Serge Bussat bonjour, un an après le rachat de Navteq par Nokia, des interactions entre les deux entités sont-elles déjà en place ?
Un an après, rien n'a changé. Nous sommes gérés comme une société indépendante car nos métiers sont complètement différents. Les raisons de ce rachat sont stratégiques. Nous avons en revanche toujours des comptes à rendre à notre nouvelle maison-mère. Mais du fait que l'on ne reporte pas nos résultats financiers, nous n'avons plus la pression à court terme de Wall Street et nous pouvons investir sur le long terme. Et la tendance déjà prise depuis 2 ou 3 ans qui était d'investir dans des contenus indispensables pour la partie « wireless » a continué d'être développée.
On aurait pu penser qu'en faisant partie du groupe Nokia, nous aurions pu ralentir notre développement dans le monde du sans fil mais c'est l'inverse qui s'est produit. Chez les constructeurs de terminaux mobiles et chez les opérateurs, nous avons gagné des parts de marché. Elle est proche aujourd'hui des 80% dans la partie « wireless » car nous arrivons justement à démontrer que nous sommes réellement une entité indépendante, en travaillant en étroite collaboration avec nos partenaires sans dévoiler leurs informations précieuses. Ensuite, sur les deux fournisseurs de contenus cartographiques, nous sommes le seul à prendre clairement le virage du « wireless ». Pourtant historiquement, nous étions les plus forts sur la partie automobile.
Aujourd'hui, quel est le métier de Navteq ?
Nous sommes dans un marché extrêmement dynamique. En 2008, 60% de notre chiffre d'affaires provenait de nos contenus dans le monde de l'automobile embarquée, contre 40% du CA grâce aux GPS autonomes et à nos activités sans fil. Aujourd'hui, la situation est inversée avec une majorité de notre chiffre d'affaires qui provient des contenus pour GPS autonomes. Et je pense que le monde « wireless » prendra le dessus sur celui des GPS autonomes dans un avenir proche.
Quelles sont les grandes nouveautés qui seront disponibles dans les prochaines années chez Navteq en matière de cartographie pour mobiles ?
Elles sont au nombre de trois :
- La couverture
- La navigation piétonne
- Les contenus
On parlait de l'information trafic comme d'une "killer app" de la navigation GPS. Est-ce toujours d'actualité ?
info trafic ?
Nous voyons ça comme la deuxième roue de notre carrosse. C'est naturellement le service important lié au contenu et à la cartographie. Nous aurons des solutions de trafic en temps réel dans la majorité sociétés européennes avec des remontées d'informations auprès des opérateurs mobiles. Pour cela, nous allons mettre au point des partenariats avec des sociétés chargées de la gestion de flotte et... avec Nokia. Le lancement de cette offre est prévue cette année. Cela demande des investissements conséquents mais nous pensons que le consommateur est prêt à payer pour un tel service.
Un dernier mot sur les « killer app » de la navigation GPS. Si elles sont nombreuses, nous croyons beaucoup aux offres de conduite écologique. Dans les 12 mois qui viennent, nous tablons sur la généralisation de solutions permettant de choisir la meilleure vitesse suivant les routes et dénivelés.
L'avenir de la navigation GPS passera-t-elle par la réalité augmentée ?
C'est notre métier de fournir des informations capables de permettre aux développeurs de concevoir de tels programmes. Est-ce que l'avenir de la navigation est d'arriver avec de la « réalité jeu vidéo » ? Dans une automobile, cela peut causer des problèmes de concentration, les images trop réelles pouvant risquer de distraire le conducteur. Sur les PND et les mobiles, c'est une direction irréversible. L'annonce de Navigon en ce sens est intéressante. Il y avait des contraintes matérielles qui semblent aujourd'hui levées. Ce n'est plus qu'une question de disponibilité des contenus et nous y travaillons.
Nous allons aller dans ce sens à travers plusieurs directions : les contenus connectés et la cartographie dynamique (affichage en temps réel des modifications sur le terrain), le tout avec une ouverture des applications sur la partie navigation, la carte allant devenir un élément central dans toutes les actions de navigation sur le mobile.
Avec LocationPoint Advertising, vous avez lancé une offre de publicité mobile pour vos GPS autonomes et mobiles. Quand sera-t-elle lancée en France ?
Nous sommes convaincus que la publicité localisée sera un élément essentiel de monétisation des contenus Premium. Nos études démontrent qu'il faut d'ailleurs que l'on change ce nom, étant aujourd'hui trop perçu comme de la simple publicité. Alors qu'il s'agit d'un service donnant par exemple des alertes de proximité de certains magasins. Navteq a avancé dans ce domaine : aux USA, nous avons racheté traffic.com, le numéro un de l'information trafic temps réel et nous avons développé un vrai service Premium d'information trafic financé par de la publicité. Et ce sur différents types de terminaux et d'environnements avec une partie en broadcast et une partie en unicast. Nous avons un projet qui tourne avec Garmin aux USA qui permet d'afficher le trafic en temps réel. Il est offert et en l'utilisant, on a dans certaines conditions des messages publicitaires. Garmin a pu mesurer qu'à prix égal, ils ont des taux de vente supérieurs à des produits qui n'ont pas cette option.
En Europe, on a développé l'offre « Direct Access », pour proposer à des annonceurs d'insérer leurs logos (chaines d'hôtels, restaurants, ...) dans nos bases de données cartographiques. Nous ne sommes pas encore dans un modèle de publicité mobile mais cela permet aux annonceurs de mettre à jour en temps réel la carte par eux-même. On a créé un réseau de chaines de valeur dans la publicité. Il n'y a pas encore de projet concret que l'on peut annoncer en Europe en rapport avec l'offre LocationPoint Advertising. Nous travaillons en revanche avec des opérateurs sur le sujet et nous voulons déployer notre structure en Europe dans un avenir proche.
Serge Bussat, je vous remercie.