La Commission européenne a annoncé, vendredi, avoir ouvert une enquête visant à établir si Facebook a floué des annonceurs, en utilisant des données recueillies auprès d'eux pour mieux les concurrencer en ligne.
Facebook était dans le collimateur de l'Union européenne, au même titre que les autres géants du numérique, ce n'est un secret pour personne. Mais la Commission européenne a franchi un cap en annonçant, enfin de semaine, avoir ouvert une « procédure formelle d'examen » contre Facebook. Bruxelles veut savoir si la firme de Mark Zuckerberg a eu un comportement anticoncurrentiel, violant les règles de l'UE, en utilisant des données publicitaires récoltées auprès d'annonceurs dans le but de les concurrencer sur des marchés où l'entreprise Facebook est présente, comme le marché de la publicité en ligne.
Bruxelles veut savoir si Facebook a abusé des données collectées auprès de ses concurrents pour leur nuire sur d'autres marchés
Par l'intermédiaire de cette procédure, la Commission espère déterminer si Facebook lie son service d'annonces en ligne, Facebook Marketplace, à son réseau social, en violant des règles de concurrence de l'Union européenne. Pour rappel, Facebook Marketplace est la plateforme qui permet aux utilisateurs du réseau social d'acheter ou de vendre des biens.
L'enjeu est tout bonnement délicat puisque Facebook, 3 milliards d'utilisateurs mensuels, possède quelque 7 millions d'entreprises clientes, qui font de la publicité sur les services de la firme américaine. « Cette dernière recueille une mine de données sur les activités des utilisateurs de son réseau social et au-delà, lui permettant ainsi de cibler des groupes de clients spécifiques », analyse la vice-présidente de la Commission européenne en charge de la Concurrence, Margrethe Vestager.
Bruxelles va ainsi examiner si les données recueillies par Facebook lui offrent un avantage concurrentiel abusif, surtout dans le secteur des annonces en ligne, secteur où le géant des réseaux sociaux est en concurrence avec des entreprises auprès desquelles elles collectent des données. « Dans l'économie numérique actuelle, les données ne peuvent pas être utilisées d'une manière qui fausse la concurrence », réagit à ce propos Magrethe Vestager.
Une amende potentielle pouvant atteindre 10 % du chiffre d'affaires de l'entreprise
L'enquête doit permettre de savoir si Facebook a bien tenté de nuire à la concurrence sur les marchés voisins à ceux de la publicité en ligne et des réseaux sociaux, voire d'évincer des services d'annonces en ligne concurrents. Car les données collectées par l'entreprise sur ces fameux marchés voisins peuvent en effet se révéler encore plus précieuses pour concurrencer les entreprises qui les ont fournies.
La Commission européenne pense notamment aux fournisseurs d'annonces en ligne, qui peuvent faire la publicité de leurs services sur Facebook, tout en étant placés en concurrence avec le propre service d'annonces du réseau social, Facebook Marketplace. Bruxelles craint en tout cas que la firme américaine puisse fausser la concurrence, par exemple en obtenant des informations précises sur les préférences d'utilisateurs, sur la base des activités de ses concurrents, et d'exploiter ensuite ces données pour adapter Facebook Marketplace.
En cas de pratique anticoncurrentielle avérée, Facebook se heurterait aux articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. L'entreprise américaine encourrait alors une amende pouvant grimper jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires mondial de l'entreprise.
Ce vendredi également, l'autorité britannique de la concurrence et des marchés (CMA) a elle aussi lancé sa propre enquête, pour les mêmes suspicions. Les deux autorités pourraient collaborer.