L'Internet Society dénonce la riposte graduée

Romain Heuillard
Publié le 09 septembre 2008 à 15h05
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En juin dernier, la branche française de l'Internet Society (ISOC) qualifiait la riposte graduée de liberticide. Les Chapitres européens de l'Internet Society ont récemment publié un aide mémoire dans lequel ils condamnent à leur tour le projet de loi création et Internet (aussi appelée Hadopi), et en particulier la méthode dite de riposte graduée.

Cette dernière permet aux pouvoirs publics de priver de connexion les internautes qu'ils jugent pirates. Ainsi l'ISOC estime que la riposte graduée est une « réponse disproportionnée » qui va à l'encontre de l'objectif de développement de contenus créatifs en ligne que s'est fixé la Commission européenne en janvier 2008, ajoutant que « les mesures et les sanctions proposées reflètent un manque de compréhension de ce qu'est Internet ». La commission souligne que la coupure de la connexion des foyers empêche l'accès à de nombreux services, comme la déclaration d'impôt et la gestion bancaire en ligne par exemple, mais aussi à l'éducation. « De nombreux foyers ne seraient plus capable de participer à part entière à la société moderne sans accès internet », note l'ISOC.

D'autant que « le cadre légal exact de cette surveillance n'est pas encore clair », et dans le cas français, « les données relatives aux supposés pirates ne correspondraient pas nécessairement à celles des véritables infracteurs ». En effet, quid des intrusions sur les réseaux sans-fil des particuliers, une pratique à la portée de nombreux pirates en herbe ? Sans compter que si plusieurs utilisateurs accèdent à Internet au sein d'un même foyer, tous sont punis. Avec la riposte graduée, un honnête internaute peut voir son accès coupé jusqu'à ce qu'il obtienne gain de cause auprès des tribunaux, une démarche qu'on sait lente et fastidieuse, puisque le principe de présomption d'innocence n'est pas appliqué ici.

Enfin, l'ISOC constate que « l'industrie de la création n'a pas encore adapté son activité économique à Internet », accusant les majors et autres représentants du secteur de la création de ne pas avoir encore « adapté leur activité et leurs modèles économiques à la nouvelle donne engendrée par l'environnement numérique ». L'Internet Society regrette notamment qu'en dépit d'importantes subventions publiques pour promouvoir des systèmes de gestion numérique des droits, aucune solution de DRM interopérables n'ai pu voir le jour. De plus, elle note très justement « qu'il est impossible d'affirmer que si ces actes étaient empêchés, les internautes concernés achèteraient les même fichiers multimédia (le plus souvent des morceaux de musique ou des films) au prix de détail actuel, par exemple sur CD ou sur DVD. »

Sur le plan technique, les mesures sont « bancales » tandis que sur le plan juridique elles sont « probablement impossibles à mettre en œuvre d'une façon non-discriminatoire ». Sur le plan de la vie privée enfin, la quantité de données personnelles collectée au sujet des abonnés faisant l'objet d'une enquête est extrêmement importante, et « une protection non adéquate, une perte ou un détournement de ces données causeraient un préjudice particulièrement grave ». Ainsi l'Internet Society conclut que « ce qui est appelé riposte graduée n'est pas une réponse appropriée au problème du téléchargement illégal. » Ces conclusions viennent à point à l'heure où ce sujet revient en débat devant le Parlement européen.
Romain Heuillard
Par Romain Heuillard

C'est vers l'âge de 12 ans, lorsque j'ai reçu mon premier ordinateur (un Pentium 100), que j'ai décidé d'abandonner ma prometteuse carrière de constructeur de Lego pour me consacrer pleinement à ma nouvelle passion pour l'informatique. Depuis je me suis aussi passionné pour l'imagerie en général et pour la photo en particulier, mais je reste fan de sujets aussi obscurs que les procédés de fabrication de composants électroniques ou les microarchitectures de processeurs, que l'infiniment grand et l'infiniment petit. Je suis enfin foncièrement anti-DRM et pro-standards ouverts.

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