Quinze années. Quinze longues années. C'est le temps qu'il aura fallu attendre pour découvrir le nouveau roman d'Alain Damasio. Intitulé Les Furtifs, il succède à La Horde du Contrevent, une épopée aux frontières de la fantasy et à la langue fabuleuse, flirtant allègrement avec la prouesse littéraire oulipienne.
Une démarche que Damasio a poussée encore plus loin avec Les Furtifs, qui propose non seulement une langue recherchée et tranchante (comme à son habitude), mais aussi une proposition syntaxique hors norme.
Un troisième roman extrêmement attendu
Avec Les Furtifs, Alain Damasio signe son troisième roman après La Zone du dehors et La Horde du Contrevent. L'auteur lyonnais, porte-étendard moderne d'une science-fiction à la française, livre un récit qui mêle anticipation et grandes thématiques sociétales, le tout mâtiné de la poésie qui lui est si chère. Comme dans La Zone, il brosse ici le portrait d'une société de contrôle telle que théorisée par Foucault et Deleuze, dans laquelle les réseaux sociaux, le besoin de reconnaissance et les multinationales règnent en maîtres.Dans ce futur dystopique, où les grandes sociétés ont racheté des villes et où les citoyens payent un forfait pour vivre leur vie dans l'une ou l'autre de ces villes en fonction de leurs moyens, Damasio dresse le portrait de plusieurs personnages qui cherchent à en apprendre plus sur les Furtifs, ces êtres quasi-invisibles circulant à la périphérie de notre champ de vision. « Des êtres de chair et de sons, à la vitalité hors norme, qui métabolisent dans leur trajet aussi bien pierre, déchet, animal ou plante pour alimenter leurs métamorphoses incessantes », et qui se pétrifient dès qu'on les capte du regard.
Une véritable prouesse littéraire
Si vous avez déjà lu un roman d'Alain Damasio, vous savez déjà que l'auteur voue une véritable passion à la langue française. Dans ses deux précédents romans, comme dans les nouvelles issues de Aucun souvenir assez solide, Damasio accorde une importance capitale aux mots utilisés et au rythme de ses phrases, jouant autant qu'il le peut avec les mots et leurs sens.Les Furtifs ne fait pas exception à la règle, et si 15 années le séparent de La Horde du Contrevent, ce n'est pas pour rien. L'auteur a en effet raffiné son style à l'extrême pour l'occasion, en ciselant son vocabulaire et ses phrases.
Au-delà de ce travail purement littéraire, Damasio a aussi cherché à pousser encore plus loin les limites de l'exploration syntaxique déjà expérimentée dans La Horde. Chaque personnage de ce roman à plusieurs voix s'exprime différemment des autres par son vocabulaire, usant de champs lexicaux propres et d'un phrasé distinctif. Pour aller plus loin, l'auteur est même allé jusqu'à jouer avec la ponctuation et les symboles, les détournant de leur usage premier pour enrichir sa narration.
Une prouesse confinant à l'expérimentation qui renouvelle l'expérience de lecture et invite à découvrir un monde autre, neuf, et excitant en diable.
Les Furtifs est disponible dès aujourd'hui aux éditions La Volte, pour 25€.