La caisse des allocations familiales ne sort pas de la panade. Après des accusations de discriminations envers certains allocataires en novembre dernier, les pratiques de la CAF font maintenant l’objet d’une lettre ouverte adressée au Premier ministre.
Dénonçant des « situations de non-droit » ainsi que de la « maltraitance institutionnelle », la lettre ouverte adressée au Premier ministre Gabriel Attal ne mâche pas ses mots. Signé par une trentaine d’associations, dont Emmaüs France, La Quadrature du Net, la Ligue des Droits de l’Homme ou la Fondation Abbé Pierre, ce courrier exige du Premier ministre des changements par rapport aux récentes révélations concernant la Caisse Nationale des Allocations Familiales.
Des « dérives liées à la dématérialisation »
En fin d’année dernière, la Quadrature du Net et le journal Le Monde levaient le voile sur « un système de surveillance de masse particulièrement pernicieux » mis en place par les différentes CAF pour mieux cibler les contrôles en cas de soupçon de fraude. Problème, cet algorithme serait biaisé et particulièrement prompt à épingler « les personnes en situation de précarité », notamment les mères célibataires ou les personnes touchant l’Allocation Adulte Handicapé (AAH).
Si la CAF s’est depuis défendue en expliquant que cet algorithme servait à « classer les dossiers » plutôt qu’à surveiller les allocataires, les critiques ne se sont pas tues pour autant. Dans cette lettre ouverte publiée le 6 février, les associations dénoncent encore l’emploi d’un « algorithme discriminatoire de ciblage des contrôles » et pointent des « dérives liées à la dématérialisation ». Parmi ces problèmes, les signataires pointent « l’absence d’interlocuteurs physiques suffisants dans les accueils des CAF » et « une déshumanisation des relations. »
Un algorithme de « scoring » contraire au RGPD
Pour mettre fin à cette situation, La Quadrature du Net, Emmaüs et tous les autres demandent donc à ce que « les algorithmes de notation » soient mis au placard et qu’un « contrôle de légalité indépendant » soit mis en place pour vérifier que les outils informatiques employés par les organismes départementaux soit conformes au Code des relations entre le public et l’administration.
Le RGPD est également cité, accompagné de l’arrêt « SCHUFA » de la cour de justice de l’Union européenne qui établit, sur l’autel de la loi européenne pour la protection des données, une interdiction des « décisions individuelles automatisées » qui portent « un rôle déterminant dans le cadre de l’octroi de crédits ».
Les signataires demandent également la fin des « suspensions automatiques de droits » et défendent l’accès « à un interlocuteur physique en cas de difficultés ». Bref, une dématérialisation qui ne se fait pas aux dépens de l’humain.
Source : collectif Changer de Cap