans la mesure où il ne permet pas vraiment de mieux hiérarchiser les informations.

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L’affichage tête haute optionnel apparaît plus prometteur. Non seulement il offre un niveau de définition et de précision inédit dans la production automobile mais il recèle la première application convaincante de la réalité augmentée dans l’automobile : une indication fléchée en trois dimensions y est projetée sur le pare-brise montrant au conducteur la route à suivre lorsqu’un trajet GPS est suivi. Elle donne l’impression de grossir et d’indiquer le chemin à mesure que celui-ci se rapproche. Il devient dès lors impossible de se tromper entre deux sorties de ronds-points, comme c’est fréquemment le cas avec un GPS classique.

Une utilisation beaucoup plus convaincante que celle déjà vue sur la Classe A et qui reste proposée sur la Classe S, quand l’image du carrefour s’affiche sur la partie supérieure de l’écran central avec un rappel d’indication incrusté. Il s’agit de l’une des rares nouvelles fonctions digitales qui facilite réellement la vie du conducteur au quotidien.

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Car pour le reste, il est très facile de se perdre dans la profusion des fonctionnalités et des menus proposés, même si Mercedes a accomplis de nets progrès en termes d’ergonomie. On finit souvent, en désespoir de cause, par utiliser la commande vocale, censée s’adapter à l’utilisateur. Elle est désormais capable de reconnaître la provenance de la voix, ce qui permet d’individualiser les commandes de température par exemple. C’est très impressionnant sur le principe, mais le vocabulaire à employer pour se faire comprendre par l’auto nécessite un temps d’apprentissage.

Nous n’avons pas eu le temps en quelques heures de faire le tour des possibilités de la voiture : même le dossier de presse de 90 pages peine à décrire l’ensemble ! Soulignons tout de même que beaucoup d’entre elles sont en option.

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Enfin, disons quelques mots de la qualité de cet intérieur, qui, bien entendu, fait valoir une belle qualité de fabrication mais peut décevoir ceux qui ont une vision traditionnelle du luxe, basée sur le caractère intemporel de beaux matériaux. L’éclairage d’ambiance multicolore un peu criard, les traces de doigts et poussières qui ne manquent pas de s’accumuler sur les nombreux écrans et les surfaces lisse sombres et les inserts boisés un peu trop clinquants leur laisseront une impression mitigée. Même si elle est au faîte de la technologie actuelle, il est clair qu’elle vieillira plus vite que ses devancières : rien ne prend plus vite de l’âge que des écrans, même si Mercedes insiste sur le fait que 50 systèmes embarqués pourront être mis à jour « Over the Air », une fonctionnalité que Tesla avait justement introduite dans l’automobile.

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Et la conduite dans tout ça ?

On peut passer de longues heures à l’arrêt à explorer les « jouets » que propose cette Mercedes. Elle n’en reste pas moins une automobile calibrée pour les trajets les plus longs, et elle repose pour cela sur une nouvelle plateforme baptisée MRA2.

Nous ne nous attarderons pas sur le cas de ses motorisations, qui fait encore largement appel aux moteurs thermiques. En France, elle ne sera d’ailleurs disponible qu’avec des 6 cylindres diesel dans un premier temps, avant l’arrivée cet été de la variante hybride rechargeable dotée de 100 km d’autonomie en mode WLTP. Il n’y aura pas de modèle 100% électrique puisque ce rôle sera assigné à l’EQS, qui ne devrait pas être en reste en termes de nouveautés technologiques. Alors que Mercedes est l’un des seuls constructeurs à proposer de l’hybride diesel, il n’a pas jugé bon d’équiper ses Classe S dotées de ce moteur de la micro hybridation 48 volts réservée à des moteurs essence V8 proposés sur d’autres marchés.

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En revanche cette nouvelle génération est équipée pour la première fois des quatre roues directrices en option, à l’instar de la Porsche Panamera et de l’Audi A8. Elle pousse cependant les choses un peu plus loin que ces dernières puisqu’elle est la seule à pouvoir braquer ses roues arrière autant, jusqu’à dix degrés à basse vitesse sur les modèles dotés de pneus les moins larges. Nous avons pu les tester sur une version limousine, et force est de reconnaître qu’elles rendent les manœuvres bien plus faciles qu’on pourrait le croire pour une auto de pratiquement 5,30 m de long.

C’est cependant avec une version courte de « seulement » 5,18 m de long que nous avons réalisé l’essentiel de notre essai. Un modèle équipé de série de la suspension pneumatique classique mais pas du système ABC de roulis actif réservé aux modèles 48V. Comme il se doit, le confort de cette suspension « de base » atteint un niveau élevé et la tenue de route apparaît efficace.

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Néanmoins, la Classe S ne constitue absolument pas une rupture dans la catégorie en la matière. En effet, les roues de 21 pouces de notre modèle généraient quelques trépidations, tandis que les deux exemplaires que nous avons essayés étaient affectés de bruits d’air étonnants à ce niveau de gamme. Et si la Classe S se laisse mener sans rechigner dans les enchaînements de virages, on a vu beaucoup mieux chez les concurrentes BMW Série 7 et Porsche Panamera (lire notre essai Porsche Panamera S e-Hybrid) qui proposent une agilité très supérieure sans être sensiblement moins confortables.

Même constat en ce qui concerne les aides à la conduite : si la Classe S annonce l’implémentation prochaine d’un niveau 3 permettant de lâcher le volant sur l’autoroute, son introduction reste suspendue à l’homologation par l’Etat. Pour l’instant, elle se contente de proposer le niveau 2, qui soulage le conducteur sur autoroute. Efficace dans l’absolu, ce système apparaît moins intrusif que celui proposé par le groupe VW. Il a surtout la bonne idée de renoncer au coup de frein sur la roue extérieure lorsqu’on a le malheur de mordre sur une ligne blanche, un dispositif extrêmement désagréable qui équipe les autres modèles de la gamme du constructeur.

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Acheter une Mercedes Classe S

Evidemment, la Classe S s’adresse aux plus nantis de ce monde et elle peut compter sur une position commerciale très installée puisqu’elle domine outrageusement sa catégorie depuis ses débuts et ceci dans le monde entier. Elle n’a donc aucune raison de faire de cadeaux à ses millionnaires de propriétaires ou aux palaces qui en feront l’acquisition.

Dès lors, la barre des 100 000 € est franchie sans complexe pour le modèle d’accès, auxquels il faut rajouter 5 000 € pour accéder à la version limousine. Considérez cela cependant comme un début, puisque le catalogue d’option est sans doute l’un des plus épais de toute la production automobile du moment.

Camille Pinet

Fidèle à sa politique commerciale, la filiale française propose des nombreux packs dont le prix s’échelonne de 500 € à… 34 500 € pour le pack Business Class réservé aux limousines. Il intègre le système Burmester 4D évoqué plus haut, le siège avec repose pied à l’arrière où se trouve également la recharge par induction, le module de massage, les deux écrans arrière avec fonction TV et casques ainsi que les ceintures airbag.

A titre d’exemple notre limousine d’essai équipée du plus petit moteur affichait un prix total options comprises de 158 540 € auxquels un malus de 2 544 €, finalement assez modéré pour ce type de haut de gamme.

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Bilan de l’essai de la Mercedes Classe S

La démonstration de la Classe S est impressionnante : elle parvient à embarquer un nombre d’équipements et de technologies sans équivalent dans la production automobile mondiale. Elle a également de quoi faire rêver petits et grands et représente toujours un signe extérieur de réussite éclatant.

Reste que les innovations qu’elle introduit dans cette nouvelle génération ne constituent pas des ruptures dans l’industrie aussi déterminantes que l’ABS ou l’ESP des générations précédentes, qui se sont généralisés dans la production automobile mondiale. Il y a fort à parier que beaucoup des fonctionnalités qu’elle inaugure ne seront tout simplement jamais utilisées par ses propriétaires.

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Plus grave, même si la synthèse vocale qu’elle inaugure progresse nettement, elle ne propose pas encore un moyen satisfaisant d’utiliser ces fonctions sans se perdre dans les innombrables menus des différents écrans. Ici, la technologie est utilisée pour faire parler d’elle et pas vraiment pour s’effacer et devancer les besoins du conducteur et du passager.

A sa décharge, aucun constructeur n’a pour l’instant passé ce cap : il semble que les investissements colossaux que la course aux armements numérique impose doivent inévitablement faire l’objet d’une mise en scène un peu bavarde. Reste que le luxe automobile ne se résume pas à des écrans, il passe aussi par des qualités routières et une certaine qualité de présentation et de construction, domaines dans laquelle cette limousine excelle mais ne progresse pas vraiment.

Fiche technique Mercedes Classe S 400d AMG Line « courte »

  • Dimensions L x l x h en mètres : 5,18 x 1,92 x 1,50
  • Empattement en mètres : 3,10
  • Volume de coffre : 540 litres VDA
  • Poids à vide : 2 070 kg
  • Nombre de places : 5 (4 sur certaines versions)
  • Moteur thermique : 6 cylindres en ligne turbo diesel
  • Cylindrée : 2 925 cm3
  • Puissance totale cumulée : 330 ch
  • Couple total cumulé : 700 Nm
  • Puissance fiscale : 17 CV
  • Propulsion : intégrale
  • Direction : Electrique à crémaillère
  • Suspension avant : Multibras, ressorts pneumatiques
  • Suspension arrière : Multibras, ressorts pneumatiques
  • 0 à 100 km/h : 6,4 secondes
  • Vitesse maximale : 250 km/h

Prix et équipement

Prix Mercedes S400D AMG Line : 115 150 €
Malus écologique : 4 279 €

Peinture métallisée : de 1 200 € à 2 100 €

Pack Advantage (toit ouvrant panoramique, affichage 3D, éclairage d’ambiance actif, pack stationnement à distance, système hifi Burmester) : 6 550 €

Pack Premium (éclairage digital, affichage tête haute avec réalité augmentée, sièges multicontours massants chauffants et climatisés à l’avant) : 12 650 €

Pack Premium Plus (pack premium plus cuir Nappa noir, sièges chauffants à l’arrière, pack energizing à l’avant, ionisation et diffusion de parfum, volants et accoudoirs chauffants) : 15 500 €

Pack Executive Arrière (tablette arrière tactile, sièges arrière climatisés, stores électriques à l’arrière, sièges arrière électriques à mémoire, recharge sans fil à l’arrière, pack chauffeur permettant d’avancer le siège) : 7 700 €

Pack Business Class (siège inclinables électriquement avec repose jambe, système de divertissement avec TV et son 4D, fonction massage) : 34 500 €

Système MBUX avec tablette tactile 12,8 pouces : 700 €

Roues arrière directrices : 1 600 €