Entre pratiques commerciales peu scrupuleuses et projets de loi visant à réglementer l'utilisation qui est faite d'Internet, plusieurs associations craignent que l'on finisse par compromettre le principe de Neutralité du Net. Dans une lettre ouverte, intialement publiée par la Quadrature du Net, elles interpellent le Parlement européen et l'invitent à défendre coûte que coûte l'idée d'un réseau dans lequel le Web est le même pour tous, indépendamment de problématiques économiques ou commerciales.
La neutralité du Net, c'est cette idée selon laquelle le tuyau qui délivre les informations doit rester strictement indépendant des contenus qu'il véhicule. L'opérateur qui décide de s'en tenir à cet impératif de neutralité ne doit donc en aucune façon privilégier, brider ou filtrer tel ou tel contenu, que la motivation soit commerciale ou politique. On le retrouve d'ailleurs dans le Code des postes et des communications électroniques, qui demande à ce que les opérateurs veillent « au respect de la plus grande neutralité possible, d'un point de vue technologique, des mesures qu'ils prennent ».
Le risque ? Il serait que l'on débouche sur un Web où l'opérateur A pourrait brider l'accès aux services et sites de l'opérateur B, voire bloquer en tournemain l'accès à un l'un de ses concurrents, ou au contraire favoriser outrageusement ses partenaires.
Inacceptable pour les signataires de cette lettre ouverte, qui commence par défendre l'idée que la neutralité du Net « a été un indispensable catalyseur de la concurrence, de l'innovation et des libertés fondamentales dans l'espace numérique ». Elle stimulerait par ailleurs « le cercle vertueux d'un modèle de croissance fondé sur le développement d'un réseau de communication commun qui permet de nouveaux usages et de nouveaux outils ».
Aujourd'hui, ils estiment ce principe menacé par des opérateurs et producteurs de contenus « qui voient une opportunité de créer de nouveaux modèles économiques basés sur la discrimination, le filtrage et la priorisation des informations circulant sur le réseau », et souhaitent que dans le cadre du Paquet télécoms, le Parlement européen prenne des mesures fermes « afin de garantir un Internet libre, ouvert et innovant, et à ainsi sauvegarder les libertés fondamentales des citoyens européens ».
Diffusée en anglais, au niveau européen, la lettre a recueilli la signature des représentants d'association comme l'April, l'Isoc, UFC Que Choisir ou Framasoft. Elle intervient quelques mois après que Google, Skype et Yahoo ont fait réaliser sur le Vieux continent un sondage lié à cette question. Directement concernés par la question, ils étaient alors arrivés à la conclusion que 90% des mille personnes sondées tenaient à ce que leur fournisseur d'accès ne restreigne pas leur accès au Web.
On trouvera la lettre d'origine ainsi que la liste des signataires sur le site de la Quadrature du Net, ainsi qu'une traduction en français chez l'April.