Le numérique s'impose sur le champs de bataille. Quatorze ans après le dernier « Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale », écrit dans un contexte post guerre froide, Nicolas Sarkozy, Président de la République et par conséquent Chef des Armées, dévoilait ce matin un nouveau livre blanc, présentant la politique de défense de la France jusqu'en 2020.
Outre les réductions d'effectifs et l'accent mis sur la capacité de projection des forces armées, le nouveau Livre blanc insiste sur la défense cybernétique, la guerre de l'information à l'heure de l'informatique quantique (web sémantique, cryptographie, analyse des contenus) et les nouveaux systèmes de renseignements, principalement satellitaires, visuels ou auditifs.
Depuis 1994, « la mondialisation a profondément modifié la vie économique comme la vie quotidienne et les relations internationales. De nouvelles puissances ont émergé et de nouvelles vulnérabilités se sont révélées. Le clivage traditionnel entre la sécurité intérieure et la sécurité extérieure s'est encore davantage effacé », commence par expliquer le chef de l'État. En conséquence, la guerre informatique est devenue une préoccupation majeure du Livre blanc, car les menaces dans le cyberespace sont multiformes: blocage malveillant, destruction matérielle, neutralisation informatique, vol ou altération de données, voir prise de contrôle d'un dispositif à des fins hostiles.
Et pour cause, selon le rapport, « en 2011 la planète devrait compter plus de 1,5 milliard d'internautes (...) envoyant entre 100 et 200 milliards de messages électroniques par jour ».
Deux axes stratégiques sont donc envisagés: le premier concerne la défense, avec la création d'une agence de la sécurité des systèmes d'information (SGDSN), édifiée à partir de l'actuelle direction centrale de la sécurité des systèmes d'information, créée en 2001 et forte de 110 collaborateurs. Elle serait chargée de mettre en oeuvre une capacité centralisée de détection précoce des attaques informatiques, grâce à la surveillance permanente des réseaux sensibles et au développement de produits de très haute sécurité. Elle sera également chargée d'informer le public via le site securite-informatique.gouv.fr.
Le second concerne l'offensive, et c'est là la nouveauté. Car outre le lancement d'une politique de défense, passant en particulier par des produits de cryptographie de très haute sécurité, totalement maitrisés au niveau national, le plan prévoit une doctrine de défense active, combinant surveillance permanente, réaction rapide et action offensive. Cette action offensive pouvant mener à une « riposte proportionnée en cas d'agression », comme par exemple, la neutralisation des systèmes d'information et de commandement de l'adversaire afin de paralyser ou d'atteindre ses centres de décisions. « De ce travail émerge un nouveau concept; celui d'une stratégie de sécurité nationale qui associe, sans les confondre, la politique de défense, la politique de sécurité intérieure, la politique étrangère et la politique économique », ajoute Nicolas Sarkozy.
En complément, le Livre blanc prévoit la création de plusieurs portails d'information à destination du grand public (préparation aux évènements graves, prévention contre les attaques informatiques, recherche stratégique). Ainsi que l'accentuation des efforts concernant l'espace, englobant l'imagerie, la géolocalisation stratégique, les drones et les écoutes à distance, avec un doublement de ses crédits annuels (380 millions d'euros en 2008). Aujourd'hui 800 satellites orbiteraient autour de la Terre, la moitié d'entre eux appartenant aux États Unis, une centaine à la Russie et seulement 18 à la France...