Atlas, l'oeil de Moscou de Facebook au service des annonceurs

Thomas Pontiroli
Publié le 25 novembre 2014 à 13h34
Atlas by Facebook veut mettre fin au recoupement d'informations entre les cookies recueillis sur PC et les ID iOS ou Android pour identifier un utilisateur à travers les terminaux. Cet exercice, essentiel pour optimiser les dépenses publicitaires et ne pas harceler les internautes, est en passe d'être remplacé.

A première vue, le rachat d'Atlas par Facebook en mars 2013, un vieil ad-server de Microsoft, n'avait rien de fracassant. Mais cette plateforme, utilisée par les annonceurs pour programmer l'affichage de leurs publicités et en mesurer l'efficacité, a été revue de fond en comble. Grâce à elle, Facebook veut être le premier vrai acteur global à offrir une vision du consommateur, qu'il soit sur son smartphone, sa tablette ou son PC.



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François-Xavier Pierrel gère les activités Atlas pour Facebook en Europe du Sud. Invité par l'Electronic Business Group (EBG) à se prononcer sur les enjeux du suivi multicanal - soit la capacité de comprendre qu'une même personne a consulté une fiche produit sur son mobile et l'a acheté ensuite depuis son ordinateur -, il avoue que le rachat d'Atlas a d'abord été une surprise. Pourtant, explique-t-il, « l'ad-serving est la pierre angulaire du multicanal car si on y ajoute la bonne couche de données, on peut résoudre un problème essentiel ».

Facebook ID, un connecteur unique

A priori, Atlas est un serveur de pub classique, qui compte les clics des internautes et cherche à savoir qui a converti en achat. Or, là où un autre ad-server utilise des cookies pour remonter ces données, et se limite donc à l'environnement de l'ordinateur, Atlas s'appuie sur le Facebook ID, ce numéro attribué à chacun des 1,3 milliard de membres, et capable de garder le lien entre tous les terminaux pour identifier la personne.

Pour que le système fonctionne, deux prérequis : que l'application utilise le Facebook Connect sur mobile ou tablette, ou que l'utilisateur soit connecté à Facebook depuis un ordinateur - dans ce cas, et au moyen d'un cookie, Atlas pourra suivre sa navigation. « Nous avons un objectif de 80% de personnes connectées depuis mobile », affirme François-Xavier Pierrel. Si Facebook a un bon taux de pénétration, il n'est pas omniprésent. Pour atteindre ce pourcentage d'internautes, des partenariats seront noués avec d'autres régies mobiles.

Un ciblage centré sur l'internaute

Quatre grands piliers caractérisent l'offre Atlas. Il s'agit tout d'abord d'un marketing centré sur l'utilisateur, contrairement à l'approche centrée sur le site (site-centric) traditionnelle, qui consiste à analyser l'audience d'un site pour effectuer le ciblage. Ici, le ciblage se fait au niveau de la personne. En second, Atlas sait suivre cette même personne grâce à son connecteur unique à travers différents terminaux. Grâce à cette meilleure compréhension du parcours client, l'outil réattribue mieux l'importance de chaque levier marketing.

Ce troisième facteur est surtout important pour Facebook qui a intérêt à ce que soit reconnu son rôle dans un processus de transformation client. En effet, si l'on attribue une vente à un mot clé par exemple, qui dit que l'internaute n'a pas consulté auparavant une annonce sur Facebook et a davantage été influencé par elle ? Deezer, qui a récemment adopté Atlas, dit identifier 20% de conversions en plus qu'avec un modèle reposant sur les cookies. Son but à terme : mieux connaître les niveaux de contribution pour optimiser l'achat média.

Atlas s'attaque au commerce en dur

La dernière brique composant Atlas est plus ambitieuse encore : créer un pont entre le commerce en dur et le e-commerce. Comment ? « Lorsqu'un consommateur renseigne son adresse e-mail en boutique pour un programme de fidélité, on postule qu'il s'agit de son adresse primaire, et donc celle qu'il utilise également sur Facebook. Dans ce cas, nous faisons correspondre les deux, et comprenons qu'il s'agit du même individu », explique François-Xavier Pierrel. La mécanique n'est donc pas parfaite et touche qu'une portion du public.

« Le défi du pont entre online et offline doit se voir sur cinq à dix ans », estime le responsable d'Atlas. « A la base, l'idée est de faire mieux que le cookie. Mais il reste beaucoup de domaines qu'on ne peut pas mesurer, comme la presse ou la télévision, qui est un énorme domaine », ajoute-t-il. Pour cela, Atlas devra s'entourer de partenaires afin de créer le plus de liens possibles entre les canaux encore absents du radar de Facebook.

Big Brother part d'une bonne intention

Du point de vue d'un annonceur, il peut y avoir un intérêt à aller encore au-delà de cet écosystème, pourtant déjà vaste. Un spécialiste de l'audience et de la donnée comme Weborama, éditeur d'une DMP, pourrait avoir intérêt à proposer aux marques une vision du parcours client dans « l'univers » Facebook, mais aussi celui d'Amazon, pressenti pour lancer un concurrent à Atlas, et bien sûr Google et pourquoi pas Apple.

Si cet appel des annonceurs à atteindre un point de vue omniscient sur le client peut effrayer les internautes par son côté « Big Brother », les acteurs de l'industrie veulent rassurer. Pour François-Xavier Pierrel, le but est de limiter la pression publicitaire grâce à des annonces pertinentes. Il ajoute que si l'utilisateur le souhaite, il peut se désinscrire de ces programmes dans ses paramètres de confidentialité. Même discours chez Havas.

« L'une des choses qui me fait lever le matin est de pouvoir diffuser moins de publicités, mais des choses plus utiles, donc nous avons besoin d'un écosystème d'identifiants », affirme Sylvain Le Borgne, responsable des plateformes de données au sein de l'agence. A la différence des cookies traceurs, qui ont de plus en plus mauvaise presse, Facebook voudrait jouer la transparence car ce sont les internautes qui donnent leurs informations. Cette hyper-connaissance de leur vie améliorerait leur expérience en baissant la pression pub.

Mais le réseau social marche sur la corde raide. Si ses membres sont informés que leurs informations sont utilisées à des fins de ciblage dans son propres écosystème, savent-il qu'elles le sont (hormis les données nominatives) également désormais au sein de l'écosystème étendu Atlas ? François-Xavier Pierrel rétorque que cela améliore l'expérience utilisateur. Mais il sait que le système ne marchera que tant que les membres joueront le jeu du partage d'informations, et que Facebook maintiendra « son contrat de confiance ».


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