Aujourd'hui, une nouvelle fuite en avant est engagée, avec la montée en puissance des services LTE (long term evolution, 3,9G) plus rapides encore et mieux adaptés à l'usage croissant des smartphones. Mais les clients qui, à l'instar des vendeurs, ne sont pas très informés sur cette technologie (cf. le manga très réaliste de J.P. NISHI), prêtent davantage attention à leur facture, ce dont profitent les opérateurs virtuels de plus en plus visibles.
Magasin Labi (Yamada Denki) du quartier Oimachi à Tokyo, un jeudi après-midi, les clients n'affluent pas. Bonne occasion pour changer de téléphone portable, troquer un bon vieux « galake » (« Galapago keitai », surnom des mobiles traditionnels japonais) contre un smartphone. Etant abonnée chez NTT Docomo, l'auteur de ces lignes n'a de toute façon guère le choix puisque ledit Docomo ne propose désormais pour ainsi dire que des smartphone. Et quitte à changer de mobile, autant prendre le dernier cri... c'est-à-dire opter pour le service Xi (prononcez « cross-i ») basé sur la norme à très haut-débit LTE.
Le choix est d'autant plus tentant que Docomo a eu la générosité de distribuer à ses abonnés de longue date des coupons de réduction sur le changement d'appareil d'une valeur de 5 250 yens (52,5 euros). Sans compter que les points convertibles en argent se sont accumulés au fil des années me donnant droit à une ristourne de 310 euros sur le mobile souhaité.
Qui plus est, le même Docomo propose une remise mensuelle de 18 euros chaque mois durant 2 ans sur l'ensemble de la facture pour inciter à la migration vers Xi. Résultat: obtention de l'appareil choisi, Sony Mobile Xperia SX pour zéro yen alors que son prix est normalement de près de 60 000 yens (600 euros). Il me fut même offert une réduction supplémentaire de 5000 yens (50 euros) par Labi pour leur laisser le vieux « galake ». Reste que la procédure de changement aura pris plus de deux heures et que les forfaits proposés par NTT Docomo ainsi que les options, dont certaines obligatoires, sont quasi incompréhensibles. Il faudra donc (comme d'habitude) attendre les premières factures pour savoir réellement de quoi il en retourne.
NTT Docomo peut néanmoins être content: il vient de recruter une nouvelle cliente Xi/LTE qui va rejoindre les quelque 6 millions d'autres souscripteurs ayant déjà opté pour cette évolution sans trop savoir de quoi il en retournait. Et tous de contribuer ainsi à désengorger le réseau 3G/WCDMA du même Docomo où se connectent environ 50 millions de personnes et où les soucis dus aux embouteillages s'accumulent. Toutefois, on ne sait si c'est volontaire ou non et s'il en eut été de même dans une boutique spéciale Docomo, mais le vendeur du Labi n'a pas dit un seul mot sur les avantages/inconvénients du service Xi/LTE, lequel est pourtant censé être promu à l'envi puisqu'il est devenu le nouvel enjeu concurrentiel entre opérateurs japonais.
En effet, si NTT Docomo a devancé tout le monde en ouvrant son réseau LTE le 24 décembre 2010, ses deux principaux riveaux, KDDI (service AU) et Softbank Mobile, l'ont rejoint le 21 octobre dernier, poussés par la sortie le même jour de l'iPhone 5 d'Apple, compatible avec cette norme et qu'ils sont les deux seuls à proposer au Japon. NTT Docomo n'alignait initialement que des cartes LTE pour PC, mais désormais, même si l'iPhone est absent de sa gamme, il propose une panoplie de smartphones compatibles (dont le Galaxy S III de Samsung) et recrute ou fait migrer ainsi des clients à tour de bras (1 million par mois ce dernier trimestre) en les alléchant avec des promotions et une formule d'échange de données pour moins de 50 euros.
Habituellement, les ristournes sur les appareils ne s'adressent qu'aux nouveaux abonnés, mais face à l'arme iPhone 5 de ses concurrents, NTT Docomo a élargi cet avantage non négligeable à ses actuels clients qui changent d'appareil (d'où les remises de 18 euros par mois durant deux ans dont va bénéficier l'auteur de ces lignes).
NTT Docomo dit couvrir désormais en LTE 100% de la population japonaise. KDDI et Softbank proposent ou vont quant à eux proposer des forfaits à 5 460 yens pour l'iPhone (5 985 yens - environ 60 euros - pour les autres appareils compatibles), des tarifs égaux ou inférieurs à ceux de NTT Docomo hors campagne de réduction. A partir de la collection hivernale, les trois opérateurs envisagent apparemment de proposer en majorité des appareils compatibles LTE, une fois la couverture étendue à 40% pour Softbank, 60% pour KDDI. Par ailleurs, si jusqu'à présent NTT Docomo n'offre que des terminaux dont le débit de réception est inférieur aux capacités réelles de la norme LTE, à partir du mois prochain il devrait proposer des appareils capables de recevoir des données à la vitesse théorique de 112,5 mbits/s. Selon le groupe d'informations économiques Nikkei, Docomo espère que 60% des téléphones qu'il vendra en tout dans l'année d'avril 2012 à mars 2013 seront compatibles LTE.
Quant aux trois opérateurs, ils devraient au total investir cette année pas moins de 16 milliards d'euros pour faire évoluer leurs réseaux. Ces sommes colossales destinées à installer de nouveaux équipements LTE dans les stations de base sont la cause des tarifs relativement élevés des services afférents, comparés aux offres 3G. Du coup, les clients, qui découvrent à l'usage l'addition, sont parfois tentés de chercher ultérieurement un autre fournisseur de services.
Bien qu'ils soient peu connus, il existe au Japon plusieurs opérateurs virtuels (MVNO) qui, contrairement aux trois gros acteurs, ne vendent certes pas de téléphones mais des cartes SIM à placer dans un terminal compatible. Parmi ces concurrents de deuxième rang (qui louent une partie des infrastructure des trois grands), on remarque notamment Amazon Japan, Aeon (grande chaîne de super et hypermarchés), So-net ( fournisseur d'accès à internet, émanation de Sony) ou encore prochainement la galerie marchande Rakuten associée au fournisseur d'accès à internet e-Access.
D'après une série de tests complets effectués avec les cartes SIM des différents opérateurs successivement glissées dans le même appareil (Galaxy S III de Samsung), eh bien les prix moindres des opérateurs virtuels s'expliquent par des services offerts de qualité un peu inférieure, avec des limites plus basses quant aux quantités de données autorisées (avant une chute dissuasive du débit accordé). En usage non intensif, les propositions de ces opérateurs alternatifs méritent toutefois d'être étudiées.