Interstellar : la science-fiction sans 3D et sur pellicule de Christopher Nolan

Audrey Oeillet
Publié le 03 novembre 2014 à 15h26
Interstellar, le nouveau film du réalisateur britannique Christopher Nolan, débarquera sur les écrans français le 5 novembre. Outre délivrer une nouvelle fresque de science-fiction qui va probablement marquer les mémoires, le cinéaste impose un peu plus son opposition au tout numérique.

Memento, Inception, The Dark Knight... la filmographie de Christopher Nolan est aussi riche que variée. Si peu de monde contredit aujourd'hui le fait que le réalisateur est l'un des plus talentueux de sa génération, c'est sans doute autant pour les scénarios, qu'il écrit généralement lui-même ou avec son frère, que pour son attachement à certaines valeurs du cinéma classique. Car Christopher Nolan est un farouche opposant à la 3D et au tout numérique.

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« La 3D n'est pas la solution »

Alors que la plupart des films à grand spectacle sortent aujourd'hui au cinéma en version 3D, Christopher Nolan n'a jamais cédé à l'appel du procédé. Pourtant, on imagine aisément ce qu'un tel rendu aurait pu donner sur un film comme Inception, par exemple, ou encore dans The Dark Knight rises, ultime volet de sa trilogie Batman. Mais pour le réalisateur, la 3D n'est pas la solution : « Nous avions étudié la possibilité de tourner Inception en 3D, et nous avons estimé que nous serions trop limités par la technologie. Nous n'aurions pas été en mesure de réaliser le film de la manière dont on le voulait. Nous avions fait quelques tests de conversion en 3D après le tournage, et c'était très bon, mais nous n'avions pas le temps de faire une conversion qui nous aurait apporté satisfaction. »

« Si vous souhaitez toucher un large public, la 3D n'est pas la solution. Je n'ai jamais rencontré une seule personne qui aime la 3D » lançait-il à l'époque de la promotion de The Dark Knight rises. Une prise de position radicale qui n'a vraisemblablement jamais été remise en question par les sociétés de production. La preuve : malgré un potentiel évident, Interstellar n'est pas proposé en 3D. « Cette décision est simplement basée sur ce que je pense être juste pour les films que j'ai envie de réaliser, et, de même que les sièges d'un stade ne sont pas les plus confortables pour regarder une comédie, la 3D n'est pas la meilleure solution pour toucher un large public » expliquait-il en avril dernier.

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Interstellar filmé en 70mm...

Le désintérêt de Nolan pour la 3D relief va de pair avec celui qu'il exprime vis-à-vis du numérique. A l'heure où la plupart des réalisateurs, en particulier de blockbusters, se sont déjà orientés vers le numérique pour tourner leurs films, Christopher Nolan reste fidèle à l'argentique. Interstellar a été tourné en grande partie avec des caméras IMAX, et en 70mm. Et si la pellicule se fait de plus en plus rare sur les tournages, le 70mm l'est encore plus : très prisé dans les années 50, le format, deux fois plus large que le 35mm en raison de l'absence de piste son sur le négatif, offre plus de détails à l'écran et une image plus lumineuse.

« La pellicule reste le meilleur moyen de capturer et de projeter une image. Je suis en faveur des innovations technologiques mais elles n'ont de l'intérêt uniquement que lorsqu'elles proposent quelque chose de mieux à ce qui était réalisé auparavant. Or ce n'est pas le cas avec ces nouvelles technologies » expliquait Christopher Nolan, plus tôt dans l'année.

Problème : si le format 70mm correspond au choix du réalisateur, à sa vision du film, difficile aujourd'hui de projeter ce genre de pellicules. On aurait également pu croire que Paramount, le studio qui distribue le film aux Etats-Unis et qui est passé au tout numérique début 2014, allait freiner les ambitions du cinéaste.

Au lieu de ça, Paramount a soutenu Nolan, mais ça n'a pas totalement réglé les difficultés de projection : seules 15 copies du film en 70mm circuleront à travers le monde. L'immense majorité des salles, qui ne sont plus équipées pour projeter de l'argentique, diffuseront une copie numérique. 10 salles américaines ont été convaincues par le studio hollywoodien de dépoussiérer leur projecteur adapté pour proposer Interstellar en 70mm, gagnant ainsi le droit de commencer son exploitation 2 jours avant la date de sortie officielle, tout comme plus de 200 autres salles qui ont ressorti leurs projecteurs 35mm de leurs archives. Les 5 copies 70mm restantes seront dispersées en Europe.

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...et projeté dans une salle française

L'une des copies 70mm se trouve en France : elle a été projetée le 31 octobre dernier au Grand Rex, en présence du réalisateur lui-même. Pour les 2700 personnes présentes à la projection, ce fut l'occasion de découvrir Interstellar tel que Nolan souhaite le montrer au public. Mais ce genre de diffusion sera très réduit dans l'Hexagone. Seule une salle pourra exploiter les bobines.

Et, pour une fois, ce n'est pas un cinéma de la Capitale qui a acquis la possibilité d'exploiter cette unique copie française, mais une salle normande : le Grand Mercure d'Elbeuf-sur-Seine. La vision de Christopher Nolan s'invite définitivement là où on ne l'attend pas.

On imagine que tant que le réalisateur parviendra à cartonner au box office, les studios hollywoodiens le laisseront travailler avec sa vision personnelle. Christopher Nolan est un réalisateur très bankable, et il n'y a pas de raison de penser qu'Interstellar ne sera pas l'un des plus gros succès en salles en cette fin d'année. Une situation qui a également de quoi réjouir les exploitants de salles, même si on imagine que beaucoup souhaiteraient ne plus avoir à jongler avec les projecteurs, une démarche qui peut s'avérer coûteuse au final.
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