L'hydrogène sera-t-il le carburant de demain pour l'aviation civile ? Les spécialistes se penchent sérieusement sur la question.
L'aviation civile, souvent pointé du doigt pour le rôle délétère qu'elle joue dans le réchauffement climatique et pour ses émissions de gaz à effet de serre, est aujourd'hui à un carrefour. Rien qu'à l'aéroport d'Heathrow de Londres (deuxième aéroport européen en nombre de passagers), ce sont 20 millions de litres de kérosène qui sont consommés quotidiennement pour assurer le décollage de plus de 1 000 avions. Alors que la recherche d'alternatives écologiques plus durables devient urgente, l'hydrogène émerge comme une solution envisageable. Si certains prototypes comme le H2FLY sont déjà convaincants, peut-on réellement considérer ce carburant comme une réponse viable ?
Le carburant durable, un enjeu de plus en plus pressant
Certains aéroports, comme celui d'Heathrow, se retrouvent au cœur de cette réflexion. Matt Prescott est chef de la stratégie carbone au sein du gigantesque aéroport londonien, et il explique que le défi est de taille :
« La quantité de carburant qui passe par Heathrow est énorme. C'est environ la moitié des besoins en kérosène du Royaume-Uni ». Au Royaume-Uni, le « Jet Zero Plan » a pour ambition d'atteindre le zéro émission d'ici 2040 pour l'aviation civile.
Aux États-Unis, même objectif, mais pour l'année 2050. De même pour l'Union européenne avec le plan « Destination 2050 ». On pourrait se dire que le temps ne presse pas, mais c'est faux. C'est pourquoi aujourd'hui l'industrie aérienne planche sur l'exploration de diverses alternatives de carburants d'aviations durables, les SAF (Sustainable Aviation Fuel). Des carburants qui ne proviennent pas d'énergie fossile. Toutefois, au regard du contexte actuel, les produire en quantité suffisante et à un coût abordable reste pour le moment du domaine de l'hypothétique.
L'hydrogène, une piste prometteuse ?
Contrairement au kérosène, l'hydrogène ne produit pas de CO2 lorsqu'il est utilisé en carburant, en revanche, pour ce qui est de sa production, c'est une autre histoire. Il suscite un intérêt croissant pour son usage dans son aviation civile, mais les défis techniques à surmonter sont encore considérables. Notamment, la nécessité d'opérer un refroidissement à -253°C pour le faire passer à l'état liquide. L'entreprise de renom Air Liquide (qui a travaillé sur les fusées Ariane de l'ESA) collabore actuellement avec Group ADP et Airbus pour que la technologie soit adaptée à l'aviation.
Même si l'exemple cité plus haut d'H2Fly est encourageant, ce n'est qu'un prototype. Installer des infrastructures de stockage et de distribution d'hydrogène dans les grands aéroports est une autre paire de manches, puisque le coût global est estimé à un milliard de dollars par aéroport. Une somme très importante, estimée par le cabinet de conseil en stratégie et management Bain & Company.
Si le défi paraît de prime abord difficilement surmontable, des start-up sont déjà à l'œuvre pour proposer des alternatives plus économiques. C'est le cas d'Universal Hydrogen par exemple, qui travaille sur des modules de stockage d'hydrogène liquide transportables par camion et que l'on peut directement intégrer aux avions. Le chemin est encore long et semé d'embûches, mais l'industrie aéronautique est en mouvement !
Sources : BBC, Destination 2050