Après une phase d'appels à projets, l'agence américaine ouvre son porte-monnaie pour que trois conglomérats privés développent leurs stations spatiales en orbite basse. Une stimulation publique-privée pour faire décoller les activités habitées commerciales, mais aussi pour assurer différentes options post-ISS.
Les projets sont magnifiques… Sur le papier.
Prévoir la suite, investir tout de suite
Pour la NASA, le constat est simple : la Station Spatiale Internationale ne pourra pas continuer éternellement son rythme exceptionnel d'opérations. De plus, ses budgets orientés vers l'exploration habitée autour de la Lune ne lui permettent pas de prendre en charge une potentielle « ISS 2 ». Alors, après pratiquement vingt ans à préparer le terrain, il est temps que les entreprises privées prennent le relais, en prenant elles-mêmes les risques et en organisant leur écosystème économique en orbite basse. Reste que pour préparer une station orbitale privée, il faut des investissements massifs, et pour l'instant les industriels ne peuvent s'y atteler qu'avec l'assurance d'avoir la NASA en tant que cliente régulière.
C'est ce raisonnement qui avait déjà mené l'agence à financer Axiom Space pour que la jeune pousse texane ajoute ses deux modules à l'ISS (prévus en 2024 et 2026) avant de voler en solo. Et c'est dans ce cadre qu'elle a sélectionné trois géants (ou conglomérats) afin qu'ils développent leurs concepts pour pouvoir décoller d'ici la fin de la décennie.
Vous prenez les chèques ?
La NASA dépense donc 130 millions pour le projet « Orbital Reef » piloté par Blue Origin (associée avec Sierra Space, Boeing, Redwire Space, Genesis Engineering et l'Université de l'Arizona), décrit comme un projet évolutif d'espace de travail en orbite. Le deuxième gagnant est Nanoracks, avec Voyager Space et Lockheed Martin, qui récolte 160 millions de dollars pour sa station « Starlab » semi-gonflable. Son avantage est de pouvoir décoller en utilisant un seul décollage sur un lanceur lourd, éliminant tout besoin d'assemblage en orbite.
Northrop Grumman est le troisième gagnant de l'appel d'offre avec 125.6 millions pour sa station encore non baptisée. Cette dernière est modulaire, et se base principalement sur des briques technologiques déjà utilisées sur la Station Spatiale Internationale aujourd'hui. La NASA avait reçu 11 propositions pour cet appel d'offre, et selon la rumeur, SpaceX faisait partie des participants avec une version de Starship (ce qui ne veut pas dire qu'ils avaient investi beaucoup de ressources pour avoir un dossier aussi solide que les autres). Axiom Space n'a pas postulé, ayant déjà reçu son financement.
Qui pour remplacer l'ISS ?
Ces centaines de millions, s'ils semblent impressionnants, seront loin de suffire pour que les différents industriels concernés mettent effectivement en place leur station orbitale. Il s'agit d'une aide au développement, qui va leur permettre de finaliser leurs designs, de mettre en place un calendrier, de choisir les composants et les fournisseurs, de faire des maquettes à l'échelle, bref de préparer leurs futures stations (en parallèle avec leur propre investissement). En effet, s'ils sont très beaux et prometteurs dans les documents et vues d'artistes, encore faut-il confronter ces projets de station à la réalité industrielle, comme à celle des opérations dans l'espace.
La NASA organisera un « deuxième round », probablement autour de 2025, pour s'engager avec un ou deux partenaires sur un financement bien plus conséquent qui cette fois viendra en soutien de la production et la mise en orbite. L'agence américaine encourage d'ailleurs ceux qui ont été recalés à ce premier appel d'offres à s'autofinancer pour participer au suivant… Il faudra bien ce temps pour formaliser ce qui succèdera à la Station Spatiale Internationale pour les Américains, cette fois en tant que clients.
Source : NASA