Facebook fait un grand pas dans les médias, et contre Google. Le réseau social a obtenu de neuf grands titres qu'ils publient une partie de leurs contenus (articles, vidéos et photos) intégralement dans ses pages. Cette offre, « Instant Articles », concerne le New York Times, BuzzFeed, National Geographic, The Atlantic et NBC aux États-Unis, la BBC et le Guardian au Royaume-Uni et Bild et le Spiegel en Allemagne.
Alors que 85 % des membres de Facebook consultent le réseau social depuis un mobile aujourd'hui, l'objectif est de fluidifier la lecture des articles, pas toujours commode sur ce canal. En les publiant lui-même, il évite le saut de son application vers un site tiers, possiblement lent et qui le prive de « temps passé ». Lire des articles sur le réseau social dopera l'engagement des membres. Une donnée regardée par les annonceurs.
La force de Facebook est qu'il va pouvoir servir les articles de façon ciblée - Crédit : Facebook
Facebook décrit Instant Articles comme le prolongement naturel du partage de liens qui a lieu actuellement. Visuellement, rien ne différenciera d'ailleurs ces articles intégrés des liens classiques. Mais lorsqu'on clique dessus, une page dédiée (très soignée, il faut le reconnaître) apparaît et affiche le contenu de l'article. Sans surprise, les vidéos sont jouées automatiquement. Facebook présente cette fonction comme une innovation journalistique. Elle sert en fait à afficher plus de vidéos vues, et rehausser les dépenses des annonceurs.
Une source de revenus pour les médias
Pour attirer les médias dans ses filets, Facebook ne promet pas que de la visibilité et quelques fonctions ludiques comme le zoom sur les photos et la géolocalisation. Le bénéfice doit être de monétiser ces articles et c'est ce que le réseau social propose. Deux cas de figure se présentent. Soit les médias gèrent eux-mêmes la publicité affichée dans leurs articles et récupèrent l'ensemble des revenus. Ou bien ils confient la gestion de leurs campagnes à la régie de Facebook (Audience Network), et acceptent de lui céder 30 % des recettes.Pour ce qui est de la donnée récupérée sur les comportements de lecture, un actif essentiel aujourd'hui, le réseau social laissera aux médias la possibilité de faire leurs propres suivis via des outils tels que ComScore, ou d'autres. Facebook ne dit pas en revanche s'il stocke ces informations sur ses serveurs, ni s'il les utilisera.
Présentation par Facebook de son offre Instant Articles - Source: Facebook.
Une arme de plus contre Google
Avec Instant Articles, l'enjeu semble dépasser la simple presse. Facebook voudrait changer le paradigme actuel selon lequel Google est la principale porte d'entrée sur le Web. C'est qu'en parallèle, le réseau social teste auprès de quelques membres américains un moteur de recherche de liens, leur évitant d'utiliser Google pour chercher un lien à partager. Une autre initiative visant à garder les internautes dans son écosystème.Pour certains analystes, ces projets confirment les intentions de Facebook d'attaquer Google sur la recherche en ligne. Après tout, le réseau social a la taille critique désormais (1,4 milliard de membres et 1 milliard de milliard de publications indexées) pour prétendre « afficher le Web » à sa façon, un Web mobile, plutôt que celle du moteur de recherche classique, dont la faiblesse est de ne pas tenir compte des messages sociaux.
Le timing de Facebook pour porter ce coup serait d'autant mieux choisi qu'il a bel et bien confirmé sa faculté à gagner de l'argent sur le mobile, transformant totalement son modèle économique en trois ans. Alors que dans le même temps, la valeur que tire Google de ce canal, moins adapté à ses publicités, décroît. Entre les deux géants du Net, l'ambiance est à la veillée d'armes. L'entame de la guerre de succession est proche.
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