Les Éternels

Il était attendu et espéré par beaucoup comme le vrai démarrage de la phase 4 du Marvel Cinematic Universe… Après un an de retard sur le planning initialement prévu, Les Éternels est enfin dans les salles.

Les Éternels (2021)

Chloé Zhao

Les Éternels est déjà le troisième film Marvel Studios à sortir sur nos écrans en 2021 et c'était certainement le projet développé par la Maison des Idées que j'attendais le plus cette année, pour deux raisons.

D'abord pour sa réalisatrice, Cholé Zhao. Venue du cinéma indépendant, récompensée par deux Oscars de la meilleure réalisatrice et du meilleur film pour Nomadland, sa présence derrière la caméra laissait espérer une approche visuelle différente de la formule Marvel déclinée depuis plus d'une décennie… Et les premières très belles images de trailer semblaient confirmer cet à-priori.

La seconde raison concernait le grand plan préparé par Kevin Feige, patron de Marvel Studios et ses équipes. Si Black Widow m'a laissé de marbre avec un retour dans le passé fort dispensable, et si Shang-Chi, la légende des Dix Anneaux était un bon divertissement respectant à la lettre les codes du MCU, Les Éternels nous promettaient d'explorer une nouvelle et immense facette du pan cosmique de cet univers, ouvrant par la même de nouvelles perspectives pour les années futures.

C'est donc plein d'espoir, malgré une critique américaine inhabituellement réservée, que je suis entré dans la salle pour rencontrer ces fameux Éternels. Mission accomplie ?

« Nous sommes arrivés il y a 7 000 ans, pour protéger les humains des Déviants »

Résumons rapidement la situation. Les Éternels sont un groupe de dix héros aux pouvoirs spéciaux, créés par les Célestes, des entités extraterrestres supérieures, pour combattre des créatures féroces connues sous le nom de Déviants.

Le petit groupe est arrivé sur Terre il y a 7 000 ans, participant à l'évolution de la civilisation en combattant ces monstres et en apportant connaissance et technologie aux humains. Les Éternels n'ont toutefois jamais cherché à interférer dans les conflits opposant les humains entre eux, ni même à combattre Thanos aux côtés des Avengers.

Leur mission face aux Déviants accomplie, nos héros se sont séparés et intégrés aux humains, tentant de mener une vie aussi normale que possible… jusqu'à ce que l'arrivée de nouveaux antagonistes les force à se réunir pour combattre une menace apparemment bien plus dangereuse que les précédentes.

© Marvel Studios
© Marvel Studios

« Si la fin du monde ressemble à ça, au moins on est aux premières loges »

Les Éternels est-il une nouvelle étape pour l'univers Marvel au cinéma ? La réponse est... mitigée. Oui, il y a de vraies différences de forme comparé à ce que l'on a pu voir au cinéma ou à la télévision depuis 2008 ; toutefois le film ne dévie finalement que très peu du carcan imposé par Marvel Studios.

Chloé Zhao semble avoir imposé un tournage en extérieur pour de nombreuses scènes du film, ce qui se voit et se ressent immédiatement à l'image. Plutôt que de nous abreuver de séquences tournées sur fond vert avec des incrustations plus qu'approximatives, la réalisatrice privilégie les grands espaces qui apportent une vraie bouffée d'air à un univers qui m'a souvent paru claustrophobique.

Plusieurs plans très contemplatifs, où la caméra semble presque flotter autour des personnages, sont surprenants de beauté et Chloé Zhao se permet même de citer Jack Kirby, l'illustre créateur des Éternels, sur quelques séquences qui semblent directement tirées des pages de comics.

Pas de panique chers fans d'action, Les Éternels regorge aussi d'affrontements homériques ! Cependant, la dernière baston mise à part, la chorégraphie des combats n'est jamais véritablement spectaculaire ou inventive. Marvel Studios a pour habitude de déléguer cette partie à une seconde équipe qui privilégie l'efficacité avec un découpage nerveux mais scolaire, et qui rappelle assez clairement le travail de Zack Snyder sur son Man of Steel avec quelques plans presque repris à l'identique.

« Nous avons aimé ce peuple dès le premier jour de notre arrivée »

La vraie plus-value du travail de cette cinéaste indépendante dans la grosse machinerie Marvel se retrouve au niveau du traitement des personnages. Il y a dix nouveaux protagonistes à présenter et malgré une durée conséquente de près de 2 heures 40, Cholé Zhao réussit à incarner chaque membre de l'équipe, à leur donner de la substance et une personnalité propre.

Le montage, étonnamment lent, n'a jamais peur de s'attarder deux ou trois secondes supplémentaires sur le regard d'Ikarus, de Sersi ou de Sprite, préférant nous laisser entrevoir leurs tourments et leurs dilemmes moraux plutôt que de sacrifier l'émotion au profit de la narration.

Le casting fait quant à lui la part belle à la diversité, affichée en étendard que cela plaise ou non à une certaine frange du public. Pour un blockbuster aux enjeux commerciaux colossaux, cela force l'admiration.

Pourtant ce rythme lent est aussi la principale faiblesse du film. Il faut une bonne heure et demi pour présenter tous les personnages et le film, pour maintenir l'intérêt de tous, se sent obligé de répéter encore et encore ses enjeux que l'on a bien intégré depuis une bonne heure déjà. On en arrive à trouver le temps un peu long dans cette histoire, certes belle à regarder, mais pas forcément passionnante à suivre.

© Marvel Studios

« On ne s'est pas vus depuis des siècles. »

Les Éternels suit finalement le canevas d'un Avengers : réunir une équipe dissoute et éparpillée aux quatre coins du monde pour affronter un ennemi commun.

Il y a une belle utilisation des différents pouvoirs, de la vitesse de Makkari, aux constructions de Phastos en passant par l'agilité guerrière de Théna mais rien qui ne rappelle les quelques bonnes idées vues dans les quatre épisodes des Vengeurs.

Le film souffre également d'antagonistes faiblards et amenés bien trop tard, qui ont bien du mal à susciter un sentiment de crainte chez le spectateur et encore moins une vision fin du monde. Après tout, n'est pas Thanos qui veut...

« Nous ne devons pas nous mêler de leurs guerres. »

En fin de compte, le film ne marque pas vraiment le début de la Phase 4, tout du moins narrativement. Des pistes sont bien lancées dans les deux scènes post-génériques mais pour l'heure, impossible d'imaginer ce que nous réservera Marvel Studios dans le futur.

Ce 26e film du MCU est davantage une parenthèse, une respiration bienvenue mais maladroite dans le grand projet mené par la filiale de Disney.

Marvel a tendance à inscrire ses héros dans des genres cinématographiques, comme Ant-Man et le film de casse ou Captain America et le thriller d'espionnage. Ici le studio s'attaque au film d'auteur, en intégrant certains codes du cinéma indépendant américain à une formule malheureusement inébranlable.

Les Éternels divisera les fans en deux camps difficilement réconciliables mais a au moins le mérite d'exister en tant que film un peu à part et pas franchement indispensable, avant le prochain Spider-Man qui devrait visiblement explorer le multivers et donner enfin le vrai coup d'envoi d'une prochaine décennie d'aventures super-héroïques.

L'avis de Clubic

J'ai longtemps cru que Marvel Studios se risquerait à bouleverser ses habitudes avec Les Éternels mais non, ce nouvel opus de la grande saga super-héroïque n'est finalement qu'un énième épisode de transition.

J'ai été totalement embarqué durant la première heure, m'attachant comme rarement dans le MCU aux personnages et séduits par une narration qui prend son temps plus que de raison pour me les présenter. Seulement la lenteur n'arrive pas à cacher très longtemps la vacuité d'une histoire que Marvel nous a déjà raconté plusieurs fois et les quelques blagues balourdes et hors de propos m'ont vite ramené sur Terre.

Les Éternels séduira peut-être un public plus habitué aux films contemplatifs et peu porté sur le cinéma de super-héros. De mon côté, je salue la légère prise de risques et n'ai certainement pas passé un mauvais moment... juste un peu longuet.

Les Éternels est à retrouver depuis le 3 novembre 2021 dans les salles de cinéma.