L'Arkansas cache dans ses profondeurs un trésor minéral qui pourrait redessiner la carte mondiale du lithium : des chercheurs américains viennent d'identifier dans les eaux souterraines de cet État du Sud un gisement colossal, capable de satisfaire jusqu'à neuf fois la demande mondiale prévue pour les batteries de voitures électriques en 2030.
Dans les entrailles d'une mer ancienne, ensevelie sous l'Arkansas méridional, sommeille peut-être la clé de la transition énergétique américaine. Une vaste étude, menée conjointement par des équipes de recherche fédérales et locales, vient de mettre en lumière un gisement de lithium aux proportions titanesques. Ce dernier était enfermé dans les eaux salées d'un aquifère calcaire (réserve d'eau souterraine stockée dans des roches calcaires poreuses) connu sous le nom de formation Smackover.
L'intelligence artificielle dévoile un trésor enfoui
Pour cartographier ce potentiel minier jusqu'alors insoupçonné, les chercheurs ont déployé les dernières avancées en matière d'intelligence artificielle. Leur modèle d'apprentissage automatique, nourri de données géologiques, géochimiques et thermiques de la région, a révélé des chiffres vertigineux : entre 5,1 et 19 millions de tonnes de lithium dissous dans ces saumures profondes. Une estimation qui représenterait jusqu'à 136 % des ressources actuellement recensées sur le territoire américain, de quoi réduire considérablement la dépendance du pays aux importations de ce métal stratégique.
En effet, les USA dépendent encore de trois pays pour disposer de cette ressource : la Chine est un fournisseur majeur des États-Unis, tout comme l'Australie et le Chili.
Une exploitation potentiellement plus respectueuse de l'environnement
Contrairement aux mines à ciel ouvert qui défigurent les paysages ou aux bassins d'évaporation énergivores (comme dans le Salar d'Uyuni en Bolivie), l'Arkansas a un atout majeur dans sa poche. L'industrie du brome y exploite déjà les saumures selon un procédé d'extraction et de réinjection. En 2022, ces activités ont permis de remonter à la surface quelque 5 000 tonnes de lithium dissous. L'extraction de ce métal stratégique pourrait ainsi s'intégrer dans ce circuit déjà existant, limitant théoriquement son impact environnemental.
Toutefois, Patrick Donnelly, biologiste au Center of Biological Diversity, tempère cet optimisme : « Nous soutenons les véhicules électriques et le stockage par batteries dans la transition énergétique, mais il n'existe pas de solution miracle. L'extraction directe du lithium a des répercussions ».
La découverte de ce gisement intervient dans un contexte de demande de lithium galopante, notamment portée par l'industrie automobile. Selon l'Agence Internationale de l'Énergie, les batteries de véhicules électriques ont représenté 85 % de la consommation mondiale de lithium en 2023, une hausse de 30 % par rapport à l'année précédente.
Si cette découverte laisse entrevoir un avenir prometteur pour l'industrie américaine du lithium, le chemin vers une exploitation à grande échelle reste encore cahoteux. Les défis techniques sont considérables : le pompage et le traitement des saumures de Smackover nécessiteront des volumes d'eau et d'énergie colossaux. La gestion des résidus salins, inhérents au processus d'extraction, posera également des questions environnementales complexes. Par ailleurs, transformer cette ressource souterraine en production industrielle demandera des années d'efforts et des investissements massifs en infrastructure. Un vrai marathon technologique, environnemental et financier.
Source : Science Alert