Une décision du Conseil d'État a mis fin aux espoirs des propriétaires de meublés touristiques qui pensaient échapper à la fiscalité des résidences secondaires, grâce à une location intensive sur les plateformes comme Airbnb.

En France, la justice administrative a définitivement tranché un litige fiscal qui concerne directement les propriétaires de logements destinés à la location de courte durée. Un couple du Finistère, gestionnaire de trois gîtes loués sur Airbnb et Abritel, a vu sa contestation de la taxe d'habitation 2022 définitivement rejetée par le Conseil d'État il y a quelques semaines, malgré une première victoire devant le tribunal administratif de Rennes. Voyons pourquoi.
Une couple qui louait ses gîtes sur Airbnb et Abritel cherchaient à échapper à la taxe d'habitation
Rappelons que si la taxe d'habitation a été supprimée pour les résidences principales, elle continue de s'appliquer aux résidences secondaires. Selon le Code général des impôts, c'est normalement l'occupant d'un logement au 1er janvier qui doit s'acquitter de cette taxe. Cependant, une exception existe pour les locations saisonnières : le propriétaire devient redevable s'il « peut être regardé comme entendant en conserver la disposition une partie de l'année ».
Le couple en question, qui possède trois gîtes à Cast dans le Finistère, avait bâti sa défense sur un argument qui semblait solide. Leurs biens affichaient des taux d'occupation si élevés, qu'il paraissait impossible qu'ils aient envisagé, au 1er janvier 2022, de s'en réserver l'usage personnel à un moment quelconque de l'année. Cette stratégie visait à échapper à l'application de l'article 1415 du Code général des impôts et donc, échapper au paiement de la taxe d'habitation.
Comme l'explique Capital, l'argumentation avait convaincu le tribunal administratif de Rennes qui, le 29 décembre 2023, avait donné raison aux propriétaires. Pour les juges rennais, l'importance de l'activité locative démontrait bien que les gîtes ne pouvaient être considérés comme des résidences secondaires classiques dont le couple conserverait partiellement la disposition.
Il n'en fallait pas plus pour que le ministère de l'Économie forme un pourvoi devant le Conseil d'État, le 27 février 2024. Bercy estimait que le taux d'occupation, aussi élevé soit-il, ne constituait pas un critère pertinent pour déterminer l'intention des propriétaires quant à la disposition de leurs biens. Qu'a bien pu dire le Conseil d'État ?
Le critère décisif du Conseil d'État sur la taxe d'habitation des meublés touristiques
Dans son arrêt du 23 décembre 2024, le Conseil d'État a contredit le juge de première instance et donné raison à l'administration fiscale, en introduisant un critère déterminant. Il a indiqué que même avec une activité locative intense, les propriétaires conservent toujours « la latitude d'accepter ou de refuser, à leur gré, les propositions de courts séjours », qui leur sont adressées via les plateformes Airbnb, Abritel et autres.
Ce que cela veut dire, c'est que cette liberté fondamentale permet aux propriétaires, s'ils le souhaitaient, de bloquer certaines périodes pour leur usage personnel, comme les week-ends de la Pentecôte ou de l'Ascension. Le Conseil d'État a ainsi jugé que le tribunal administratif de Rennes avait « commis une erreur de droit » en se focalisant uniquement sur le volume des locations effectivement réalisées.
Cette décision vient faire jurisprudence pour l'ensemble des propriétaires de logements destinés à la location saisonnière en France. Elle établit clairement que seule l'absence totale de possibilité légale ou contractuelle de disposer du bien pourrait justifier une exonération de la taxe d'habitation. Pour tous les autres cas, même avec une occupation locative quasi-permanente, l'impôt reste dû dès lors que le propriétaire conserve théoriquement le droit d'utiliser son bien. Vous voilà prévenus.