Michael Philippe : "Lekiosk va tendre vers le modèle Flipboard"

Thomas Pontiroli
Publié le 30 mai 2014 à 13h48
Depuis 2011, Lekiosk est l'une des applications les plus rentables de l'App Store. Concurrencée par les kiosques d'Apple et de Google, celle-ci fait peau neuve. Explications du co-fondateur, Michael Philippe.

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Quelle place pour Lekiosk en 2014 ?

Nous visons toujours les lecteurs qui préfèrent le magazine en tant que produit, ceux qui prennent le temps de lire, qui ont une passion, leurs thématiques de prédilection, qui cherchent de l'analyse, etc. C'est une façon de lire différente de celle qui consiste à s'informer avec de l'actualité chaude, des brèves et les réseaux sociaux. En cela, notre offre qui compte aujourd'hui plus de 1 300 magazines répond plus au premier type de lecteur.

Qu'apportez-vous dans cette refonte ?

Le gros de notre lectorat est une cible très exigeante, comportant beaucoup de CSP+. Ils veulent un accès immédiat, multi-supports et une qualité d'expérience élevée car c'est un marché très concurrentiel et ils ont été habitués par les standards américains de haut niveau. Après six mois de travaux nous sortons donc cette nouvelle version dont la principale évolution visible est le design. Nous sommes convaincus que nous sommes entrés dans l'ère du design. Nous avons également poussé l'expérience de personnalisation des contenus.

Le lecteur choisit parmi ses thèmes favoris et peut aussi en exclure certains, ceux qu'il n'aime pas. Nous lui suggérons ensuite trois niveaux de recommandation : ses habitudes de lecture, les thématiques qui peuvent lui plaire et les dernières actualités. C'est une tendance forte : nous avons un journaliste qui éditorialise la plateforme. Sa mission est d'extraire des contenus intéressants afin d'inviter le lecteur vers un magazine.

L'autre axe sur lequel nous avons beaucoup travaillé concerne la rapidité d'affichage, qui est l'un des principaux freins à la lecture - cela peut être lié à un interstitiel qui se charge mal ou à un téléchargement trop lent. Dans la nouvelle application nous avons divisé le temps de chargement par deux. Il faut compter moins d'une minute pour télécharger un titre entier. L'utilisateur peut aussi lire son contenu en streaming.

Un magazine n'a pas été conçu pour tablette...

Cela peut paraître surprenant qu'il y ait un tel engouement pour la lecture de magazines sur tablette mais en réalité ce support est un vrai produit, et c'est ce que recherchent nos lecteurs. Ils ne le voient pas comme du contenu, à l'image des articles Web. Ce type de pratique est à comparer à l'écoute d'un album de musique. Nous avons remarqué que les femmes aimaient voir la pub dans les magazines, pour repérer des marques.

Aujourd'hui nous pesons environ 5% de la diffusion numérique sachant que nous sommes partis de zéro. Par ailleurs nous n'allons pas proposer d'abonnement aux applications des magazines car nous considérons que concevoir une appli, c'est un métier, c'est le nôtre. Celui des éditeurs reste de produire des contenus.


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L'abonnement est-il le bon modèle pour la presse ?

Comme l'ont montré Deezer, Spotify ou Netflix, il faut proposer un accès global aux contenus. Mais Lekiosk est convaincu que dans la presse, on ne peut pas donner accès à l'ensemble des magazines pour un tarif unique. C'est pourquoi nous proposons 10 magazines pour 9,90 euros par mois. D'un côté, les lecteurs ne sont pas intéressés par tout donc cela ne servirait à rien. De l'autre, cela ne tiendrait pas pour les éditeurs.

Notre modèle économique consiste à prélever une commission fixe sur le forfait. Le reste est reversé aux éditeurs au prorata de l'utilisation du forfait selon le magazine et sa valeur faciale. Comme nous sommes certifiés OJD, cela permet aux éditeurs de valoriser leurs ventes numériques auprès des annonceurs. Malgré tout la presse quotidienne reste fermée à notre modèle, plus pour des raisons politiques car ils ont accordé l'exclusivité de leur diffusion. Pourtant nous leur permettrions de générer des ventes supplémentaires.

Comment attirez-vous de nouveaux lecteurs ?

Nous pensons que le freemium est une bonne solution car nous offrons des extraits d'article et des titres gratuits. Mais les lecteurs sont en quête d'expérience personnalisée. Cette approche permet de ne pas dégrader la valeur et de déclencher l'acte d'achat. Aujourd'hui nous avons un panier moyen d'un peu plus de 9 euros par mois et une base d'utilisateurs en croissance avec 130 000 clients à l'acte et 30 000 abonnés. Les thèmes les plus populaires sont la presse féminine, le people et l'actualité, comme dans le papier.


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Quelle est votre marge en matière d'innovation ?

Nous allons proposer de plus en plus du contenu directement consultable dans l'application, à la manière de Flipboard. Nous allons découper les magazines en articles mais aussi enrichir le flux avec des articles venant d'ailleurs car la valeur ajoutée des contenus n'est plus que dans les magazines, nous devons la proposer. Diffuser ce genre de contenus gratuitement est aussi une façon d'attirer l'utilisateur vers nos magazines.

Google Kiosque en France, c'est une bonne nouvelle ?

Absolument car cela montre qu'on est dans un marché stratégique à potentiel de croissance énorme - Deloitte nous a classé 4e entreprise française à la plus forte croissance en 2013 avec une progression de 6 573% sur cinq ans. Pour l'instant Google ne représente pas une menace car nous avons dix fois plus de magazines et nous personnalisons l'expérience. Nous pensons équiper tout de même un iPad sur quatre dans le pays.
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