Firefox versus Brave : notre comparatif en 2024
Firefox versus Brave : notre comparatif en 2024

Brave et Mozilla Firefox sont deux navigateurs Web open source axés sur la sécurité et la confidentialité. Étroitement liés dans leur genèse, puisque Brave a été créé par un ancien co-fondateur de Firefox, ils ont toutefois pris des directions différentes. Lequel sortira gagnant de notre versus en 2024 ?

Si on ne présente plus Mozilla Firefox, Brave est encore peu connu du grand public. Plébiscité pour ses performances, l’outsider compte bien entrer dans la cour des grands. Pour y parvenir, il a fait le choix de nouer un partenariat avec Mistral, le petit génie français de l’intelligence artificielle. Actée en janvier dernier, cette alliance devrait permettre à Léo, l’assistant IA du navigateur, de prendre du galon. Concernant l’usage des modèles LLM, les ambitions de Mozilla sont bien différentes. La fondation a investi plusieurs millions de dollars pour créer Mozilla.ai, un écosystème IA dédié à la communauté open-source.

Pas d’assistant virtuel à l’horizon pour Firefox, mais une stratégie orientée vers une protection accrue de la vie privée, comme en témoignent les derniers développements visant à améliorer Monitor Plus, l’outil de surveillance qui permet de supprimer ses données personnelles subtilisées à des fins commerciales.

Pour comparer Brave et Firefox, la rédaction s’est penchée sur les principaux critères de sélection d’un navigateur : ergonomie, performances, vitesse et fonctionnalités. Découvrez notre comparatif de 2024 pour vous faire votre propre opinion !

Brave
Brave
  • Respect et protection de la vie privée
  • Interface et ergonomie soignée
  • Le plus rapide du marché
Mozilla Firefox
  • 100 % développé en interne
  • Fiable, efficace et stable
  • Fonctionnalités d'optimisation de l'interface et de l'expérience utilisateur

Brave vs Mozilla Firefox - La philosophie

Porteur d’un héritage conséquent issu de la démocratisation du web, Firefox a longtemps endossé le rôle d’altermondialiste face aux mastodontes Internet Explorer, puis Chrome. Géré par la fondation Mozilla, en partie développé par une solide communauté de contributeurs, ce navigateur open source (licence MLP 2.0) fait vœux de transparence, d’ouverture et de liberté sur Internet, tant sur desktop (Windows, macOS, Linux) que sur mobile (Android, iOS). Porte-étendard de la lutte contre la privatisation et la monétisation du web aux dépens du respect de la vie privée des internautes, Firefox est l’une des rares interfaces de navigation à s’affranchir de Chromium (moteur de rendu Gecko et moteur JS SpiderMonkey maison). Malgré ses aspirations honorables, Firefox essuie quelques critiques persistantes. Performances en demi-teinte, problèmes de chargement de certaines pages web, innovations trop rares, le navigateur peine à convaincre un plus large public pour qui rapidité et stabilité irréprochable prennent le pas sur la confidentialité des données personnelles.

Firefox

Lorsqu’il sort de beta en 2019, Brave entend bien sortir le web libre de cette léthargie fonctionnelle. Un parti pris non anodin puisque le projet émane de deux acteurs familiers du projet Firefox : Brendan Eich (ex-CTO et CEO de Mozilla Corporation, inventeur du JavaScript) et Brian Bondy (ex-ingénieur système chez Mozilla). Le navigateur open source, disponible sur Windows, macOS, Linux, Android et iOS, qu’ils imaginent doit répondre aux impératifs formulés par Firefox (ouverture, liberté, respect de la vie privée), mais également s’attaquer à ce que son concurrent délaisse depuis trop longtemps, à savoir améliorer le temps de chargement des pages et développer un écosystème d’applications web alternatif aux outils Google. Encore tout petit, mais motivé par de grandes ambitions, Brave tente même de renouveler les modèles économiques traditionnellement mis en place par la plupart des acteurs du web et introduit le partage des revenus générés par les publicités entre l’entreprise, les internautes et les créateurs de contenus. Seule ombre au tableau : Brave est construit sur Chromium. Un élément rédhibitoire pour les fervents défenseurs du libre qui permet cependant au projet d’investir dans des innovations liées à la sécurité et la confidentialité.

Brave

Brave vs Mozilla Firefox - Les fonctionnalités principales

Contrepoids assumé face au recours massif à Chromium dans le domaine de la navigation en ligne (Brave, Opera, Vivaldi, Microsoft Edge pour ne citer que les plus populaires), Firefox ne s’inscrit cependant pas dans un rejet total des technologies développées par Google. D’une part parce que certaines fonctionnalités sont aujourd’hui devenues incontournables, d’autre part parce que plus de 73 % des internautes dans le monde se servent d’un navigateur basé sur Chromium.

On retrouve donc chez Firefox des options structurelles communes à Brave comme l’Omnibox (recherche URL + moteur de recherche) ou la gestion flexible des onglets. Concernant ce dernier point, Firefox, contrairement à Brave, pêche par l’absence de prise en charge des groupes d’onglets (regroupement par thèmes et couleurs). Une fonction brièvement abordée avec Panorama, projet définitivement abandonné en 2016. Seule solution : installer une extension tierce depuis le Firefox Browser Add-ons, store de plugins spécialement développés pour le navigateur de Mozilla.

Les extensions sont également prises en charge par Brave qui, grâce à sa base Chromium, offre la possibilité d’installer n’importe quel module additionnel depuis le Chrome Web Store.

Outre ces fonctionnalités et directions communes, Brave et Firefox embarquent quelques outils et services exclusifs à chaque navigateur.

Pour déployer un écosystème intégralement géré en interne, Brave se concentre sur le développement d’une page d’accueil multifonctionnelle. On y trouve quelques statistiques de navigation (nombre de trackers et publicités bloqués, quantité de bande passante économisée, temps gagné), des raccourcis vers les sites web les plus visités (modifiables par les utilisateurs), un fil d’actualités Brave News personnalisable compatible avec les flux RSS des internautes et un accès rapide vers Brave Talk, plateforme visio chiffrée.

Page d'accueil et Brave News
Brave Talk

Brave intègre son propre moteur de recherche, Brave Search, là où le modèle économique de Firefox repose sur l’activation par défaut de Google Search. En faisant appel à son propre index de recherche, Brave Search entend organiser les résultats de manière aussi neutre que possible et n’hésite pas à communiquer sur leur pourcentage d’indépendance.

Chez Firefox, les fonctionnalités exclusives sont plus rares et concernent essentiellement l’optimisation de l’interface. On pense au panneau latéral (affichage des onglets, favoris, historiques synchronisés sur plusieurs appareils) ainsi qu’à l’ensemble des outils à épingler à la barre personnelle afin de personnaliser le navigateur (capture d’écran, ouvrir un fichier, contrôles d’édition, etc.).

Personnaliser la barre d'outils Firefox
Panneau latéral Firefox et Pocket

On rappelle enfin que Mozilla est propriétaire du gestionnaire de pages web Pocket depuis 2017, intégré à Firefox.

Brave vs Mozilla Firefox - Les performances

S’il est évident, à l’usage, que Brave se montre plus rapide que Firefox concernant le chargement des pages web, les benchmarks réalisés sur un PC fibré (Asus VivoBook, AMD Ryzen 7 3700U, 8 Go de RAM, HDD 500 Go, Windows 11) confirment les meilleures performances de Brave.

Des résultats que l’on peut en partie expliquer par l’éventail de technologies activées par défaut chez Brave, permettant de bloquer le chargement des publicités, cookies, scripts et autres éléments de suivi, et donc d’accélérer la navigation. On rappelle cependant que les blocages agressifs imputables à Brave, malgré une vitesse de chargement nettement améliorée et un respect de la vie privée renforcé, tendent à gripper l’affichage des pages web. Il convient donc de trouver le juste équilibre.

Concernant la consommation des ressources système, les mesures relevées dans le gestionnaire des tâches Windows penchent également en faveur de Brave. Dans des conditions de navigation multimédia identiques, Firefox charge davantage de processus et consomme davantage de mémoire RAM. Bien que l’analyse sur la durée tende à démontrer une utilisation similaire du CPU par Brave et Firefox, on peut, si l’on pinaille, accorder le point à Firefox qui sollicite légèrement moins le processeur.

Consommation des ressources Brave et Firefox

Brave vs Mozilla Firefox - La sécurité

La sécurité des données personnelles des internautes est un point sur lequel les deux navigateurs ne transigent pas. Chez Firefox, cet engagement se traduit par le blocage avancé par défaut d’un certain nombre de trackers et de cookies (dont réseaux sociaux, cookies tiers et intersites), ainsi que par l’activation automatique de modules anti-mineurs de crypto et anti-détecteur d’empreinte numérique. Depuis les Paramètres > Vie privée et sécurité, chacun peut renforcer la protection initiale en optant pour un mode strict ou personnalisé.

Paramétrage de la sécurité sous Firefox

Afin d’accélérer le chargement et de stabiliser l’affichage des pages web dont les outils de suivi auraient agressivement été bloqués, Mozilla déploie SmartBlock dans Firefox (protection stricte et/ou navigation privée), une technologie capable de bloquer les publicités et de remplacer les pisteurs neutralisés par de faux trackers.

De son côté, Brave intègre et active par défaut un bloqueur de publicités et d’éléments de suivi baptisé Brave Shield. Ce bouclier anti-suivi permet de durcir les conditions de blocages (scripts et fingerprinting) et de forcer la mise à niveau HTTPS sur les sites web non sécurisés. En revanche, contrairement à Firefox stabilisé grâce à SmartBlock, Brave peine à afficher correctement certains contenus en cas de blocage agressif des cookies et trackers.

Blocage des trackers : une fonctionnalité de Brave

Chez Firefox, la sécurité de la vie privée passe aussi par le déploiement de solutions et d’extensions annexes comme Mozilla VPN (protocole WireGuard, service premium) et Firefox Relay (générateur d’alias mail). Fait assez rare pour être souligné, Firefox est l’un des rares navigateurs grand public à permettre le verrouillage de son gestionnaire de mots de passe à l’aide d’un mot de passe maître, fonction de sécurité absente chez Brave. Ce dernier met en revanche l’accent sur le renforcement de la protection de la vie privée et des données personnelles via la prise en charge du réseau Tor et grâce à ses modalités de synchronisation des données de navigation (pas de compte utilisateur, appairage par QR code ou chaîne de mots confidentielle).

Verrouiller le gestionnaire de mots de passe Firefox
Brave Sync

Rapidement évoqué plus haut, le modèle économique sur lequel repose Firefox dépend étroitement de ses partenariats avec d’autres acteurs du web. Aujourd’hui, le navigateur de Mozilla tire la majorité de ses revenus de l’intégration de Google Search comme moteur de recherche par défaut (entre 400 et 450 millions de dollars par an jusqu’en 2023) et épingle en page d’accueil des raccourcis sponsorisés. Un modèle certes moins intrusif que celui déployé par d’autres navigateurs, mais qui interroge toutefois sur la cohérence du projet Firefox et sur les concessions que l’on accepte (temporairement) de faire pour soutenir une vision idéalisée du web.

Brave innove réellement avec un modèle de redistribution des revenus générés par la publicité. Afin de ne pas faire d’entorse à ses engagements, le navigateur dépend de sa propre régie publicitaire (Brave Ads) et propose à ses internautes, s’ils le souhaitent seulement, de visionner un nombre quantifié d’annonces quotidiennes, discrètement affichées sous forme de notifications. Les revenus générés sont ensuite répartis entre Brave, les internautes et les sites visités (membre du programme Brave Rewards) au prorata du temps d’attention qui leur aura été accordé, sous forme de BAT (cryptomonnaie). On rappelle toutefois qu'en 2020, le navigateur a été épinglé pour avoir redirigé ses utilisateurs sur des liens affiliés à leur insu, et donc monétisé une partie de leurs comportements en ligne en dépit de ses principes.

Alors, Brave ou Mozilla Firefox ?

Difficile de faire un choix entre Firefox et Brave. D’un côté, l’opposant historique aux géants du web monopolistiques, de l’autre l’alternative récente, forte des évolutions, erreurs et apprentissages passés de la concurrence.

Pour résumer, Brave comme Firefox se donne pour objectif principal de préserver la vie privée et de sécuriser les données personnelles des internautes en leur offrant une interface de navigation open source, portée par l’idéal d’un web réellement libre et ouvert. Malgré tout, les deux navigateurs connaissent des écueils, qu’il s’agisse de la léthargie fonctionnelle, de performances mitigées et de la monétisation détournée des données personnelles des utilisateurs (partenariats Google et sites sponsorisés) pour Firefox, ou du choix structurel (base Chromium) et d’une confiance écornée par la mise en place d’un programme d’affiliation dissimulée pour Brave.

Ces défauts mis de côté, on conseillera davantage Brave pour le grand public puisque le navigateur a fait le choix d’activer par défaut toutes les parades de sécurité anti-suivi et collecte de données privées par des tiers. De ce point de vue, Firefox conviendra mieux aux fervents détracteurs de Google, suffisamment expérimentés pour changer le moteur de recherche par défaut, désactiver l’ensemble des options liées aux sponsors et à la télémétrie, renforcer la sécurité du navigateur et de leur vie privée depuis les paramètres de configuration avancée (about:config, à manipuler en connaissance de cause).