La réforme du financement des retraites de fonctionnaires mise en place chez France Telecom constitue-t-elle une aide d'Etat incompatible avec la réglementation européenne ? Bruxelles s'interroge et engage une enquête approfondie sur ce dossier. « Les réformes structurelles visant à accompagner les anciens monopoles vers un marché libéralisé sont souhaitables. Cependant, nous devons nous assurer qu'elles ne faussent pas la concurrence entre les opérateurs dans une mesure contraire à l'intérêt commun », a déclaré dans un communiqué Neelie Kroes, commissaire européenne chargée de la concurrence.
Par le passé, le groupe France Telecom devait assurer seul l'équilibre financier du régime de retraite de ses fonctionnaires, en dérogation au régime de droit commun des pensions. Avec la réforme mise en place en 1997, à la veille de l'ouverture à la concurrence des télécoms, au moment de l'ouverture du capital du groupe, l'Etat a pris le relais. Depuis, l'opérateur historique doit simplement acquitter une contribution libératoire, comme toutes les entreprises de droit commun. Le taux de cette contribution est calculé de façon à aligner les charges sociales de France Telecom avec celles que paieraient les entreprises concurrentes pour la même masse salariale. Toutefois, les autorités françaises ont exempté l'ex-monopole du paiement des cotisations relatives au risque de chômage, dans la mesure où ce risque ne touche pas les fonctionnaires. C'est là où le bât blesse...
Estimant que l'allègement des coûts de retraite et l'exemption du paiement des cotisations de chômage constituent une aide d'Etat incompatible, un concurrent de l'opérateur historique a déposé plainte. Les autorités françaises soutiennent, à l'inverse, que la réforme a simplement soulagé France Telecom « du désavantage structurel que constituait l'obligation de financer le coût des retraites de ses fonctionnaires, et qu'à ce titre, elle ne constitue pas une aide d'Etat ». De son côté, l'opérateur historique a affirmé dans un communiqué : « le bilan du dispositif n'est en rien défavorable à l'Etat et n'est source d'aucun avantage particulier pour France Telecom, ni dans la période écoulée depuis 1997, ni jusqu'au jour où l'entreprise, qui ne recrute plus de fonctionnaires, verra partir le dernier d'entre eux en retraite ». Le groupe a par ailleurs souligné que le régime de retraite des fonctionnaires de La Poste, calqué sur le sien, a été validé par la Commission.
L'enquête approfondie ouverte le 20 mai 2008 par la Commission européenne devra déterminer si cette réforme constitue effectivement une aide d'Etat au sens communautaire, et si l'initiative est compatible avec le marché commun.