© John Bumstead / Twitter
© John Bumstead / Twitter

Introduite pour la première fois en 2018 par Apple, la puce de sécurité T2 a permis d'accroître le niveau de sécurité offert par les dernières générations de MacBook. Ses fonctionnalités sont néanmoins très vite devenues le cauchemar des spécialistes du reconditionnement.

Dans les ateliers des reconditionneurs, certains MacBook Pro et Air récents s'entassent sans perspective de pouvoir faire le bonheur d'un nouveau propriétaire… et ce, malgré leur parfait état de marche. C'est ce que souligne cette semaine Vice, dans un article consacré au phénoménal gâchis engendré par la fonctionnalité Verrouillage d’activation permise par les puces Apple T2, intégrées aux MacBook lancés depuis 2018.

Des Mac d'occasion complètement bloqués… sans espoir d'être remis sur le marché

Cette fonctionnalité, vantée par Apple pour la sécurité renforcée qu'elle permet en cas de vol ou de perte d'un Mac (et que l'on trouve aussi sur iPhone et iPad), a pour effet de bloquer totalement l'appareil. Lorsque le verrouillage d’activation est en place, il devient en effet impossible à quiconque, en dehors du propriétaire initial, de s'identifier et d'accéder aux paramètres de suppression des données du Mac, empêchant alors de facto toute réinitialisation ou manipulation en vue d'une revente.

Autrement dit, tout Mac récent arrivé dans les circuits de reconditionnement sans avoir, au préalable, été réinitialisé convenablement par son propriétaire d'origine est bon pour le recyclage sans autre forme de procès.

« Comme c'est le cas depuis des années pour les recycleurs avec des millions d'iPhone et d'iPad, c'est pratiquement terminé avec les MacBook maintenant - il n'y a rien à faire si un appareil est verrouillé », commente pour sa part John Bumstead, reconditionneur spécialisé dans les Mac et propriétaire de RDKL INC, une enseigne de réparations. « Même les jailbreakers/bypassers n'ont pas de solution, et ils n'en auront probablement pas, car les puces propriétaires d'Apple sont proprement redoutables », poursuit-il, résigné.

Renforcer la sécurité ? Ou tuer le marché de l'occasion ?

Et en la matière, la position d'Apple paraît assez trouble. Officiellement, la firme souhaite avant tout renforcer au maximum la sécurité de ses Mac pour protéger les utilisateurs du vol de leurs appareils et potentiellement des données qu'ils contiennent. Cela dit, cette politique a des conséquences particulièrement néfastes pour le marché de l'occasion et la vente de Mac de seconde main. Une situation qui profite à Apple et tend à raffermir ses ventes d'appareils neufs, ou reconditionnés par ses propres canaux (au travers du discret onglet « Refurbished » de l'Apple Store).

En l'occurrence, le problème devient d'autant plus visible que les cycles d'utilisation de 3 ans, en place au sein de nombreuses entreprises, arrivent à leur terme pour les machines achetées par milliers en 2018 et 2019. Ces firmes renvoient donc de larges volumes de MacBook vers le marché du reconditionnement et de l'occasion… mais une quantité importante de ces appareils sont bloqués par mégarde ou négligence.

« Maintenant, nous voyons quantité d'appareils arriver parce que les entreprises ont des cycles de produits internes de 3 ans. Elles commencent donc à se débarrasser de leurs modèles 2018/2019, et inévitablement beaucoup d'entre eux sont verrouillés », explique John Bumstead avant d'ajouter qu'il est rare que les reconditionneurs parviennent à joindre les propriétaires initiaux des machines concernées pour parvenir à un déblocage dans les règles de l'art grâce à leurs identifiants et leur assistance.

« Les anciens propriétaires ne répondent pas aux appels téléphoniques et les grandes entreprises qui se débarrassent de 3 000 machines supposent qu'elles ont été détruites. Il est donc essentiel que nous disposions d'une solution qui ne dépende pas de l'approbation de l'ancien propriétaire ».

La solution ne peut venir que d'Apple

Alors que faire ? Pour John Bumstead la seule véritable solution viendra d'Apple… si toutefois la firme se décide à faire un geste. Ce qui paraît plutôt improbable en l'état, la marque restant assez peu ouverte aux demandes des professionnels de l'occasion et des réparateurs n'appartenant pas à son programme officiel.

Bumstead a pourtant un plan : « Lorsque nous tombons sur une machine verrouillée acquise légalement, nous devrions pouvoir nous connecter à notre compte Apple, entrer le numéro de série et toute autre information, puis cliquer sur un bouton pour soumettre [ces informations] à Apple en vue d'un déverrouillage », estime-t-il.

« Apple pourrait alors explorer ses dossiers, interroger le propriétaire initial si elle le souhaite, mais s'il n'y a pas d'éléments de suspicion, et que le propriétaire initial ne se manifeste pas dans les 30 jours, l'appareil devrait être automatiquement déverrouillé », propose-t-il.

Une solution réalisable qui aurait pour principal avantage d'éviter d'envoyer au recyclage les appareils parfaitement fonctionnels, mais bloqués, qui atterrissent chez les réparateurs et dans les circuits de reconditionnement. Tout le monde y gagnerait, même Apple pour démontrer de manière très concrète que sa communication « eco-friendly » n'est pas juste une façade.

Source : Vice