Le secteur audio n'est pas une nouveauté chez Ikea, du moins pas tout à fait. Son actuelle gamme Symfonisk comprend par exemple trois enceintes connectées assez réussies, sous environnement Sonos. Mais avec cette platine vinyle, présentée dans la gamme "home-studio" Obegränsad en partenariat avec Swedish House Mafia, la marque prend en marche le train d'une mode plus nostalgique que technologique.
La platine Ikea Obergränsad s'affiche comme un modèle clé en main, au design très scandinave (épuré), abordable (130 euros) mais pas cheap pour autant. Une platine parfaite pour qui n'a pas des centaines d'euros à investir ?
- Design réussi
- Bonne qualité sonore
- Simplicité de l'alimentation
- Fabrication globalement sérieuse
- Pas de cache-poussière
- Plateau en plastique
- préampli non-débrayable
Un amour de plastique, sérieux, mais pas sans poussière
Difficile de trouver une platine de conception un tant soit peu premium dans les 100 – 200 euros. Pour ces tarifs, la fabrication est généralement supérieure aux références vraiment gadget, mais les châssis se limitent presque exclusivement à du plastique de plus ou moins bonne qualité. Pour monter en gamme, et voir apparaitre du contreplaqué, du MDF (ce qui n'est pas pourtant pas luxueux), des placages en bois véritable, et du métal, il faut mettre la main au portefeuille.
Sur ce point, Ikea ne révolutionne pas les habitudes, et mise surtout sur le design. Celui-ci est plutôt original, car il dessine un petit carré de 30 x 30 cm, pour une épaisseur inhabituellement élevée de 13 cm. Si l'on oublie son épaisseur, la platine prend très peu de place par rapport à un modèle classique, bien que la marque triche un peu, le plateau de rotation étant ici débordant. Autre particularité, le ton noir mat, totalement en accord avec le code couleur de la gamme Obegränsad.
Malgré la faible densité de l'ensemble (poids d'environ 1,75 kg), due à cette conception tout plastique du châssis, la platine Ikea ne donne pas une mauvaise impression. En effet, elle ne laisse trainer presque aucun élément susceptible de faire "tache". On ne retrouve pas de bouton claquetant, de commutateurs trop lâches, et autres classiques de modèles dans ces gammes de prix. Les deux seuls boutons/commutateurs présents, respectivement dédiés à la fonction marche/arrêt du moteur, et à la vitesse (33 ou 45 tours), sont particulièrement fermes. Même bonne impression pour les connectiques, que ce soit la sortie stéréo RCA ou l'entrée USB-C dédiée à l'alimentation.
Une chose est un peu plus perturbante : la présence d'un plateau de rotation en plastique, et non en aluminium ou en résine. Ces matériaux sont pourtant courants, même sur des platines autour de 150 euros. L'usage d'un plastique pas spécialement épais n'affecte pas nécessairement la planéité dudit plateau, mais n'inspire pas forcément confiance.
À l'inverse, le bras de lecture est plus sérieux que la moyenne. Il s'agit d'une référence assez dense en aluminium anodisé noir, plutôt robuste de prime-abord.
Dernier point à relever, et plus gros défaut pratique de l'appareil : l'absence de capot cache-poussière. Cet accessoire brise souvent l'unité esthétique des platines, mais reste un indispensable pour ne pas passer le plumeau tous les deux jours. Sans surprise, la platine Ikea attrape rapidement toutes les poussières, phénomène amplifié par son côté noir mat. Au chapitre des petits détails, nous pouvons relever l'absence de palet centreur pour les disques 7 pouces, même si cet accessoire s'adresse à une niche, et ne coûte pas grand-chose à l'achat.
Simplicité des usages, pour s'adresser à tout le monde
On aurait pu croire qu'Ikea, afin de s'adresser à un public technophile, propose une platine automatique, avec des fonctions spéciales de type émetteur Bluetooth.
Rien de tout ça ici, puisque la platine n'a aucune automatisation : le bras ne vient pas se placer au démarrage d'un disque, et ne se lève pas en fin de disque. Tout passe par le classique système de levier. On ne retrouve pas non plus de puce Bluetooth, ni de sortie USB pour un raccordement sur PC (extraction du vinyle).
Non, l'intérêt de la platine est clairement sa simplicité, à l'image de son design épuré. Ce modèle à entrainement par courroie s'alimente par exemple via une simple prise USB-C, avec un chargeur de smartphone ou de tablette. Nous n'avons pas essayé toutes les puissances de chargeur, mais un simple ampérage de 2 A (10 W) est déjà suffisant pour alimenter correctement l'Obegränsad.
Autre signe de simplicité, l'étage de préamplification phono (RIAA) intégré dans l'appareil. Il est donc possible de relier directement l'appareil à un amplificateur classique, ou des enceintes actives. Le seul petit défaut ici est que cet étage phono n'est pas désactivable, il n'est donc pas possible de raccorder son propre préampli phono à l'appareil.
Enfin, point que nous avons déjà évoqué, le passage de la vitesse 33 tours à 45 tours s'effectue via un simple commutateur, et non en déplaçant la courroie, ce qui est une bonne chose. Encore une fois, la platine Ikea se concentre sur l'immense majorité des disques du marché, et fait l'impasse sur la lecture des vieux disques Shellac, à savoir les 78 tours.
Concernant l'unité de lecture, Ikea mise clairement sur le fait que l'acheteur ne sera pas du genre à upgrader sa cellule phono. Si un changement de cellule reste possible, grâce à sa fixation au standard ½" (fixation via deux vis par le haut), il n'est possible de régler, sur le bras de lecture, ni le contrepoids ni l'antiskating. Pour rappel, le contrepoids permet de contrebalancer le poids de la cellule, afin de trouver la bonne force d'appui du stylet de la cellule sur les sillons du vinyle. L'antiskating permet d'uniformiser la force d'appui entre le bord droit et le bord gauche du sillon, le bras de lecture ayant naturellement tendance à davantage appuyer vers l'intérieur lors de la rotation du disque.
Ici, tout est préréglé pour la cellule utilisée : une Audio-Technica AT 3600L. Il s'agit d'un petit classique pour les platines d'entrée et de milieu de gamme. Cette cellule est vendue à 30-35 euros (pas négligeable dans le coût de la platine donc), et s'appuie sur une architecture de type aimant mobile (MM), de loin la plus répandue.
Un son largement à la hauteur
On juge plus facilement une platine sur ses défauts sonores que sur ses qualités. Sur ce point, l'univers vinylique est particulièrement fascinant puisque représente l'exemple même de la confrontation entre ressenti et qualité objective. Nous nous garderons bien de polémiquer à ce sujet, mais gardons à l'esprit qu'au seul niveau des caractéristiques techniques, le vinyle est loin de pouvoir rivaliser avec ce qui existe dans le domaine numérique actuellement, lossless et Hi-res en tête, que ce soit en termes de dynamique (ou plutôt de rapport signal/bruit), de distorsion, ou de séparation des canaux. De plus, l'immense majorité des albums actuels sont enregistrés sur des supports numériques. Reste que sa qualité peut être considérée comme largement suffisante pour profiter d'une excellente qualité d'écoute, et que ce support n'a pas vraiment connu les dérives du CD en matière de mixage (la fameuse loudness war). Il reste important de rappeler une évidence trop souvent ignorée : la qualité du mixage est une immense partie du problème, bien avant le support utilisé ou les codecs employés.
La platine Ikea fait exactement ce que l'on attend d'une platine bien réglée, dotée d'une cellule de bonne qualité. On ne retrouve pas ici de défaut marquant, comme un mauvais angle d'attaque, une inconsistance du moteur, ou encore une mauvaise planéité du plateau. Au contraire, l'Ikea Obegränsad fonctionne parfaitement, et le préampli phono est très bien adapté à la cellule Audio-Technica. Cette dernière met en avant une caractéristique du constructeur sur les cellules "abordables", à savoir une signature sonore légèrement chaude, par opposition au côté un peu plus aigu des cellules Ortofon, l'autre grand constructeur dans cette gamme de prix.
Le son est agréable, très passe-partout, un peu rond, avec une scène sonore pas extrêmement ample, mais déjà assez profonde. La platine s'est très bien comportée avec l'ensemble des petites et grosses enceintes associées, des Borea BR02 (enceintes bibliothèques) de Triangle jusqu'aux exceptionnelles LS60 (actives) de Kef. En bref, une très bonne qualité, largement à la hauteur des autres références autour des 200, voire 250 euros type Audio-Technica AT-LP60X, Sony PSLX310BT, et autres Pro-Ject Primary E. Bien sûr, celles-ci gardent des avantages au niveau des réglages et de la construction.
Sans révolutionner le monde de la platine d'entrée de gamme, Ikea propose avec son Obegränsad un modèle à la fois design et très cohérent, doté d'une bonne qualité sonore. Mis à part sa pauvreté en matière de fonctions annexes, et quelques manquements formels, l'appareil est une belle réussite.
- Design réussi
- Bonne qualité sonore
- Simplicité de l'alimentation
- Fabrication globalement sérieuse
- Pas de cache-poussière
- Plateau en plastique
- préampli non-débrayable
- Design réussi
- Bonne qualité sonore
- Simplicité de l'alimentation