Un essaim de robots miniatures, conçus pour résister aux chocs les plus violents et capables de s'adapter à tous les terrains : voici la nouvelle trouvaille des chercheurs de l'Université Tufts (Medford, Massachusetts).

Catastrophes naturelles, zones de conflits : tout autant d'endroits où il peut s'avérer très complexe de venir secourir des personnes en danger. Même si les techniques de sauvetage ont largement évolué depuis plusieurs décennies, les équipes de secours se voient parfois confrontées à des situations dans lesquelles elles ne peuvent intervenir correctement en raison de l'impraticabilité des terrains.
Si l'IA peut prédire certaines catastrophes ; risques d'inondation ou de feux de forêts ; elle ne pourra jamais intervenir directement sur le terrain. C'est ici que la robotique rentre en jeu : car elle offre un potentiel considérable pour améliorer l'efficacité et la sécurité des opérations de secours.
Nous avions traité l'an dernier le développement de ce robot-plante, capable de se faufiler comme un serpent dans des terrains complexes. L'Université Tufts propose une approche radicalement différente : des robots miniaturisés, imprimés en 3D, capables d'agir en équipe. Les résultats de leurs travaux ont été publiés le 7 février dans Nature Communications.
L'intelligence collective : un atout à exploiter en robotique
Le professeur Markus Nemitz, spécialiste en génie mécanique à l'Université Tufts, a ainsi développé avec son équipe des robots de la taille d'une paume de main. Ces machines, conçues pour opérer en groupe, partagent leurs données et adaptent leur comportement selon les conditions du terrain. Une innovation qui trouve son origine dans les travaux de thèse de Nemitz sur la robotique en essaim.
Concrètement, c'est un domaine de la robotique qui s'inspire du comportement des essaims naturels, comme ceux formés par les fourmis ou les abeilles. L'objectif est de concevoir des systèmes composés de nombreux robots simples qui collaborent pour accomplir des tâches complexes. Au lieu d'avoir un seul robot très sophistiqué, on utilise alors une multitude de petits robots. Chacun est capable de réaliser des tâches simples, mais en communiquant entre eux, ils peuvent agir plus efficacement qu'un robot seul.
« Pendant des années, nous avons créé des algorithmes pour contrôler de grands groupes de robots, mais il n'existait pas de systèmes robotiques réels pour les tester », explique le chercheur. Cette observation l'a conduit à développer, aux côtés de l'étudiant en doctorat Cem Aygül, un prototype robuste et économique, presque entièrement fabriqué par impression 3D.

Une anatomie inspirée du vivant
Les concepteurs ont ainsi conçu leurs robots autour d'une architecture biomimétique. Une approche complètement opposée de celle de Boston Dynamics qui conçoit ses différents robots avec d'éléments rigides (le très agile Atlas, ou son petit robot-chien Spot, par exemple). Ils intègrent, à l'inverse, des composants souples et semi-rigides. Une conception particulière qui leur permet de survivre à des contraintes extrêmes : ils peuvent chuter d'un hélicoptère ou se faire rouler dessus par une voiture et continuer de fonctionner sans problème.
Les membres des robots sont construits selon un principe proche de l'anatomie des mammifères : des structures semi-rigides reliées par des articulations souples, exactement comme l'association entre les os et le cartilage. Ils sont donc très agiles en terrains accidentés, sur le sable ou les pentes abruptes et peuvent se mouvoir plus fluidement que leurs homologues entièrement rigides.
Leur fabrication nécessite une imprimante 3D, capable de déposer simultanément différents matériaux, permettant de produire plusieurs centaines d'unités par jour. Seule l'intégration des composants électroniques nécessite encore une intervention manuelle, une étape appelée à être automatisée à l'avenir.
En théorie, on pourrait donc envoyer ces robots en intervention dans des environnements très dangereux pour l'Homme. Le professeur Nemitz évoque la triste histoire du sauvetage d'une équipe de jeunes footballeurs thaïlandais dans la grotte de Tham Luang Nang Non en 2018. Une opération de secours qui a duré 18 jours, où tout le monde fut sauvé, mais l'étroitesse des passages, la profondeur de l'eau et le manque d'oxygène a largement complexifié l'intervention.
« Aucun robot existant ne pouvait accéder aux victimes en raison de la combinaison de passages étroits, de surfaces rocheuses et d'environnements sous-marins. Notre technologie permettrait d'imprimer rapidement des robots adaptés à ces conditions spécifiques », explique Nemitz.
Espérons donc que ces petits robots sortiront un jour de leur phase d'expérimentation et qu'ils puissent être déployés à grande échelle. En attendant, les chercheurs poursuivent actuellement leurs travaux pour que leurs machines puissent être utiles à deux autres domaines : la surveillance des glaciers et le déminage.
Source : Futurity