Thomas Husson, Forrester : "la plupart des téléphones mobiles deviennent intelligents "

Analyste Senior chez Forrester Research, Thomas Husson est l'un des auteurs de l'étude "The “Smartphone” Is Dead: Long Live Smart Phones And Smart Gadgets". Dans ce court entretien, il revient sur la notion de smartphone et les évolutions à attendre des téléphones mobiles de demain.

JB - Thomas Husson, bonjour, le terme de Smartphone est-il encore pertinent ?

TH - De moins en moins car la plupart des téléphones mobiles deviennent « intelligents » et que personne dans l'industrie ne partage réellement la même définition. Une définition reposant sur un OS ouvert qui permette d'installer des applications ou sur l'accès aux réseaux 3G par exemple ne permettrait pas d'inclure comme « smartphones » la première version de l'iPhone ou certains terminaux Blackberry. La plupart des nouveaux terminaux lancés sur le marché possèdent maintenant des lecteurs MP3 ou vidéo, des caméras de plusieurs mégapixel. Les Samsung Jet ou Pixon 12 sont de bons exemples de téléphones mobiles théoriquement vus comme des « feature phones » alors qu'ils offrent une très bonne qualité d'accès à l'Internet. Les smartphones d'hier deviennent les features phones d'aujourd'hui.

JB - Selon vous, comment faudrait il désormais segmenter le marché ?

TH - Il est vrai que toute segmentation durable est difficile car le ryhtme de l'innovation s'accélère dans l'univers de la téléphonie mobile et les nouveautés deviennent vite obsolètes impliquant presque une redéfinition constante du marché. Au-delà de l'approche traditionnelle autour de la notion de smartphone, on peut classifier le marché autour de concepts comme les terminaux basiques, media-capable ou Internet -centric (avec un browser html). Le plus important n'est pas tellement de mesurer les parts de marché des uns et des autres mais d'analyser l'usage des consommateurs en fonction du parc installé et des caractétistiques des terminaux. Il y a une différence fondamentale entre le terminal vendu, le terminal d'usage et l'usage des services multimédias mobiles. Les marques qui veulent profiter du boom des services mobiles feraient mieux d'analyser l'usage et le comportement de leurs propres consommateurs plutôt que de se focaliser sur des projections moyennes de smartphones.

JB - Selon vous, quelles seront les nouvelles frontières à atteindre pour les mobiles des années 2020 ? Les paiements ? La santé ? La bionique ? autre chose ?

TH - L'horizon 2020 paraît bien lointain quand on observe les changements intervenus en seulement un an ! Habitutellement, Forrester effectue des prévisions sur un horizon de temps de 5 ans. Sans boule de cristal, il paraît logique d'attendre d'ici une dizaine d'années une amélioration drastique des capacités des téléphones (en terme de processing power, de mémoire, de batterie) et de leur simplicité d'usage. La palette des fonctionalités et des services disponibles semble presque illimitée et il faut s'attendre à ce que la plupart des tendances PC actuelles se développent sur le mobile : cela va des réseaux sociaux (il suffit d'analyser les récentes statistiques d'usage de Facebook mobile pour s'en convaincre), du cloud computing en passant par la réalité virtuelle où le développement des contenus on-demand et les techniques les plus sophistiquées de publicité numérique. La différence est que le média mobile est plus personnel, plus interactif et plus contextuel et que ces tendances devront être adaptées aux caractéristiques uniques des téléphones mobiles. Toutes les services liées à l'identité numérique (paiement, santé, bionique) vont devenir critiques sur le mobile mais il faut rester réaliste, une technologie comme le NFC ne va s'imposer du jour au lendemain et il faudra effectivement plusieurs années pour développer par exemple les paiements mobiles sans contact. En tous cas, l'intérêt des développeurs Web pour la plate-forme mobile et le rythme sans précédent d'innovation en font clairement un des marchés les plus porteurs à l'avenir.

JB - Thomas Husson, je vous remercie.