Martin Rogard : «Le modèle de Dailymotion est vertueux »

Jérôme Bouteiller
Publié le 20 janvier 2009 à 17h09
Directeur France de DailyMotion, martin-rogard revient sur le modèle économique et le développement de cette plate-forme, pionnière des contenus vidéo amateurs, désormais grande ouverte aux contenus professionnels.

JB -Martin Rogard, bonjour. Des rumeurs de cessation de paiement concernant Dailymotion ont circulé l'été dernier. Comment se porte votre société ? Avez vous réalisé un nouveau tour de financement ?

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Martin Rogard
MR -Nous n'avons pas eu connaissance des ces rumeurs et Dailymotion n'a pas connu de difficultés financières ni réalisé de levée de fonds. Au contraire, nous nous approchons du seuil de rentabilité grâce au succès de notre régie publicitaire. A six chiffres en 2006, nos revenus étaient à 7 chiffres en 2007 puis à 8 chiffres en 2008 ce qui est plutôt bon signe !

Certains analystes surestiment sans doute nos coûts mais sachez par exemple que la bande passante nous revient désormais moins chère que la masse salariale. Notre modèle est donc viable et nous poursuivons sereinement notre développement.

JB -La presse économique a également évoqué des opérations de rachats manquées. Un commentaire à leur sujet ?

MR -Nous n'avons pas non plus eu connaissance de ces rumeurs, Dailymotion poursuit son développement. Que certains groupes manifestent de l'intérêt pour notre société est un autre sujet.

JB-Comment voyez vous l'année 2009 ?

MR -Notre modèle économique dépend du marché publicitaire et comme tous les médias, nous manquons de visibilité pour la fin de l'année 2009. Mais malgré la crise, ce début d'année s'annonce prometteur. Nous poursuivons nos campagnes avec de grandes marques comme Nike ou Orange, nous testons de nouveaux formats publicitaires facturés à la durée avec Alenty et nous attirons même de nouveaux annonceurs comme Guerlain ou Jaguar qui ont bien compris que plus de la moitié de notre audience avait plus de 35 ans.

JB -Estimez vous désormais faire le même métier qu'une chaîne de télévision ?

MR -Avec 900 millions de vidéos vues chaque mois, notre audience rivalise en effet avec celle d'une chaîne de télévision mais les deux modèles restent distincts. Contrairement à une chaîne dont les programmes doivent être consensuels pour séduire le plus grand nombre, Dailymotion privilégie la diffusion de vidéos répondant aux besoins d'audiences de niche. Nous avons notamment contribué au succès de la Tecktonik ou à celui de la Chanson du dimanche et nous parions désormais sur des sports peu médiatisés comme le Basket, le Judo ou la Voile mais qui sont pourtant très populaires.

JB -Êtes vous prêts à acheter des droits pour ces programmes ?

MR -Notre modèle repose d'une part sur des contenus amateurs, filmés et diffusés par les internautes, et désormais sur des contenus « officiels » fournis par des partenaires professionnels avec qui nous partageons nos revenus publicitaires. Ce modèle nous semble beaucoup plus vertueux que l'acquisition de droits car il limite les risques financiers pour la plate-forme de diffusion et il peut garantir de bonnes surprises aux ayants-droit en cas de succès de cette diffusion auprès des internautes.  

JB -Pouvez vous monétiser n'importe quel type de contenu vidéo ?

MR -Cela dépend de la durée du programme mais les programmes courts comme les clips sont effectivement rentables. Nous croyons par exemple beaucoup aux programmes pour la jeunesse que nous avons regroupés dans une nouvelle chaîne baptisée DMKids. Je suis par contre plus sceptique sur la viabilité économique d'un financement exclusif par la publicité de la diffusion de programmes longs mais certains de nos concurrents ont décidé de tenter l'expérience.

JB -Quel regard portez vous sur Youtube ou la concurrence des grands portails web ou des chaînes de télévision ?

MR -D'un point de vue publicitaire, tous ces acteurs sont effectivement des concurrents mais Youtube est sans doute le plus sérieux. Google affiche de très nombreuses publicités pour sa plate-forme dans son moteur de recherche et nous nous demandons si ce trafic, dont nous évaluons le coût à un million d'euros par mois, est ensuite refacturé à Youtube...

Nous regardons également les initiatives des chaînes comme Canal+ ou M6 avec leurs « télévisions de rattrapage », et nous serions d'ailleurs ravis de pouvoir travailler avec elles. Aux Etats-Unis, des chaînes comme Warner, MTV ou CBS n'hésitent pas à diffuser leurs programmes sur Dailymotion pour élargir leur audience.

JB -Le Conseil supérieur de l'audiovisuel aimerait contrôler ce qui est diffusé sur le web. Qu’en pensez vous ?

MR -Nous avons été parmi les créateurs de l'ASIC pour lutter contre la volonté de certains opérateurs télécoms de favoriser certains contenus au détriment d'autres et nous restons de farouches défenseurs de la liberté d'expression.

Les pouvoirs publics ont parfois une vision très négative de l'internet et nous pensons que la priorité n'est pas de contrôler des contenus mais plutôt d'encourager leur diversité comme l'a écrit Barack Obama dans son programme électoral, exemple à méditer ici.

Avec Dailymotion, la France dispose enfin d'une société capable de tenir tête à certains géants américains et il ne faudrait pas qu'à force de tout vouloir réglementer, notre pays perde ses fleurons.

JB -Martin Rogard, je vous remercie.
Jérôme Bouteiller
Par Jérôme Bouteiller

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