Le gouvernement d'Olaf Scholz veut capitaliser sur les carburants neutres en CO₂ pour ne pas pénaliser son industrie automobile.
Fin 2022, le Parlement européen a voté en faveur de l'interdiction de la vente de voitures et de camionnettes à essence, et même d'hybrides, dès 2035. La Commission européenne, qui regroupe les gouvernements des Vingt-Sept, était censée entériner cette décision le 7 mars. Cependant, la première économie du continent a décidé de tout faire capoter à la dernière minute, à la surprise générale.
L'opposition inattendue d'un pays majeur dans l'industrie automobile
L'Allemagne s'est publiquement opposée au vote, estimant que le projet ne fournit pas assez de garanties sur le sujet des carburants synthétiques. Neutres en CO₂, ceux-ci pourraient permettre aux moteurs à combustion interne de limiter fortement leur impact sur l'environnement, et donc d'être vendus au-delà de 2035. Le pays entend en tirer parti pour préserver son industrie automobile, au cas où le secteur et son marché ne parviendraient pas à effectuer à temps la transition vers les véhicules électriques.
Bien que d'autres États se soient opposés très tôt au projet de loi, comme l'Italie, la Pologne et la Bulgarie, la majorité était encore acquise au sein de la Commission. Avec le vote défavorable de l'Allemagne, le contre est assuré, ce qui a conduit la présidence suédoise à reporter le vote à une date encore indéterminée.
Ce revirement serait lié à l'incapacité de la coalition menée par Olaf Scholz de trouver un accord sur le sujet. Cette décision a néanmoins surpris de nombreux observateurs, car certains constructeurs du pays se sont déjà engagés à respecter ces échéances, comme Audi : « Nous abandonnerons progressivement le moteur à combustion interne dès 2033, parce que le véhicule électrique à batterie est la méthode la plus efficace pour la mobilité individuelle. »
Des technologies qui ne font pas l'unanimité
Si les carburants de synthèse dont il est question ne se sont pas fait une place de choix dans ce projet de loi, ce serait pour de bonnes raisons. Les e-carburants, par exemple, permettent effectivement de réduire considérablement les émissions de CO₂ des véhicules en circulation, mais leur fabrication nécessite une quantité importante d'énergie. Ceci laisse entendre qu'une voiture électrique consommerait moins d'énergie par kilomètre parcouru. Considération qui n'est pas à prendre à la légère dans un contexte énergétique mis à mal depuis le début de la décennie.
De plus, dans certains cas, ce type d'initiative ne ferait que déplacer le problème de la pollution ailleurs. Par exemple, une étude menée aux États-Unis avait démontré qu'un litre d'éthanol consommé produit plus de CO₂ qu'un litre d'essence lorsque l'on considère l'ensemble de sa chaîne de production. Cela rappelle les préoccupations similaires concernant les véhicules électriques, en particulier autour de leur production et de leur fin de vie. Cependant, de nombreuses initiatives sont déployées pour réduire leur impact sur l'environnement. Ce qui contribue à reléguer toujours plus les véhicules à combustion interne au fond du placard, d'autant qu'ils bénéficient d'une attention et d'un engouement de moins en moins important de la part des consommateurs et des instances publiques.
Au fond, cette démarche du gouvernement allemand n'est-elle pas le chant du cygne d'un pan de l'industrie automobile vouée à disparaître dans les décennies à venir ?
Source : Electrek