Steve George, Canonical : "Nous voulons faire d'Ubuntu une alternative solide à Windows"

Ariane Beky
Publié le 27 octobre 2008 à 13h11
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A la veille de la sortie officielle d'Ubuntu 8.10 (Intrepid Ibex), distribution du système libre et ouvert GNU/Linux, Steve George, directeur support et services de Canonical, défend les choix de la jeune société commerciale fondée par l'entrepreneur sud-africain Mark Shuttleworth pour soutenir le projet.

AB - Steve George, bonjour. Certains de vos concurrents regrettent que le projet Ubuntu ne reverse pas suffisamment à la communauté open source. Qu'en pensez-vous ?

SG - Comme notre directeur technique, Matt Zimmerman, l'a récemment souligné, nous n'avons pas été très engagés dans le développement du noyau Linux. Nous nous concentrons sur l'intégration de projets variés liés aux logiciels libres. Nous pensons que l'open source fournit un ensemble de technologies puissantes dont les fonctionnalités sont souvent meilleures que celles des systèmes propriétaires. Notre but est de les rendre faciles d'utilisation et accessibles à tous, hacker Linux, entreprise, particulier...

AB - Quelle société, Dell ou Canonical, a fait le premier pas pour signer un accord commercial ?

SG - Une des plus fortes demandes recueillies sur le forum en ligne IdeaStorm de Dell était que le vendeur de PC fournisse des machines prééquipées de Linux. Quand Dell a demandé quelle distribution ses clients souhaitaient, Ubuntu a été plébiscitée. Et Dell l'a fait, a initié la relation commerciale en réponse à la demande client. Désormais une gamme d'ordinateurs portables et de bureau sont proposés dans certains pays, dont la France (initialement, seuls les USA étaient concernés). Bien sûr, c'est une des deux options offertes avec le nouveau dell-mini-inspiron 9.

AB - Qu'en est-il du modèle économique de Canonical ? La société est-elle rentable ?

SG - Nous avons des sources variées de revenus. Le support professionnel lié à de larges déploiements est une source majeure. Et nous constatons avec plaisir que leur nombre augmente, en France notamment. Nous nous engageons également commercialement auprès de fabricants de matériel pour intégrer Ubuntu à leurs produits. Enfin, nous fournissons davantage de services aux utilisateurs à travers notre boutique en ligne et souhaitons développer cette activité.

Historiquement, notre modèle économique est open source. Nous ne facturons pas, et ne facturerons pas, notre produit phare, car il est le fruit du travail de la communauté. En revanche, nous développons des services payants autour de ce produit. Nous sommes les mieux placés pour le faire, en tant que sponsor officiel du projet Ubuntu et propriétaire de la marque.

AB - Quel sera l'impact de la crise financière sur l'activité de Canonical ?

SG - Il ne fait aucun doute que la crise financière causera des difficultés. Néanmoins, la période sera également celle de l'innovation, car les entreprises et les agences gouvernementales cherchent davantage à tirer profit de leurs budgets existants. Les budgets sont réduits, mais la demande en matière de technologies de l'information ne va pas cesser. C'est l'occasion pour nous de rappeler qu'Ubuntu est un bon moyen, un système performant et rentable, de réaliser des économies tout en augmentant l'efficacité IT d'une organisation.

AB - Pensez-vous que les consommateurs devraient avoir le choix des logiciels qui équipent leurs PC ?

SG - Que vous soyez une entreprise qui souhaite modifier son infrastructure ou un particulier qui veut changer de système d'exploitation lors de l'achat d'un nouvel ordinateur portable, le choix est essentiel. Vous avez plus de possibilités et ce, souvent, à moindre coût. L'utilisateur ne devrait pas être bloqué. Un exemple : le traitement de texte qui équipe Ubuntu utilise un standard ouvert de façon à ce que l'utilisateur puisse exporter ses données facilement vers un autre système. L'utilisation d'Ubuntu doit être un choix, pas une obligation.

AB - Pour certains, un bon début serait de clarifier les prix lors de l'achat d'un PC, le matériel d'un côté, les logiciels de l'autre. Quel est votre point de vue ?

SG - Et bien oui, les utilisateurs devraient être informés de ce que leur coûte Windows sur l'achat d'un nouveau PC. L'Union européenne a fait du bon travail en ce sens, en permettant aux consommateurs d'être remboursés s'ils n'utilisent pas Windows préinstallé sur un nouveau PC acheté. La prochaine étape consiste effectivement à rendre plus explicites les tarifs des logiciels et du matériel lors de l'achat au détail d'un PC. Il faudrait également s'assurer qu'un PC de même référence vendu sans Windows coûte moins cher et, enfin, que de plus nombreuses machines soient commercialisées sans Windows. Cela commence à arriver avec les PC à bas prix (low cost) ou netbooks. Il ne s'agit pas que d'un problème d'offre, la demande doit être soutenue. Nous travaillons dur pour améliorer notre produit et proposer une alternative solide à Windows. L'expérience sous Ubuntu ne doit pas être uniquement la meilleure sur le segment des systèmes libres, et moins encore pour des raisons philosophiques. Elle doit simplement être la meilleure.

AB - Pouvez-vous en dire plus sur les nouveautés clés d'Ubuntu 8.10 ?

SG - La distribution Ubuntu 8.10 (Intrepid Ibex) a été pensée pour une utilisation flexible, fixe et mobile, adaptée à l'évolution des usages numériques. L'utilisateur nomade peut passer aisément d'un réseau câblé à un réseau sans fil grâce au nouveau support de la 3G. Il est également possible à l'utilisateur de la version desktop (interface Gnome 2.24) de partager rapidement et de manière sécurisée une session. Bonus : Canonical a passé un accord avec la BBC pour permettre à tous les utilisateurs du système, quel que soit l'endroit depuis lequel ils se connectent, d'accéder aux programmes en ligne du réseau audiovisuel britannique. Par ailleurs, l'édition serveur d'Ubuntu 8.10, maintenue sur 18 mois, met l'accent sur la virtualisation et le stack Java. Pour apprécier, je vous invite à télécharger (ou à mettre à jour) librement et gratuitement, à partir du 30 octobre 2008, Ubuntu 8.10 Desktop ou Server en fonction de vos besoins.

AB - Quelle sera l'étape suivante pour Ubuntu et Canonical, le marché du netbook et du terminal ultra mobile ?

SG - Comme vous le savez, nous sommes déjà présents dans le netbook (le PC à bas prix) avec Dell, Toshiba, Sylvania et, à l'avenir, avec d'autres vendeurs. Nous sommes une plateforme, du centre de données au poste de travail. Sur chaque segment, serveur, bureau, micro-portable, netbook, nous enregistrons de bons résultats. J'ajoute que notre portefeuille de technologies évolue constamment et que nous nous appuyons sur un large réseau de partenaires. J'insiste, 8.10 arrive et d'autres innovations suivront par la suite !

AB - Steve George, je vous remercie.
Ariane Beky
Par Ariane Beky

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