Lundi, le président de la République a appelé à un débat parlementaire sur le recours à une application pour enrayer la propagation du coronavirus. Mais cette idée n'est pas du tout du goût de l'association La Quadrature du Net, qui craint de voir les libertés individuelles piétinées par un dispositif qui ne serait pas forcément efficace.
Dans son allocution de lundi dernier, Emmanuel Macron a évoqué la possibilité de lancer une application de traçage numérique, afin de lutter contre la pandémie actuelle. Baptisée StopCovid, elle s'appuierait sur la technologie Bluetooth et le volontariat, pour indiquer à l'utilisateur s'il a été en contact avec une personne infectée par le coronavirus. Le chef de l'État a également exprimé sa volonté de voir cette solution faire l'objet d'un débat parlementaire, dans le but de protéger les libertés individuelles.
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Une efficacité remise en question
C'est justement ce dont doute La Quadrature du Net (LQDN). L'association de défense des citoyens a en effet manifesté son hostilité à l'application sur son site. Elle y détaille ses arguments, qu'elle déclare avoir envoyés aux députés et aux sénateurs.En premier lieu, selon LQDN, l'utilité de StopCovid est loin d'être prouvée. Pour être véritablement efficace, il faudrait ainsi que l'application soit installée par au moins 60 % de la population. Un chiffre qui paraît utopique à l'organisation, citant notamment l'exemple de Singapour, dont l'équivalent n'avait été utilisé que par 16 % des habitants.
De plus, l'association dénonce des « résultats trop vagues ». Ceux-ci dépendraient en effet des déclarations des utilisateurs, ainsi que de la portée du Bluetooth, qui varierait selon les appareils. Des imprécisions qui pourraient « faire exploser le nombre de faux positifs ».
Et LQDN va plus loin : l'application ne serait pas seulement inefficace, elle pourrait même être contre-productive. En rassurant maladroitement les utilisateurs, elle serait ainsi susceptible de conduire ces derniers à faire fi des gestes barrières.
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Le premier pas vers une surveillance de masse ?
Par ailleurs, malgré des résultats incertains, StopCovid ferait peser de graves menaces sur les droits fondamentaux des individus. La Quadrature du Net craint, par exemple, que son utilisation ne devienne obligatoire, ne serait-ce que pour accéder à certains lieux publics. Ce qui remettrait donc largement en cause la notion de volontariat.Enfin, l'association s'inquiète de voir la surveillance massive et durable devenir la norme. « Personne n'est capable de dire à l'avance pendant combien de temps l'application serait déployée », déplore-t-elle. Le dispositif pourrait alors être prolongé indéfiniment et ouvrir la porte à d'autres technologies, telles que la vidéosurveillance automatisée ou la reconnaissance faciale.
En conséquence, LQDN appelle le gouvernement à renoncer à son projet. Et à rediriger les moyens investis vers d'autres pistes pour protéger la population, telles que la production de masques, de matériel médical ou la mise à disposition de tests.
Source : La Quadrature du Net