Payant chez un certain nombre de banques, le virement instantané pourrait devenir gratuit partout, comme le demande la Commission européenne.
Si, en général, un virement bancaire est réalisé entre 24 et 48 heures après son enregistrement par la banque, le virement instantané, lui, est réalisé en une poignée de secondes et permet au bénéficiaire un crédit immédiat sur son compte, et ce, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Seulement, ce type de virement reste toujours payant chez certaines banques, alors même que Bruxelles recommande sa gratuité pour des pays comme la France. Cette volonté pourrait bientôt devenir réalité.
L'adoption massive du virement instantané, ce n'est pas pour tout de suite
En octobre dernier, la Commission européenne a adopté une proposition législative visant à « rendre les paiements instantanés en euros accessibles à tous les particuliers et à toutes les entreprises qui possèdent un compte bancaire dans l'UE ou dans un pays de l'EEE ». Autrement dit, Bruxelles veut donner un coup de fouet au virement instantané en Europe.
Le constat est assez criant. Très pratique et disponible depuis fin 2017, le virement instantané ne pesait que pour 11 % de l'ensemble des virements en euros effectués dans l'Union européenne au début de l'année 2022. Près de 9 virements sur 10 restent aujourd'hui traités comme des virements classiques, dits « lents ».
En France, les néobanques font le nécessaire pour démocratiser le virement instantané en le rendant gratuit. Les établissements et banques traditionnels proposent bien l'option, mais pas tous gratuitement, ce qui ralentit son adoption. Nos confrères de Next INpact relaient d'ailleurs une donnée intéressante tirée d'une étude de Galitt PayObserver (juin 2022) sur la question. En effet, 70 % des consommateurs français interrogés ne sont pas encore prêts à payer pour profiter de la rapidité du virement instantané.
En France, le virement instantané n'est pas encore gratuit partout
La recommandation de la Commission européenne vise notamment la France. À l'étranger, certains pays ont déjà adopté le virement instantané depuis longtemps (2008 pour le Royaume-Uni, et 2012 pour le Danemark, la Pologne et la Suède). En France, les professionnels parlent de la difficile mission d'absorber le coût à la fois technique et économique du passage au virement instantané. La Banque Postale l'estime à plusieurs dizaines de millions d'euros, notamment à cause de l'adaptation et du système de tenue de compte au temps réel.
Le virement instantané suppose en effet certaines capacités informatiques afin de pouvoir gérer tout pic d'activité. Le système traditionnel, lui, gère les virements par lots, de nuit.
La sécurité est aussi un enjeu de taille. Contrôler le virement d'une somme envoyée dans la zone SEPA vers des pays non européens (et vérifier qu'il n'est pas destiné à blanchir des capitaux ou à financer le terrorisme, ce que l'on appelle les « vérifications LCB/FT ») en moins de 10 secondes, comme l'exigerait un virement instantané, est par exemple impossible, selon le directeur des paiements de La Banque Postale. Certains contrôles réalisés auparavant ex-ante (avant l'effectivité du virement) sont ainsi menés ex-post pour les virements instantanés aujourd'hui.
Les virements instantanés à La Banque Postale sont gratuits depuis le 1er janvier 2022. En 2019, ils étaient facturés 70 centimes d'euro aux particuliers, et 80 aux entreprises et professionnels. La gratuité est aussi de mise chez Boursorama, Crédit Mutuel Arkéa et le Crédit Agricole. Du côté de la Société Générale, il reste payant (80 centimes dès le premier euro) si vous êtes l'émetteur du virement. BNP Paribas (1 euro par virement) et la Caisse d'Épargne (1 euro si le montant émis est supérieur à 300 euros) facturent toujours l'émission du virement instantané.
La Commission demande à ce que les services de paiement ne facturent pas les paiements instantanés en euro à un prix qui puisse être supérieur à celui des virements classiques. On tend donc ici vers la gratuité, puisque les virements traditionnels le sont déjà dans l'Hexagone. Reste maintenant aux banques récalcitrantes à se conformer.
Sources : Commission européenne, Next INpact