L'Asic, l'Association des Services Internet Communautaires, qui réunit des acteurs du Web français tels que Dailymotion, AOL, Google ou Yahoo, s'insurge aujourd'hui contre un amendement déposé dans le cadre du projet de réforme de l'audiovisuel. Ce texte - référencé comme l'amendement 844 et déposé par le député Frédéric Lefebvre, propose que les services qui permettent de consulter en ligne des contenus audiovisuels et en tirent une rémunération participent au financement de la production audiovisuelle. Il propose par ailleurs que ces services soient placés sous la tutelle du CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel).
L'amendement 844 part du principe que dans la mesure où de nombreux services en ligne proposent des contenus de nature audiovisuelle, il n'est pas juste que seuls les télévisions ou services de médias audiovisuels à la demande (vidéo à la demande, ou télévisions de rattrapage) participent au financement de la production audiovisuelle. « Il est proposé, par souci de cohérence et d'équité, que les autres services qui fournissent, dans un but commercial, des contenus audiovisuels à la demande, même à titre secondaire, soient soumis à une contribution à cette production soit par achat de contenu soit par abondement d'un fonds », lit-on donc dans l'exposé sommaire qui accompagne l'amendement 144.
Autrement dit, des portails comme YouTube ou Dailymotion et, en allant plus loin, tout site bâtissant une partie de son contenu éditorial sur des médias vidéo, même si ces derniers sont générés par les utilisateurs, devraient participer au financement de production audiovisuelle française (voir le texte complet de l'amendement, page 146 - document PDF). Un appel à contribution dont la perspective ne séduit guère les représentants du Web français réunis au sein de l'Asic.
« Alors que le plan Numérique 2012 présenté il y a à peine quelques semaines vise à faire de la France un pays leader sur la scène de l'Internet mondiale, cet amendement constituerait un frein brutal au développement des acteurs de l'économie numérique française », constatent-ils. « Cet amendement serait d'ailleurs contre-productif en taxant le support de créateurs innovants et indépendants qui se servent d'Internet pour émerger, trouver leur public, développer une communauté de fans et être repérés par l'industrie culturelle », ajoutent-ils avant de rappeler que de telles mesures défavoriseraient les acteurs français du Web par rapport à leurs homologues situés dans d'autres pays où cette taxe n'a pas cours.
Le député Frédéric Lefebvre suggère en outre que le CSA soit habilité « à fixer les règles permettant la mise en oeuvre de tout moyen adapté à la nature » des services en ligne « afin d'assurer la protection de l'enfance et de l'adolescence ». Il suscite là encore une réaction de rejet de la part de l'Asic, qui appelle au respect de la frontière entre Internet et audiovisuel, et demande que l'on s'en tienne au cadre spécifique à Internet, instauré par la loi pour la confiance dans l'économie numérique.