Pensant faire une bonne affaire, les victimes ignoraient qu'elles contractaient un prêt.
Bien mal acquis ne profite jamais, c'est peut-être ce que s'est dit cet homme de 48 ans après que le verdict concernant l'accusation d'escroquerie et de banqueroute à son encontre a été rendue par le tribunal correctionnel de Béziers. Il a également été condamné à de la prison avec sursis, à une interdiction de gérer une entreprise ainsi qu'à verser des dommages et intérêts à ses 900 victimes à travers toute la France.
Les faits remontent à 15 ans en arrière. Se faisant passer pour un concepteur de sites internet, cet homme proposait ses services à des artisans ou des commerçants en échange de publicités. Sur le papier, l'offre paraissait alléchante, à ce détail près que le contrat de conception web était en réalité une souscription à une offre de prêt.
Une méthode de phishing à l'ancienne
« Le mode opératoire consistait, pour l’essentiel, à faire souscrire aux victimes des contrats de conception de site web supposément financés par l'hébergement de publicités sur ce site, rendant l'opération neutre pour le client », décrit Raphaël Balland, procureur de la République de Béziers.
Les victimes, malgré tout prélevées de sommes importantes, ont compris bien trop tard qu'elles avaient été abusées. Et pour cause, comme l'indique le procureur, « la conception du site web était en réalité adossée à la signature d’un contrat de financement avec un organisme de crédit ». La signature était obtenue par l'usage d'opérations frauduleuses telles que l'imitation de la signature du client, le postdatage des contrats ou la fourniture d'un faux site web.
Ce modus operandi n'est rien d'autre qu'une méthode de phishing, qui fait de nos jours des ravages. Récemment, une enquête sur l'arnaque au faux conseiller bancaire a révélé que les escrocs pouvaient gagner jusqu'à 3 000 euros par semaine.
Le volet financier de l'affaire révèle un fonctionnement fort simple. La société de location d'encarts publicitaires destinés au Web de l'accusé n'employait aucun salarié et ne comptait pour seul client que la société de création de sites internet. Les sommes escroquées étaient ensuite virées sur les comptes d'une société tierce appartenant à l'escroc et située au Maroc.
Rattrapé par la justice au bout de 15 ans
En 2011, le tribunal judiciaire de Béziers a ouvert une information judiciaire. Les investigations, menées par plusieurs juges d'instruction successifs, ont révélé que des centaines de victimes à travers toute la France avaient porté plainte dès 2009.
Au total, ce sont des centaines de sociétés, d'entreprises unipersonnelles et d'artisans qui estimaient avoir été escroqués par le biais des deux sociétés de cet individu, Odevia et Publiciweb. Au cours des diverses enquêtes et juges qui se sont succédé durant toutes ces années, 900 victimes ont pu être identifiées.
Aujourd'hui, fort heureusement, et avec la transposition de ce type d'escroquerie physique sur le Web, les outils et moyens de prévention et de défense mis à la disposition des usagers sont de plus en plus perfectionnés. Des antivirus qui marquent les méthodes des hackers à la culotte pour renforcer leurs systèmes de protection à la création par le gouvernement de Cybermalveillance.gouv, qui permet de porter plainte en ligne plus rapidement, l'artillerie lourde est déployée pour lutter contre la cybercriminalité.
Les 21 et 22 mars 2024, plus de 15 ans après le dépôt des premières plaintes, l'homme de 48 ans a été jugé pour ces faits par le tribunal correctionnel de Béziers. Accusé d'escroquerie et de banqueroute, il a été condamné à deux ans de prison avec sursis ainsi qu'à l'interdiction de gérer une entreprise pendant 15 ans. Le tribunal correctionnel biterrois a également condamné l'homme à verser plus de 100 000 euros de dommages-intérêts aux victimes s'étant constituées parties civiles lors de ce procès.
29 mars 2024 à 10h20
Source : Franceinfo