La mécanique (illégale) des jeunes parisiens pour rouler en trottinette électrique sans payer

Alexandre Boero
Par Alexandre Boero, Journaliste-reporter, responsable de l'actu.
Publié le 01 juillet 2019 à 16h31
Trottinette Lime
© bakdc / Shutterstock.com

Des mineurs se servent de codes de cartes bancaires, volés et récupérés sur Internet, pour utiliser les trottinettes électriques.

Si l'on suit les règles fixées par chacun des opérateurs, il faut avoir plus de 18 ans et être titulaire d'une carte bancaire pour pouvoir s'offrir une petite balade en trottinette électrique. Sauf que vous pouvez être parfois surpris(e) en voyant déambuler des engins à deux roues en libre-service, pilotés par de jeunes adolescents. Il s'est en réalité mis en place un véritable système permettant aux individus mineurs de passer outre la réglementation.

La vigilance de l'enseignant, qui a découvert le pot aux roses

C'est lors d'un banal cours de sport que le professeur d'EPS d'un collège situé dans l'Est parisien a deviné comment ses élèves parvenaient à payer leurs trajets en trottinette. En voulant savoir ce qui pouvait détourner l'attention de deux collégiens en classe, l'enseignant, qui avait déjà vu ses protégés circuler dans le quartier sur les machines électriques, a compris que ses élèves, tous âgés de moins de 15 ans, utilisaient un moyen frauduleux pour s'amuser.

« Là, ils me tendent deux téléphones », indique l'enseignant à nos confrères de Libération. Sur le premier mobile, l'application Lime est ouverte. Sur le second figure un message contenant des suites de numéros ainsi que des informations confidentielles. En réalité, les données correspondent à des numéros de carte bancaire, accompagnés de la date d'expiration et du numéro de vérification de carte, le fameux CVV. Vous le voyez venir ? « Ils utilisent tout simplement des cartes volées pour recharger les trottinettes », regrette le professeur.



Des codes issus du dark web

La question qui mérite une réponse est : comment de jeunes collégiens ont-ils pu avoir accès à ces codes de carte bancaire ? Ces derniers se sont simplement inscrits à une conversation sur la messagerie ICQ, suivie par 11 300 personnes ; une paille ! De cette conversation émergent régulièrement des codes de carte bancaire. « Les messages sont écrits en anglais, il y en a plus de 2 000 par jour. On dit "drop" quand on veut qu'ils envoient des cartes et "dd" [ pour «dead», «mort» en anglais, ndlr ], lorsque la carte ne fonctionne pas », détaille l'un des collégiens.

Le système est donc bien rodé. Il faut ensuite faire preuve d'une certaine dextérité pour attraper le code et ne pas laisser son voisin s'en emparer. Le futur voyageur débute avec cinq euros. S'il voit que le code fonctionne, il passe à 10, 15, puis 20 euros. Le montant dépend des cartes bancaires utilisées. « Sur les American Express, on peut payer seulement 5 euros. Les meilleures, ce sont les Mastercard. Quand elles fonctionnent, on peut aller jusqu'à 300, 400 euros », explique le jeune garçon.

La plupart des cartes volées proviendraient des États-Unis. Certaines victimes peu regardantes ne se rendraient même pas compte des mouvements imprévus sur leur compte. Les codes, eux, sont issus du dark web, où ils seraient accessibles contre 100 euros. Une somme directement versée au fournisseur, qui se frotte les mains de profiter de la crédulité de collégiens, bien plus exposés que lui aux retombées de tels actes.

Source : Libération
Alexandre Boero
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Commentaires (10)
Cleindori

ICQ, sérieusement ? Il est encore vivant, et même utilisé ? o_O

philippesnbrd

Marrant, vu leur âge, j’aurais plus imaginé que ça se passe sur Whatsapp que sur ICQ. Attention dossier : https://www.youtube.com/watch?v=6iCPIUGnHQ8

NiCO

Bizarre de ne pas utiliser 3D Secure au rechargement du compte quand c’est pas un compte qui a déjà été chargé à de multiples reprises de façon légitime … c’est un peu un fonctionnement “complice” de Lime du coup (qui pourrait tout à fait le déclencher au 1er euro !)

Felaz

ICQ c’est tellement old scroll

philippesnbrd

A mon avis, le taux de réussite (de conversion) est moins bon avec 3D secure, et ce moins bon ne doit pas justifier sa mise en place pour lutter contre cette fraude. Surtout que le 3D secure est souvent mis en place sur des paniers moyen élevés et doit avoir un coût qui même faible peut venir entamer les quelques points de marge

Faisduvelo

On pourrait juste vérifier avec 3D quand il s’agit de la première transaction pour le même débiteur, ça limiterait déjà grandement les possibilités d’arnaque. Ensuite, vérifier que le nom sur la carte correspond au nom du compte (Lime ou autre) qui lui même correspond à 1 email ou un compte Facebook ou Google du même nom.
Bref, il y a des moyens assez simple de limiter ce genre d’arnaque et qui ne demandent pas de mettre ne place de la haute technologie.

ld9474

Ca existe aux US le 3D secure?

dancod

Je suppose school?
Et puis ICQ c’est l’ancêtre de toutes les IM qui existent aujourd’hui, il est né fin 1996…

philippesnbrd

La plupart des solutions de paiement en ligne proposent des systèmes anti-fraudes avec une prise en compte des écarts de localisation : paiement en france d’une carte dont l’historique de paiement est à 99,9% en russie : no go. A mon avis pour que ce type de fraude soit possible c’est que Lime a ouvert les vannes à fond.

Urleur

c’est une goutte d’eau face à ceux qui vont vider les comptes en banques.

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