Serge Le Roux "le télétravail permet une gestion plus fine des ressources de l'entreprise"

Jérôme Bouteiller
Publié le 30 octobre 2007 à 14h00
Administrateur de l'Association Francaise du Télétravail et des Téléactivités (AFTT), serge-le-roux présente ce nouveau mode d'organisation du travail.

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Serge Le Roux
JB - Serge Le Roux, bonjour. Comment est née l'idée de l'AFTT et que représentez vous aujourd'hui ?

SL - L'AFTT est née au milieu des années 1990, dans la vague d'intérêt qu'avait alors suscité le télétravail (programme gouvernemental d'aménagement du territoire, appel d'offres de la Datar, rapport Breton, colloque de Sophia-Antipolis, festival de Serre-Chevalier, etc.). L'association a ensuite continué à développer ses activités, tant au plan national où un désert s'est, malheureusement, progressivement installé, qu'au niveau européen où, par contre, d'importantes avancées ont eu lieu, en particulier de nombreux programmes de recherche, des rencontres annuelles des diverses structures agissant dans le domaine (la dernière de ces rencontres a été organisée à Paris, par l'AFTT, en 2001, dans les locaux du ministère des Finances). Aujourd'hui, l'association regroupe une vingtaine de spécialistes ; elle vient d'adopter un ambitieux programme de réorganisation et de développement.

JB - Que représente le télétravail en France ? Selon vous, quels sont ses avantages, tant pour l'employeur que pour le salarié ?

SL - Alors que cette forme de suppression des distances dans l'organisation du travail connaît une progression régulière dans les autres pays développés, elle reste encore confidentielle dans notre pays. Les raisons qui pourraient expliquer cette absence d'intérêt sont assez mystérieuses, dans la mesure où le télétravail peut présenter des effets réellement bénéfiques pour l'ensemble des intervenants dans la vie économique :

- pour les chefs d'entreprise : le télétravail permet une gestion plus fine des ressources de l'entreprise, en particulier par l'incitation renforcée à l'introduction de l'obligation de résultat dans les actes de travail, ainsi que des réductions de coût, dans l'immobilier par exemple ;

- pour les salariés : les gains sont à trouver dans la réduction des déplacements domicile -lieu de travail, dans la meilleure maîtrise du temps et du travail.

JB - Le télétravail peut-il également servir l'intérêt général, notamment dans le combat contre le réchauffement climatique ?

SL - Il paraît assez improbable que la question des effets d'une réduction sensible des déplacements professionnels n'ait pas été prise en compte par le Grenelle de l'environnement. Sans vouloir polémiquer avec les responsables de cette réflexion collective, on peut toutefois rester perplexe sur l'impact d'un certain nombre de mesures proposées, alors même que les déplacements professionnels constituent une des premières causes d'émission de gaz à effet de serre !

JB - Malgré des initiatives comme celle de Renault l'année dernière, le télétravail peine à s'imposer. Selon vous, quels sont les freins ? Frilosité des employeurs ? Désintérêt des pouvoirs publics ? Equipement informatique ou télécom insuffisant ?

SL - Quand on pose la question, c'est un peu la patate chaude : les employeurs pensent que les salariés n'en veulent pas, particulièrement le management intermédiaire ; les salariés soupçonnent un mauvais coup de la direction, en termes de contrôle accentué sur leur travail, d'isolement. On ressent ici les conséquences de l'absence de débat public sur la question. alors même qu'un accord national (et aussi européen) interprofessionnel existe sur le sujet, signé par la totalité des organisations syndicales d'employeurs et de salariés !

JB - Faut-il envisager une réforme du code du travail ou des incitations fiscales pour y remédier ?

SL - Le droit du travail a correctement intégré les caractéristiques du télétravail : le problème n'est pas là. La question vient d'être posée par la Diact : comment plus de dix ans d'efforts de promotion du télétravail n'ont-ils pas permis d'obtenir plus de résultats ?

La réponse est sans doute à trouver dans l'absence de conception et de mise en ouvre d'une politique volontariste par les administrations publiques (il existe quelques collectivités, comme par exemple le département du Cantal, qui avancent sérieusement) ; si cet obstacle disparaît, on peut, bien sûr, envisager des incitations financières ou fiscales, et aussi des mesures facilitatrices, en matière d'aides, de conseils, de formation, d'études et de recherches...

JB - Serge LEROUX, je vous remercie.
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